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Les dérapages des médias
Signe des temps
Publié dans Le Temps le 28 - 12 - 2012

Il est vrai qu'on est tous en période d'initiation, seulement, cette donnée ne devrait pas servir de prétexte à quelques uns pour commettre des erreurs et, surtout, de récidiver. La remarque s'adresse, donc, à tout le monde, puisque ce comportement maladroit touche tous les domaines sans exception aucune.
Cependant, il y en a un où ces bavures sont plus fréquentes et très lourdes de conséquences, il s'agit, bien entendu, du domaine gouvernemental, et là, on ne sait pas si on devait parler de maladresse ou bien d'habileté, de manigance ou bien de spontanéité.
Laissons le temps se prononcer là-dessus, il est le seul à pouvoir infirmer ou confirmer.
Les prolixes et les taciturnes
L'autre terrain favorable aux bévues et qui nous concerne, ici, est celui des médias, et il est normal qu'il en soit ainsi, vu que l'action y est très intense. Après des années de musèlement, les langues se délient et on devient prolixe, c'est un phénomène tout à fait naturel. Et il n'y a que les taciturnes qui ne se trompent pas, puisqu'ils parlent peu ou pas du tout, et s'il leur arrive de montrer les dents, c'est pour bailler ou prononcer les refrains habituels vantant les gloires du prince. Les journalistes sont, donc, très assoiffés de la liberté de la presse d'autant plus que c'est le seul domaine qu'on a gagné depuis le 14 Janvier. Il est à préciser qu'on parle des vrais journalistes, ceux qui agissent conformément à la loi et aux règles d'éthique et de déontologie et œuvrent à faire évoluer ce domaine qui était paralysé pendant des décennies, et non pas de ceux qui sont à la solde du pouvoir, les éternels serviteurs du maître de la maison. Pour les premiers, la faute n'est pas préméditée, elle est le corollaire d'un apprentissage qui se fait dans des conditions pas favorables du tout comme on le sait tous. On en cite, à titre d'exemple, la scène du « Salafiste » brandissant son linceul et annonçant le jihad, sur la chaîne « Ettounsia », qui est, toujours, présente dans les esprits. C'était dans le cadre de l'émission «9H Soir » animé par Moez Ben Gharbia. Cette image extrêmement choquante était différemment interprétée, les uns y ont vu une incitation à la violence, voire au meurtre, les autres une liberté d'expression. Qu'en est-il du point de vue de la loi ?
L'affranchissement de la loi
La liberté d'expression est l'objet du décret-loi 115 qui, dans son article premier, aliéna premier, garantit ce droit. Il est précisé qu'il « s'exerce conformément aux dispositions du pacte international sur les droits civils et politiques, des autres traités s'y rapportant et ratifiés par la République tunisienne et aux dispositions du présent décret-loi ». Le droit à la liberté d'expression en Tunisie prend une dimension internationale, en ce sens qu'il n'est plus conçu et délimité par une logique et des mécanismes internes. Il s'affranchit, de ce fait, de ce qu'on appelle les « spécificités », la voie qui mène tout droit, selon les spécialistes du droit, à la dictature. Le deuxième aliéna du même article donne une liste exhaustive de ce droit à la liberté d'expression et les différents usages que l'on peut en faire : il « comprend la libre circulation des idées, des opinions et des informations de toutes natures, leur publication, leur perception et leur échange ».
Le devoir d'informer
Donc, l'invitation du « Salafiste » dans cette émission télévisée s'inscrit dans ce cadre juridique. En d'autres termes, Moez Ben Gharbia a agi conformément à la loi qui lui permet d'inviter qui il veut pour exprimer ses idées et ses opinions dans le but d'informer le public. En effet, la télévision est un espace public où on débat de tout, c'est un média qui doit être accessible à tout le monde sans exclusion aucune, on a tous le droit de respirer cet air de liberté qui souffle sur le pays. Dans son effort d'investigation pour découvrir la vérité, le journaliste reste libre de choisir les personnes, les procédés et les thèmes qu'il veut, puisqu'il est censé agir dans un souci d'intégrité et d'impartialité dans l'exercice de sa fonction journalistique. Entraver cette démarche ne porte pas seulement atteinte au droit de la liberté d'expression, mais prive, également, l'opinion publique de la vérité qui serait, ainsi, occultée ou déformée. L'invitation de toutes les tendances et sensibilités idéologiques et politiques est une nécessité dans cette conjoncture pour renseigner le large public sur leurs différentes positions vis-à-vis des différentes questions du moment qui décideront de l'avenir de notre pays. Au-delà de son devoir d'informer, le journaliste a une fonction pédagogique qu'il est tenue de bien remplir afin de participer à l'éducation des citoyens privés d'une culture politique pendant 23 ans. L'apport des médias pour lutter contre cette désertification culturelle est capital d'autant plus que le pays se prépare à de nouvelles élections qui scelleront les institutions publiques futures et détermineront la configuration de l'Etat tunisien pour les prochaines décennies.
