L'ancien président Zine ben Ali est prêt à restituer tous les avoirs se trouvant sur ses comptes bancaires en Suisse, d'un montant total estimé à plus de 8 millions d'euros, a déclaré avant-hier son avocat. Avant de s'enfuir en Arabie saoudite, le 14 janvier 2011, après plusieurs semaines de révolte populaire, Ben Ali et sa famille ont disséminé à l'étranger de nombreux capitaux que le gouvernement tunisien cherche maintenant à récupérer. L'avocat de Ben Ali, Akram Azoury, domicilié à Beyrouth, a annoncé avoir envoyé une lettre au ministre suisse des Affaires étrangères pour l'informer de la volonté de son client. «Vous êtes (...) autorisé à transférer ces prétendus avoirs et ressources à l'Etat tunisien sans qu'il ne soit nécessaire de suivre aucune formalité judiciaire et extrajudiciaire et sans même en référer à mon client», est-il écrit dans la lettre selon un communiqué d'Akram Azoury, qui ne chiffre pas ces avoirs. En 23 années passées à la tête de l'Etat tunisien, Ben Ali, sa femme Leïla Trabelsi et leur clan sont soupçonnés d'avoir accumulé une immense fortune répartie sur de nombreux comptes à l'étranger. Le montant total de cette fortune est inconnu, mais le gouvernement tunisien parle de milliards d'euros. En mai, le ministre tunisien de la Justice avait confié à Reuters qu'il s'attendait à remettre d'abord la main sur les avoirs placés en Suisse et au Liban. Le Liban a ainsi dit qu'il allait renvoyer environ 35 millions d'euros appartenant à Leïla Trabelsi. Il y a un an, la Suisse a annoncé avoir trouvé 50 millions d'euros liés à Ben Ali et gelé le compte correspondant. Quels types de biens « possède » Ben Ali en Suisse ? Dans une lettre adressée au Département Fédéral suisse des Affaires étrangères, Me Akram Azoury , avocat de Ben Ali, a annoncé que ce dernier se désiste de "tous prétendus avoirs ou ressources économiques qui se trouveraient sur le territoire Suisse" lui revenant. Que vaut cette déclaration sur le plan juridique? Elle est débord rédigée au conditionnel, c'est-à-dire plutôt négative. Cet avocat chevronné, sait très bien que sur le plan juridique, il faut qu'il y ait un acte officiel dressé par un officier public. S'agit-il de biens meubles ou immeubles? Evidemment c'est à l'Etat tunisien de procéder à toutes les formalités tendant au transfert des biens meubles ou des liquidités. Parmi les biens meubles il peut s'agir de bijoux ou d'objets de valeur, comme des tableaux ou des pièces de collection allant des timbres aux voitures de luxe. Quant aux bien immeubles, il faut que la partie diligente, entame la procédure nécessaire tendant à la vente par adjudication ou l'appropriation au profit de l'Etat tunisien, et ce, selon les lois en vigueur dans le pays où se trouvent les biens en question. Cela dit, et selon la formule avec laquelle a été rédigée la lettre en question, les biens dont il s'agit ont été vraisemblablement liquidés au profit d'un tiers acquéreur. Ben Ali possède-t-il des biens meubles en Suisse, et auquel cas, l'Etat tunisien a-t-il procédé à la saisie de ces biens, par le biais de l'Etat suisse, même à titre conservatoire? Il ne semble pas que des investigations aient été faites en ce sens, l'Etat tunisien ne s'étant intéressé qu'à l'argent déposé dans les banques suisses. Car, l'avocat de Ben Ali s'adresse dans sa lettre au Département Fédéral suisse au conditionnel, notamment par l'expression: "les prétendus avoirs ou ressources économiques". Cette formule avec laquelle est rédigée ladite lettre prête à équivoque. L'Etat tunisien: bénéficiaire négligent? Toutes les formalités conservatoires ont-elles été diligentées par l'Etat tunisien? On ne peut vraiment répondre à cette question d'une manière certaine. D'autant plus que le peuple qui est le premier intéressé, manque d'information entre autres à ce sujet. C'est la raison pour laquelle on ne peu être que sceptique devant cette déclaration équivoque, de l'Avocat de Ben Ali, rédigée au conditionnel, pour mieux noyer le poisson. Et puis comment se fait-il que cet avocat qui jusqu'à présent n'a fait que rouspéter, en criant haut et fort, au nom de son client pour empêcher la récupération des biens en question au profit de l'Etat tunisien, fasse un revirement de 180 degré. Est-ce du à une prise de conscience de sa part ou de la part de son client? Ou est-ce un moyen pour brouiller les cartes et gagner du temps pour sauver les biens qui n'ont pas encore été saisis? D'autant plus qu'on n'a aucune idée sur ces biens, et on ne sait pas si les procédures nécessaires ont été engagées pour les récupérer. Tout ce qu'on sait c'est que Marzouki, lors de son voyage au mois de juin dernier à Genève, où il était invité à la conférence internationale du travail, a demandé aux autorités suisse d'accélérer le processus de rapatriement des fonds bloqués en suisse. « C'est maintenant qu'on a besoin de cet argent et non dans dix ans » s'était-il exclamé. Il ajouta également que la somme déclarée, représente à peine 10% de la somme totale déposée dans les banques suisses par Ben Ali et ses comparses. Sachant que l'avocat de Ben Ali, parle des biens strictement au nom de son client. Or ce dernier aurait-il jamais déposé de l'argent dans les banques étrangères, ou acquis des biens à l'étranger en son nom propre ? Les prête-noms ne manquent pas et ils sont toujours là pour rendre service ! Voilà pourquoi Me Azoury parle de « prétendus avoir ou ressources économiques de Ben Ali »..... ! En tout état de cause, il est opportun pour l'Etat tunisien de réagir afin de pouvoir récupérer, ne serait-ce qu'une partie de ces biens à savoir, l'argent déjà gelé dans les banques, à notre connaissance et tel que l'ont déclaré les responsables suisses eux-mêmes. Pourvu qu'il n'y ait pas de surprises, car dans ces cas précis il faut être efficace et surtout habile. Platon n'a-t-il pas dit à ce propos à juste titre : «L'habileté est le talent de voir juste la fin de chaque chose » Ahmed NEMLAGHI Chiffres • Ben Ali et ses proches s'étaient constitués un trésor de 5 milliards de dollars (prises de particpations) • Sherpa, une ONG française estime que 100 à 180 milliards de dollars ont été détournés par des dirigeants à travers le monde, soit un dixième de la dette du Sud, alors que seulement 1 % à 4 % de ces montants ont été restitués aux populations spoliées (Source : Article paru dans Imagine)