• Adnène Hajji, porte-parole des protestataires: «Nous voulons des mesures urgentes et non des promesses!» • Réunion le 14 février entre les représentants des contestataires et le ministre des Affaires sociales Après une brève accalmie, la contestation sociale reprend de plus belle dans le bassin minier. Des employés de la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG) viennent de reprendre leur sit-in suspendu il y a quelques semaines, suite à l'annulation de deux rencontres qui étaient prévues pour le 25 janvier et le 8 février entre le ministre des Affaires sociales et des représentants des habitants du bassin minier. A Métaloui, des jeunes chômeurs ont posé des tentes sur les voies du chemin de fer, bloquant ainsi le transport du phosphate vers les ports commerciaux. Des familles de martyrs et de blessés de la révolution observent, quant à elles, un sit-in dans les locaux de l'Union régionale du travail de Gafsa. «La situation est explosive. Les jeunes organisent quotidiennement depuis mardi des rassemblements de protestation et des manifestations bruyantes pour exprimer leur ras-le-bol contre la marginalisation et la pauvreté qui frappent de plein fouet la région», témoigne Adnène Hajji, secrétaire général de l'union locale du travail à Redayef et porte-parole des protestataires du bassin minier. Et d'ajouter: « en reportant la tenue de deux rencontres consacrées à l'examen des revendications légitimes de la population, le gouvernement semble vouloir faire traîner les choses. Nous voulons des mesures urgentes et non pas des promesses». Les employés et les chômeurs en sit-in formulent des demandes qui concernent toute la région comme la titularisation des ouvriers des chantiers, la régularisation de la situation des anciens ouvriers de la CPG partis à la retraite dans le cadre de plans sociaux et qui attendent des indemnisations depuis 1986 ou encore le recrutement des jeunes dont les parents ont été victimes d'accidents de travail. Les protestataires réclament également le déblocage d'une enveloppe de 400 millions de dinars promise par la CPG et d'une autre de 250 millions de dinars de la part du Groupe Chimique Tunisien (CCT). Ces fonds devraient permettre non seulement la création dans le bassin minier d'une banque, d'une cimenterie et d'une société spécialisée dans le télétravail, mais aussi de financer le développement des services sociaux dans la région qui souffre d'un manque flagrant d'infrastructures pour l'éducation, la santé, la culture et les loisirs…«Pas question d'interrompre les sit-in ! Nous voulons bien croire aux promesses et cesser les protestations, mais c'est au gouvernement de montrer une volonté réelle de développer le bassin minier», martèle Adnène Hajji. Pertes de 3 millions de dinars par jour Ex-porte-parole du mouvement de protestation du bassin minier en 2008 ayant connu les affres des geôles de Ben Ali, Adnène Hajji compare le bassin minier à une vache laitière qui donne son lait aux autres et ne garde que les déchets et les maladies causées par émanations de produits toxiques nécessaires à la transformation du phosphate pour les habitants de la région. Le lait du bassin minier est le phosphate dont la Tunisie est le cinquième producteur mondial et qui avait procuré au pays 825 millions de dinars de recettes en 2010. Du côté de la direction de la CPG, on comprend parfaitement le sentiment d'injustice que ressentent les habitants du bassin minier. Une source digne de foi à la compagnie, qui emploie 12000 personnes, note, toutefois, que l'interruption de la production du phosphate ne fait que compliquer davantage la situation. Et pour cause : l'arrêt de la production se traduit par des pertes de 3 millions de dinars par jour. Au ministère des Affaires sociales, on explique les rencontres qui étaient prévues pour le 25 janvier et le 8 février entre représentants des contestataires et le ministre des Affaires sociales ont été «reportées et non pas annulées», et ce à la demande de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), qui souhaite prendre part aux négociations. Les services du ministère annoncent également qu'une rencontre prévue pour le 14 février entre une délégation de protestataires qui sera conduite par Adnène Hajji et le ministre des Affaires sociales, Khélil Zaouia, doit permettre de trouver des solutions rapides et efficaces à tous les problèmes du bassin minier. D'ici là, la région du bassin minier, restera dans l'attente qui dure depuis de longues années…