Le déchaînement
En invitant le « Salafiste », Moez Ben Gharbia a agi conformément à la loi, son intention était d'éclairer les Tunisiens sur la vraie nature de ces extrémistes. Les camper devant les téléspectateurs pour en convaincre l'opinion est beaucoup plus convaincant que la plus convaincante des preuves et les faire parler est plus éloquent que le meilleur des discours que l'on pourrait tenir pour persuader les gens du danger qu'ils représentent. Ce jour-là, le nouvel uléma de la mosquée « Ennour » de « Douar Hicher », la forteresse et le dépôt d'armes des « Salafistes », était venu exprimer son indignation à l'égard du meurtre de son prédécesseur qui était à l'origine des attaques violentes du poste de la garde nationale local ayant occasionné la blessure grave d'un officier et des dégâts matériels. Il était aux prises avec le ministre de l'intérieur présent sur le plateau qu'il tenait pour responsable du meurtre de l'uléma et de l'un de ses compagnons « Salafiste », et accusait le parti « Ennahdha » d'immoralité, de s'éloigner des prescriptions de l'Islam et d'être la créature et le pion des Américains. Ben Gharbia n'était pas resté indifférent face à ces dépassements, il a réagi en priant le nouvel uléma de respecter ses invités tout en soulignant, toutefois, son plein droit en tant que « Salafiste » d'exprimer ses points de vue. Mais en dépit de ce rappel à l'ordre, ce dernier a poursuivi ses bravades et en est arrivé à l'acte répréhensible qui était vu comme une incitation à la haine et au meurtre par le ministre des droits de l'homme et le ministre de l'intérieur.
Infraction à la loi
Pour justifier l'invitation de ce « Salafiste » qui a, complètement, déraillé, l'animateur a réitéré son intention d'éclairer l'opinion publique sur ces groupes fondamentalistes et souligné qu'il était dans l'intérêt de celle-ci de tout connaître sur eux pour réaliser le danger qu'ils représentent et savoir, donc, traiter avec eux. Cependant, ces justifications ne tiennent pas au regard de la loi, puisque le 1er aliéna de l'article premier du décret-loi 115 mentionné ci-dessus stipule que le droit à la liberté d'expression s'exerce conformément aux autres dispositions qui sont, en l'occurrence, contenues dans le chapitre V se rapportant aux infractions commises par voie de presse ou par tous autres moyens de publication, section 1 relative à l'incitation aux infractions. L'article 50 de cette section punit comme complices « ceux qui incitent, directement, une ou plusieurs personnes à commettre ce dont il s'agit, de ce qui peut être suivi d'un acte, soit par voie de discours, paroles... ou par tout autre moyen d'information audiovisuelle ou électronique. La tentative est punissable conformément aux dispositions de l'article 59 de code pénal ». Le méfait de l'uléma de la mosquée « Ennour » qualifié de délit tombe sous le coup de cette loi pénale. Il a saisi l'occasion de passer à une heure de grande écoute dans une émission ayant une forte audience pour lancer un appel aux jeunes « Salafistes » à préparer leurs linceuls et de se préparer au jihad. Le message a été bien saisi et ces derniers ont sévi pendant un certain temps où ils ont terrorisé les gens.
Une bombe à retardement
On pourrait ou plutôt on devrait dialoguer avec les « Salafistes », car ils sont, après tout, l'une des composantes de la société et ils sont à différencier, surtout, des miliciens. Cependant, ce dialogue devrait se faire, pour le moment, loin dans d'autres cadres loin des médias, en particulier l'audio-visuel parmi eux en raison de l'effet persuasif de la parole et la forte séduction de l'image. Et quand ils auraient accepté les règles de cohabitation, là, ils pourraient intégrer ces derniers. Le secteur médiatique exerce une grande influence sur les esprits, il façonne l'opinion et détermine le comportement des masses, il risque, donc, de se transformer en une bombe à retardement quand on en fait un mauvais usage. C'est pourquoi il est impératif de prendre toutes les précautions nécessaires avant d'arrêter sa liste d'invités. On tient à préciser que les « Salafistes » ne représentent pas la seule menace pour la société civile, d'autres aussi le sont comme, par exemple, ce jeune rappeur invité, la semaine dernière, sur le plateau de « Labès » de Naoufel Ouertani et qui faisait la promotion de la drogue et du milieu carcéral. Le même animateur a invité, il y a quelques mois, un milicien qui a tenu des propos provocateurs et agressifs à l'encontre de la société civile. Mais que pourrait-on bien apprendre d'une espèce pareille qui est l'incarnation même de l'ineptie humaine? Bien sûr que rien, et s'il y a des gens qui ne savent pas encore ce que c'est qu'une milice, ils n'ont qu'à ouvrir un dictionnaire ou bien participer à une manifestation pacifique antigouvernementale pour les voir à l'œuvre.
Oui, avec la communication, la démocratie nous attend et une société plus équitable se dessine aux horizons, mais cela n'est possible qu'à condition que les participants à ce dialogue soient imbibés des principes démocratiques...

Faouzi KSIBI


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