« Al Mounawala », ou sociétés d'intérim ont constitué un des dossiers les plus chauds au lendemain de la révolution. Quelques mois après, il semble que d'autres priorités ont emporté sur ce sujet, est-ce pour longtemps ? Wait and see.
Ce qui est sûr, la pression sur les entreprises concernées ne s'est jamais affaiblie ; Et en absence d'une solution radicale, il faut s'attendre tôt ou tard, à de nouveaux épisodes de tractation.
Les sociétés d'intérim ne sont pas une exception tunisienne. Au contraire, leurs services sont bien répondus mondialement et constituent une solution adaptée pour les entreprises en phase d'expansion ou qui accusent un besoin précaire en main d'œuvre. Il existe même des sociétés multinationales spécialisées dans ce genre de services, qui ont développé un savoir faire et de bonnes pratiques dans le domaine.
Le recours aux sociétés d'intérim présente l'avantage de flexibilité et de rapidité du recrutement. Il constitue un choix stratégique pour les entreprises qui veulent se concentrer sur leurs métiers.
Dans certains modèles, l'intérim a porté, principalement sur la main d'œuvre non ou peu qualifiée. Dans d'autres modèles, l'intérim été justifié par un besoin incessant et temporaire à une main d'œuvre fortement qualifiée, c'est ce qui a été à l'origine du terme « intérim » : nom issu du latin « interim »qui signifie « pendant ce temps-là ». L'intérim est le temps pendant lequel une fonction est assurée par un remplaçant, le titulaire étant indisponible.
Dans le droit comparé, les situations permettant d'avoir recours au travail temporaire sont définies de manière extensive : remplacement d'un salarié absent, suspendu ou temporairement à temps partiel, accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, emploi saisonnier dans certains secteurs définis (CDD dans les autres secteurs), remplacement d'un chef d'entreprise ou d'un travailleur libéral. Notamment, l'employeur ne peut recourir au travail temporaire sur les postes de grévistes. L'intérim ne peut avoir pour but de "casser" une grève en remplaçant un gréviste par un intérimaire.
De ce qui précède, jamais l'intérim n'a été conçu pour contourner la législation de travail, ni pour minimiser le salaire de certains employés ni pour leur augmenter le temps de travail. En outre, l'intérim ne devrait pas viser le recrutement massif d'employés au lieu et place de relations de travail directes entre employés et employeurs.
Ceux qui appellent à abolir le service d'intérim commettent à mon avis une erreur stratégique. La décision de l'éliminer de la fonction publique l'est aussi.
Parce que l'intérim constitue la formule la mieux adaptée à certaines relations de travail et une diversification importante pour les investisseurs créateurs d'emplois.
Ceux qui cherchent à abolir la formule de travail intérimaire n'ont malheureusement pas touché le fond du problème. Parce que le problème n'est pas dans les mauvaises pratiques que certains se laissent faire, mais dans la règlementation de travail elle-même.
Faut-il rappeler dans ce sens que nous vivons avec une règlementation de travail qui n'est plus adaptée à notre contexte. Notre fameux code de travail date du 1er mai 1966, et est né « avec une barbe blanche », selon les dires du grand Professeur Farouk Mechri, tellement il a été « inspiré » de la règlementation française du travail, conçue déjà depuis une belle lurette.
Depuis 1966, très peu de modifications, ou mises à jour, ont été portées au code de travail. On cite notamment quelques « retouches » portées en 1993 pour consacrer l'égalité des sexes dans la relation de travail, ou celles de 1996 portant sur l'aménagement de la notion de « Contrat de travail à durée déterminée ».
Le recours massif et parfois exagéré à la formule d'intérim est donc justifié principalement par l'inadaptation de la règlementation de travail aux réalités du monde des affaires et au marché de l'emploi.
Le problème majeur porte sur la flexibilité du contrat de travail qui gagne à être améliorée en termes de durée du contrat, de temps du travail ou des conditions de travail, en intégrant les nouvelles formules apparues avec l'ère du temps (travail à temps partiel, télétravail, etc.).
Les contrats d'intérim devraient aussi être légiférés afin d'éviter les répercussions sociales qui s'engendrent. Une convention collective sectorielle applicable aux sociétés d'intérim devrait voir le jour. L'application de la convention collective de l'entreprise faisant recours à l'intérim, pour les intérimaires, pourrait aussi être envisagée. On peut aussi penser à l'adoption d'une règlementation comparée à la règlementation française en matière de salaire d'intérimaire qui dispose que « l'entreprise utilisatrice doit respecter la parité de traitement et de rémunération entre un salarié intérimaire et un salarié embauché en CDI à la fin de sa période d'essai ».
Ainsi, nous attendons que la chambre syndicale nationale du travail temporaire et des services de l'emploi, créée depuis février 2011, ainsi que l'UGTT se penchent sérieusement sur le sujet, afin d'organiser le secteur, mettre en place un cadre législatif clair loin de toute forme d'exploitation des travailleurs et de violation de leurs droits, mais aussi loin de toute manipulation du dossier ou de chantage émotionnel.