Triste anniversaire du déclenchement de la révolution, « célébré » dans une morosité affligeante et dans un climat de tension et de grogne populaire, à Sidi Bouzid, où les présidents de la République et de l'Assemblée Nationale Constituante ont été « accueillis » par les jets de pierre et les légendaires « Dégage ». Un état de mécontentement qui traduit le sentiment de désenchantement et de désillusion, non seulement à Sidi Bouzid, fer de lance du soulèvement et berceau de la révolution, mais quasiment dans toutes les régions du pays. « Les Tunisiens sont de moins confiants dans l'avenir », annonce un sondage d'opinion d'Emrhod consulting, leur sens du bonheur et de l'espoir régresse et ils ne sont que 43% à croire en un avenir meilleur contre 75% l'année dernière. En cette deuxième année de la révolution, plusieurs questions s'imposent. Le peuple tunisien est-il trop exigeant, oubliant que toute phase postrévolutionnaire s'accompagne d'instabilité, d'insécurité, de tension sociale et de tiraillements politiques ? Où bien a-t-il perdu confiance en sa classe politique et ses gouvernants au point de sombrer dans l'incertitude et l'angoisse du lendemain ? Il y a un peu de tout cela, mais il y a surtout l'amertume de voir la révolution dévier de ses objectifs et d'être récupérée par ceux qui ont pris le train en marche. Spontanée et sans leader, elle est faite par les démunis et les laissés pour compte, ceux qui espéraient des conditions de vie meilleures, et une vraie justice sociale. Ce sont ceux-là qui déchantent parce qu'ils se sentent bernés par un trop-plein de promesses non tenues et dictées par les règles de la course au pouvoir. Cette course au pouvoir qui continue de plus belle et accapare toute l'énergie de la classe politique avec ses calculs étriqués, ses coups bas et ses discours haineux, reléguant au calendes grecques les problèmes sociaux et économiques du pays et les aspirations légitimes du peuple.