Par Khaled Guezmir - Le Premier ministre Hamadi Jebali a bien raison de se positionner sur le terrain économique. Il est l'un des rares parmi les leaders d'Ennahdha à avoir compris, que les Tunisiens jugeront son gouvernement en fonction des résultats et des politiques engagés pour remettre à niveau le pays plutôt que sur les intentions ou l'idéologie. Tout le monde parle en ce moment des « ballons d'essai » de son Parti et ses ramifications extrêmes et multiples, sur la « Chariaâ », le mariage coutumier, l'infiltration des médias et de l'appareil administratif, mais d'autres l'ont fait avant lui de Bourguiba à Ben Ali avec eux aussi leurs entourages ambitieux et zélés, mais le tout s'est effondré, chaque fois que le peuple a été affamé par des politiques erronées, inadaptées et peu productives comme ce fut le cas avec Ben Salah, la révolte du pain, ou le pillage systématique opéré par la famille et les alliés du dictateur. Par conséquent s'approprier l'Etat et les instruments de la coercition et de la décision publique, est encore possible pour un mouvement naturellement porté par son idéologie, à se confondre avec le gouvernement idéal et providentiel. Mais cela ne peut s'inscrire dans le durable que par l'établissement d'un système dictatorial comme c'est le cas en Iran. A ce propos j'ai toujours pensé que l'Islam politique a raté une occasion unique lors de la Révolution iranienne contre le Shah de construire un modèle systémique de société musulmane réellement démocratique, qui aurait pu inspirer, et être imité par les autres pays musulmans. Finalement, la seule démocratie en Islam à ce jour c'est celle qui a été réalisée par « l'islamité laïque » de la Turquie et non pas par celle de l'islamisme radical des Ayatollahs d'Iran. Pour revenir à notre « Aâcida » par ce beau jour du Mouled et à notre pays disons qu'Ennahdha et ses leaders ont tort de focaliser leur action sur le terrain idéologique et religieux à moins qu'ils aient pour dessein inavoué d'établir progressivement une nouvelle dictature islamique de type iranien en Tunisie. Certains le pensent sérieusement au vu du « double langage » et de la tactique de « l'offensive et du retrait » (Al kar… wal far) opérée chaque fois qu'un ballon d'essai échoue sur les rochers de la résistance encore vivace de la société civile tunisienne. Pour ma part je ne souscris pas à cette vision apocalyptique et pessimiste. Je préfère prendre au mot le Cheikh Rached Ghannouchi et M. Samir Dilou, encore que ce dernier à force d'habileté et d'intelligence, finira bien par inspirer un peu de méfiance ! Mais bon ! En tous les cas, les déclarations de l'idéologue n°1 et leader d'Ennahdha se réfèrent toutes à l'Islam réformateur du 19e et 20e siècle de Abdu et Afghani et s'identifient beaucoup plus au modèle turque d'Erdogan qu'au Wahabisme absolutiste et conservateur de l'Arabie Saoudite. Mais alors pourquoi toutes ces polémiques, ces hésitations et ces reculades pour dire clairement et simplement que le système politique tunisien sera comme il l'a toujours été civil, musulman modéré et ouvert sur la modernité universelle. Pourquoi accuse-t-on Béji Caïd Essebsi de vouloir remettre en selle le « bourguibisme » pour, tenez-vous bien, « combattre » l'Islam ! Accusation infâme et injuste ! D'abord parce que Bourguiba n'a jamais été un mécréant ni « Kafer » et d'innombrables thèses de doctorat soutenues dans le monde entier l'affirment. Il est même souvent présenté comme un réformateur musulman plus proche de Kheireddine et Salem Bouhajeb que d'Attaturk. Et puis l'Islam en Tunisie a toujours été homogène et vécu comme religion et culture populaire vivante et heureuse et non fardée de « noir » comme veulent nous l'imposer les courants obscurantistes minoritaires. En ce moment j'ai une pensée pour ma mère musulmane et belle et qui n'a jamais porté le noir ! Les familles tunisiennes qui regardent les séries télévisées turques sur MBC dont elles raffolent et tous ceux et celles qui ont fait le voyage à Istanbul, et ils sont très nombreux, n'ont jamais vu en Turquie deux sociétés qui s'affrontent, l'une occidentalisée et l'autre talibanisée. Ils voient plutôt une Turquie agréable où il fait bon vivre et où chacun est absolument libre de faire ce qu'il veut de son corps et de son esprit dans le respect mutuel total et la solidarité. Alors de grâce arrêtons ces diatribes excessives sur le message religieux. Chacun a sa lecture et sa compréhension des textes sacrés et la liberté doit être la norme basique et non l'exception. M. le Premier ministre, courage, faites votre travail, c'est la meilleure prière à Dieu et la meilleure offrande à ce pays et à ce peuple qui sont fatigués par les discours des faux prophètes et les dictateurs impénitents ! Vous en serez récompensé. Bon Mouled à tous. L'Aâcida n'a de noir que le « Zgougou » mais c'est un délice ! K.G sami Daassi tounsi patriote Mohamed Sadok Lejri coup d'oeil elchinois