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Jamila, ou le quotidien d'une paysanne
Reportage
Publié dans Le Temps le 11 - 11 - 2012

A 18km de la ville de Ghomrassen, gouvernorat de Tataouine, sous un soleil de plomb, une femme, paysanne et d'un certain âge, drapée dans son habit traditionnel, courbait le dos pour arracher, dans un mouvement machinal, le foin et les herbes folles qui gênaient ses quelques oliviers.
A ses côtés, trainaient son ânesse et les ustensiles qui lui servent d'outils pour cueillir les olives.

En ce mois de novembre, la pluie se fait rare en ces lieux. La terre est rêche, le climat est sec et la vie est dure. La rudesse du temps n'a pas dissuadé cette quinquagénaire d'aller cultiver sa terre.

Une battante d'avant l'heure

Tenant tête à une chaleur infernale, il faisait 45 degrés et point d'ombre dans les parages, cette femme rurale ne se souciait pas du temps qu'il faisait et fondait dans ce décor, s'affairant par-ci par-là.

La montagne à perte de vue, l'asphalte cramé par un soleil brûlant, on s'approcha de cette brave dame et l'aborda. Souriante et hospitalière, elle nous serra la main. Elle s'appelle Jamila, âgée de 55 ans, elle est mère de quatre enfants. Veuve à l'âge de 30 ans à peine, elle a dû galérer des années durant pour veiller à l'éducation de sa progéniture et leur assurer un bel avenir. Chose qu'elle a relevée haut la main.

Elle fait partie de ces rares personnes qui n'ont pas quitté la région d'Oued El Khil : «Je ne quitterai jamais mes terres, mes racines. Tout le monde est parti d'ici. Il faut dire que les conditions de vie sont d'une précarité humiliante ! La vie a quitté ces lieux. Mais j'y reste même si toute ma famille vit à une trentaine de kilomètres de moi. Mes enfants ont quitté le foyer familial et se sont installés chacun là où leur devoir professionnel les a menés.».

Une «femme» de fer dans un gant de velours

«Veuve depuis mes 30 ans et j'ai appris à travailler avec acharnement pour élever mes 4 enfants et assurer leur avenir.»

Jamila est une dame qui porte bien son prénom. Elle est l'emblème-même de la beauté intérieure de ces femmes rurales de notre Tunisie profonde. Celles qui, fières, déterminées et braves, ne se laissent pas affecter par les aléas de leur condition.

Voyant que les lieux où nous étions étaient totalement isolés du reste du monde, nous demandions à «khalti» Jamila, comment elle passe sa journée, d'où elle se procure sa nourriture et comment vit-elle ? Toujours aimable, elle nous répondit, sans pour autant s'arrêter de nettoyer le parterre de l'un de ses oliviers : «ma journée commence très tôt le matin. On n'est plus que deux maintenant à la maison. Je prépare à manger au benjamin de la famille, puis, accompagnée de mon ânesse et de mes ustensiles de travail, je m'en vais de bonne heure cultiver ma terre. Vous savez, avec le soleil brûlant, ma journée de travail finit tôt. A midi, je quitte déjà mes cinq oliviers. J'ai fait construire un puits à quelques mètres de ma petite parcelle de terre afin de ma rafraichir et de donner à boire à mon ânesse. Je viens, tous les jours, sauf les jours de grande pluie, chose rarissime ici, m'occuper de mes oliviers et de mes deux amandiers. Le travail est dur surtout que la sécheresse et la désertification menace nos terres ici. Mais, c'est notre seul gagne pain et je travaillerai ma terre jusqu'au dernier souffle. Je préfère compter sur moi-même que d'attendre l'aide d'autrui, gouvernement comme famille. Je suis veuve depuis mes 30 ans et j'ai appris à travailler avec acharnement pour élever mes 4 enfants et assurer leur avenir. La précarité des moyens m'a poussé à arracher la «halfa», vendre mes chèvres et à vendre le foin que je récolte sous mes oliviers. Dieu merci ! Je possède cette petite terre grâce à laquelle j'ai évité de vivre sous l'assujettissement de qui que se soit. Les temps étaient certes très durs mais «Hamdoulah» ! Il y a de ces villageois et riverains qui osent se plaindre de la pauvreté aux médias alors qu'ils sont paresseux et fuient le travail de leurs terres ! C'est honteux ! Cette oisiveté qu'ils prônent est désastreuse ! Après, ils osent rechigner et se lamenter sur leur sort alors que notre région pullulent de terres fertiles.»

«Cette terre dure mais fertile a procréé des médecins et des cadres»

Oued el Khil était un village désert de toute forme d'établissements scolaires ou administratifs. L'on se demandait comment les enfants allaient à l'école et comment pouvaient-ils poursuivre leurs études secondaires et supérieures vu que les institutions éducatives sont inexistantes.

Et pourtant «khalti» Jamila a fait de ses enfants deux médecins et un cadre au ministère de l'agriculture. En réalité, cette brave quinquagénaire a tenu bon à ce que sa progéniture ait une éducation et un avenir sûr et rayonnant. Pour elle, c'est une revanche contre le destin. Petite, son père, qui vivait en France, l'a privé de ses études quand elle a eu 12 ans. Marquée par cette injustice, elle s'est jurée que le jour où elle aura des filles, elle fera tout pour qu'elles finissent leurs études et qu'elles soient brillantes. Un rêve exaucé. Aujourd'hui, khalti Jamila a une fille médecin, une radiologue et une vétérinaire. «J'ai travaillé dur pour qu'elles aient le droit à une vie digne et indépendante. Souvent, quand les intempéries attaquaient notre village, je traversais les oueds pour les aider à aller à l'école. Le soir, il faisait noir, on n'avait pas d'électricité à l'extérieur. En rentrant de l'école, elles dormaient chez les voisins les plus proches de leur institution. Au lycée, je les ai intégrées dans un internat étant donné qu'il n'y avait pas d'établissement secondaire dans les parages. Je les voyais une fois par quinzaine. Dieu merci ! Elles étaient brillantes ! Par la suite, l'une d'elle est partie à la faculté de médecine de Monastir et l'autre a poursuivi ses études à Sidi Thabet. J'ai vendu tous mes biens, j'ai arraché la halfa, vendu les oliviers et travaillé la terre pour qu'elles ne manquent de rien ! Aujourd'hui, je suis fière de ce qu'elles sont ! Ma mission est accomplie. »

Entre-temps, l'une de ses filles, vétérinaire l'appela sur son portable pour demander de ses nouvelles et lui demander de venir la visiter à Tunis.

Sur ce, khalti Jamila nous offrit du raisin et une mandarine. Tout ce qu'elle possédait dans son couffin et nous serra la main et partit chez elle. Sa journée de travail est déjà finie. Il était midi. Il faut dire que la canicule s'empara des lieux.


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