Suspens entretenu dans la politique de restructuration structurelle et conjoncturelle du système bancaire et financier tunisien, lenteur accompagnant le nettoyage des banques complices de l'ancien système, les pratiques d'antan se poursuivent... et pourtant la BCT continue d'alimenter les banques en liquidité. Chedly Ayari, Gouverneur de la BCT a affirmé hier sur les ondes de Mosaïque.fm que la situation économique du pays est loin d'être alarmante, mais prête à l'inquiétude. Autre sons de cloche contredisent le président de la BCT où des voix s'élèvent pour lancer un appel de détresse et affirment que l'économie nationale butent tout droit le mur. Comble de confusions décideurs et nos professionnels sont paradoxalement opposés. Conformément à la note de conjoncture de la BCT, certains indicateurs de base (production agricole, exportation des produits manufacturiers, services) de l'économie nationale clignotent au vert, ce qui a permis la réalisation d'un taux de croissance de 3,3% et le repli du taux de chômage de 0,5 point de pourcentage. Deux chiffres en discordance. Même si le gouvernement ne cesse de vanter son triomphe économique, les mouvements de protestations relevant le droit au travail dans les régions les plus défavorisées et la répartition inégale de la richesse nationale se poursuivent. Des mouvements qui débouchent sur grèves générales et des grèves de la faim. Par ailleurs, le Conseil d'administration de la BCT a noté la persistance des pressions sur l'équilibre de la balance commerciale, sur la liquidité bancaire et sur le niveau des prix à la consommation. Si nous récapitulons : les pressions inflationnistes touchant directement au pouvoir d'achat du consommateur qui est toujours en quête salutaire d'équité sociale tant souhaitée pour l'amélioration de son niveau de vie, persistent pour ne pas dire qu'elle prend un trend haussier avoisinant les 5,6% et pouvant frôler les 6% d'ici la fin de l'année. « Il est, par ailleurs, attendu que ces pressions vont persister au cours des prochains mois en relation avec l'ajustement des prix de quelques produits et la hausse des prix de certains produits importés, ainsi qu'avec l'augmentation prévue des salaires », note le conseil de la BCT.
4.000 MDT de déficit commercial et 5.000 MDT, volume des injections au système bancaire
S'agissant de la balance commerciale, le déséquilibre ne fait que se creuser pour atteindre les 4.000 MDT, soit 5,6% du PIB contre 3,9% du PIB enregistrés durant la même période de l'année dernière. Un déficit qui a eu un impact direct sur le niveau des avoirs en devises. Lesquels ont enregistré une baisse pour atteindre 9.810 MDT (96 jours d'importations) contre 10.582 MDT (113 jours d'importations) en 2011. Les économistes s'alarment du seuil enregistré dans nos avoirs en devises. Un niveau alarmant, jamais enregistré qui fleurte en lisière avec la zone de tolérance prescrite. Le gouverneur de la BCT a annoncé des mesures d'urgence pouvant résorber un tant soit peu le déficit commercial dont notamment le lancement de mesures rationalisant l'importation des biens de consommation. Par ailleurs, la BCT s'apprête à faire pression pour comprimer crédits de consommation, terrain de prédilection des banques toujours réticentes face au financement des projets productifs et des projets à risque. La paralysie des institutions de crédit, première source de financement de l'économie nationale est menaçante. Un immobilisme complice qui interpelle moult interrogations.
Le secours inconditionné et hors norme apporté par l'Etat aux banques de la place, prendra-t-il fin ? Depuis la Révolution, le secteur bancaire tunisien poursuit sa descente aux enfers. Après la Révolution, au moins 650 MDT ont été retirés des banques. Depuis ce temps, le gardien du Temple n'a cessé d'injecter la liquidité bancaire aux institutions de crédit dépourvus de moyens. En septembre 2012, la Banque Centrale s'est encore une fois intervenue pour injecter d'importants montants ayant dépassé, au cours de ce mois et pour le troisième mois consécutif, le seuil des 5.000 MDT. A l'instar de la Banque Centrale Européenne (BCE), l'institution d'émission nationale emprunte le même cheminement pour extirper de cette mouvance les banques de la place de cette crise de liquidité. Reste à savoir si la BCT est en mesure d'aller au out de ses intentions ce qui permettra d'éviter le pire ? Mais quel tribut aura-t-on à payer en cas de fiasco de la politique monétaire actuellement appliquée ? Une inextricable situation face à un engouement des banques en quête de liquidité, les institutions de crédit tournent encore le dos aux hommes d'affaires et investisseurs, et pour alibi : les responsables craignent toute prise de décision? Les responsables d'hier sont toujours les mêmes. Dire qu'on parle de justice transitionnelle !
Le dossier bancaire et plus précisément la corruption et les affaires louches liés à quelques banques) enregistrées sous l'ère de Ben Ali tardent à monter en surface. Une justice bancaire transitionnelle s'impose-t-elle et qu'est ce qu'on attend pour ouvrir les dossiers moisissant au fond des casiers ? Nos banques tunisiennes cherchent-elles le beurre et l'argent du beurre?