Par Khaled Guezmir - Allons-nous revivre les Temps de Ali Ben Ghadhahoum (1864) où la Tunisie était coupée en deux : l'Est et l'Ouest du Nord au Sud. Dieu nous en préserve ! Ce qui est appelé désormais « la Tunisie des profondeurs et des steppes » vit un climat insurrectionnel trouble attisé par la revendication sociale mais qui, heureusement, n'atteint pas encore la remise en cause de la légitimité du pouvoir central. Il faut dire que ce dernier fraichement intronisé après des élections libres et transparentes, ne semble pas jouir de la traditionnelle période de grâce estimée presque universellement au moins à 100 jours. A qui la faute ! Au précédent gouvernement de M. Caied Essebsi ! Facile à dire mais pas convaincant du tout dans la mesure où celui-ci malgré les « charges » sonnées contre lui par certains partis de l'ex-opposition aujourd'hui au pouvoir et malgré « Kasbah II et III » et toutes les misères qui ont été faites pour le déstabiliser, a réussi à rendre le tablier proprement avec pour prime, la paix sociale et celle de la rue, et un portefeuille énorme de projets d'investissement et de développement avec des promesses fermes et de faisabilité réelle du G8 et des partenaires frères et autres amis de la Tunisie. En vérité ce qui se passe c'est le résultat d'une accumulation d'actes et de déclarations irresponsables à tous les niveaux. C'est ce que le grand patron de la science politique américaine « David Easton » désigne par « the volume stress » que je traduis par l'accumulation des exigences et de la demande sociale. En effet, après la révolution on s'est donné à cœur joie, à un véritable acharnement contre tout ce qui symbolise l'autorité de l'Etat. Loin de limiter la responsabilité à ceux qui ont réellement commis des actes condamnables que ce soit dans la répression ou la mauvaise gestion, l'opposition au gouvernement Caïed Essebsi, par sa mobilisation intense et sa critique acerbe et souvent injuste, a semé bien du vent en ne pensant jamais un jour en récolter la tempête ! Et voilà que la tempête est là et bien là, et c'est une épreuve majeure pour le pouvoir en place qui risque à nouveau sa légitimité. Et comme il refuse à juste titre la « main de fer » dans le gant de velours, de peur d'aller à nouveau vers la répression, il va falloir faire vite pour contenir la marée insurrectionnelle qui s'annonce. Pour cela le gouvernement «dialogue», mais il ne peut ignorer la nécessité de rétablir l'autorité de l'Etat. Une certaine fermeté doit accompagner la mise en œuvre rapide de mesures exceptionnelles pour soulager et calmer les régions intérieures de l'Ouest. Par ailleurs, il faut mettre tout le monde en face de ses responsabilités. Alexis de Tocqueville disait bien, que par instinct de conservation, l'homme donne toujours la primauté à la sûreté avant même la liberté et l'égalité. Tous ceux qui attisent le feu pour élargir la contestation sociale et enflammer la rue, se trompent parce qu'ils mettent la démocratie, elle-même, en danger et parce qu'à force de souffler le vent ils risquent un jour de récolter la tempête à leur tour. Le moment est grave. Aider le gouvernement aujourd'hui à remettre le pays au travail, à rétablir l'ordre et la paix sociale n'est pas faire acte d'allégeance mais à notre avis et bien au contraire, c'est un devoir patriotique. Notre démocratie est fragile mais elle est vivante et peut progresser sensiblement. Mais cela suppose un haut degré de responsabilité et de discipline individuelle et collective. La bonne opposition c'est celle qui sait faire la part des choses. Encourager la rue à la rébellion violente c'est tout simplement aller vers l'inconnu !