De Mustapha Zoubeidi - Le Ministre des Sports ne croyait pas si bien dire quand, à propos du Stade Zouiten, il a parlé de mémoire de notre football. C'était à l'occasion de sa réouverture pour une rencontre de vétérans qui justement s'adapte si bien à l'esprit de mémoire. Si ce stade pouvait parler, il révélerait de quoi écrire des volumes tant l'histoire du football s'est concentrée durant un tiers de siècle sur la butte du Belvédère où ce temple en miniature a usé après tant de noms, celui de Géo André, un athlète français mort sur le champ de bataille avant de céder l'appellation à un Tunisien plus authentique. Témoin privilégié du football tunisien depuis les années trente, ce stade a vu passer bien des hommes qui par leur valeur, ont bâti des légendes qui ont perduré. En plus des exploits mémorables, ce stade a écrit des pages heureuses, tristes, tragiques et toujours émouvantes de notre football. Il fut aussi le théâtre d'événements insolites dont je vous livre ici trois d'entre eux. Déjà au début des années 30, ce stade fut le théâtre du premier derby, à huis-clos de surcroit, où Bourguiba, encore anonyme a piqué une colère homérique parce que pressé par son fils, encore très jeune enfant, il a dû l'accompagner sous les gradins, alors en bois, pour se soulager. Il n'a pas pu, de ce fut, voir le but si attendu qui évita à son club la relégation. Quinze ans après, ce stade a vu une scène qu'on ne risque pas de voir aujourd'hui. Celle d'un Président de club portant des gants et coiffé d'un fez, traverser le terrain pour aller gifler, devant des gradins combles, un de ses joueurs auteur d'une agression. Encore dix ans et le stade du Belvédère voit, en 1957, frôler l'incident diplomatique. François Mitterrand, ministre de la France qui assistait à un match Gala, a quitté précipitamment la Tribune quand les chefs de la Révolution Algérienne ont pénétré au stade. Le ministre des Sports ignore peut être ces événements enfouis dans le passé, mais peut il oublier, quoique ses propres exploits ont eu lieu ailleurs, que ce stade fut le théâtre au milieu des années 60, d'une exhibition de pupilles entre deux mi-temps d'un match international et qu'au cours de l'exhibition un jeune de dix ou onze ans a fait soulever d'enthousiasme l'assistance qui était loin de savoir que ce gosse sera un jour un ballon d'or. Au fil du temps qui passait Bourguiba devint le combattant suprême, Mitterrand Président des Français et Chedly Zouiten, l'homme qui traversa le terrain pour corriger Samaris, donnera son nom à ce stade, vers lequel Tarak Dhiab reviendra 45 ans après, non pas comme pupille mais en tant que Ministre des Sports.