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Lettre ouverte à MM.les ministres de l'enseignement supérieur et celui de la culture - Objet : Rien, sinon le dire tout haut - Pièce jointe : Une profonde tristesse La chronique de Youssef SEDDIK
En circulant à travers les « bans » de tous les partis, les organisations et toutes les associations sur l'avenue Bourguiba, embrassant celui-ci (ou celle-ci), discutant avec celui-là (ou celle-là), j'ai vécu avec mes compagnons un premier Mai radieux malgré un temps mitigé. Cela m'a redonné de l'espoir et à ma plume des ailes encore malhabiles après un bon moment de quasi-paralysie. Je ne pouvais en effet plus rien écrire depuis deux semaines. Si j'ai quitté la Tunisie pour un amer exil en 1982, c'est que je n'avais plus rien à faire, à ressentir, à penser donc dans une atmosphère où le pays n'avait plus rien à me dire à part cet amour indéplaçable que je pouvais par conséquent transporter partout en mon cœur. Paradoxalement, l'exil renforce l'attachement à ce que nous appelons une patrie et Danton n'avait pas raison quand il disait qu'on ne pouvait pas l'emporter par-dessous ses semelles. La patrie avant tout en effet est une myriade de pensées et de luminances et certainement pas une nuée de poussières. Quand en une seule semaine, aujourd'hui et après ce que je m'entête toujours à nommer Révolution, je me vois interdire une maison de la culture dans la bonne ville de Kélibya, puis une faculté de l'université de Tunis où se tient une conférence publique, je suis pris de vertige en sentant la peur me reprendre, celle de devoir reprendre le chemin de l'expatriment. Seuls le soutien et la sympathie d'un très grand nombre de mes compatriotes, amis ou inconnus, souvent très haut placés dans la hiérarchie de ceux qui agissent dans les turbulences de cette étape intermédiaire et périlleuse de notre histoire ont permis à mes semelles de s'accrocher à ce sol. Seule une conférence organisée par deux associations à Djerba en tandem avec mon ami le professeur de médecine Essedik JEDDI sur la citoyenneté et le travail, à la veille du 1er Mai, m'a convaincu que l'espoir est possible pour en arriver un jour à casser le nez à la bêtise quand, en plus, elle devient arrogante. A Djerba et malgré les menaces sérieuses reçues par les organisateurs de la part de ces « cafards » ennemis de la pensée, les responsables de l'ordre républicain ont pu assurer aux deux conférenciers et à l'auditoire l'espace le plus calme, le plus serein pour une manifestation culturelle des plus riches en idées transmises et en débats contradictoires. Mais, en ces deux semaines de tumultes et de tourments, la Tunisie et les Tunisiens n'ont pas entendu une seule fois la voix des deux responsables en termes de « portefeuille » et de responsabilité gouvernementale que vous êtes MM.Mabrouk et Ben Salem. Le seul communiqué publié et diffusé en tant que tel provenait du Cheikh Rached GHANNOUCHI et qui a été sans nul doute à l'origine de la paix culturelle retrouvée à Houmet Essouk. Qu'est-ce à dire ? Que vous n'avez plus rien à dire, MM.les ministres après que le Guide d'Ennahdha s'était prononcé sur ce qui relève d'abord de vos responsabilités ? Et dans ce cas, êtes-vous seulement les soldats exécutants d'une idéologie partisane? Je n'ai aucune « expérience » personnelle de ce que vous pouvez être M.le ministre de l'enseignement supérieur, à part ce que les médias nous montrent, et j'en retiens, quant à moi, cette étrangeté de vous voir et de vous entendre parler le français sur une chaîne de l'Hexagone, dans une langue tellement confuse que la chaine a cru bon de nous faire la honte de sous-titrer vos paroles. Quant à vous M.Mabrouk, ma perplexité devant votre attitude est encore plus grande : Quand un jour j'ai sollicité de vous une audience, vous avez par excès de politesse et d'égards pour ma modeste personne, « menacé » de venir vous-même me voir quelque part. J'ai insisté pour faire comme tout le monde et être reçu dans vos bureaux. Vous voilà maintenant persistant dans une indifférence assourdissante quand des lieux que vous êtes censé gérer, à l'instar d'une maison de la culture, se trouve interdite aux gens du savoir et de la pensée. Notre seule espérance c'est d'attendre que les prochaines échéances électorales permettent aux Tunisiennes et aux Tunisiens de tourner la page où vous avez tous les deux inscrit tant de bizarreries (c'est le moins qu'on puisse dire !) dans la gestion de la seule richesse de mon pays que nul ne peut lui arracher : le bons sens, le goût, une certaine idée du Savoir et une vénération du « penser ».
Youssef Seddik rend visite à Moncef Marzouki Le philosophe et anthropologue Youssef Seddik a été reçu, hier, à midi, par le Président de la République, M. Moncef Marzouki, l'entretien qui n'était qu'informel et amical a porté sur les souvenirs d'enfance. Les deux personnages étaient à Sadiki pendant toute leur scolarité secondaire, à la même classe, très concurrents au niveau, notamment de l'arabe et du français. Ils se sont souvenu d'incidents difficiles à oublier, telles que certaines figures de grands professeurs à l'instar de Si Ahmed El Arbi et Si Tajeddine El Mokhtar, tous deux décédés. Ils ont évoqué leurs bagarres dans la cour du lycée et leurs chahuts. L'entrevue n'aurait pas eu le mérite d'intéresser la presse si le Chef de l'Etat n'avait pas chargé M. Seddik de donner une conférence le 24 juin à partir de ce site symbolique qu'est le Palais de Carthage. Nous avons interrogé M. Seddik sur ce qu'il comptait dire ou développer dans cette conférence, il a répondu qu'il y réfléchit encore avant de communiquer le libellé définitif au Président invitant. Il s'est contenté de nous préciser que le sujet tournera autour de cette question lancinante qui traverse chaque jour l'esprit de chacun de nos concitoyens, à savoir le rapport idéal qui doit se nouer entre politique et religieux.