« Tunis tout court », dont la 8ème édition s'est déroulée les 7 et 8 février au cinéma 7ème art, est une bonne initiative de l'Association Tunisienne pour la promotion de la critique cinématographique (ATPCC) puisqu'elle a permis aux cinéphiles, qui n'étaient pas nombreux, de découvrir les récentes productions cinématographiques en matière de court métrage de fiction, les tendances vers lesquelles s'orientent le cinéma national et surtout une occasion pour ces courts métrages d'être projetés dans une salle de cinéma. Sur les dix films programmés, deux seulement se distinguent du lot : « Baba Noël » de Walid Mattar et les « Souliers de l'Aïd » d'Anis Lassoued. Le reste des films sont imbuvables. Certains se caractérisent même par une sorte de sinistrose. D'ailleurs la majorité d'entre eux sont muets et non dialogués, souvent longs et ennuyeux. Le public a dû par moment décrocher et quitter la salle. Un court métrage de fiction doit être bien dosé et rythmé avec un début accrocheur et une chute subtile. Walid Mattar a réussi cette équation dans « Baba Noël » en dressant le portrait d'un sans-papier, tiraillé entre ses convictions religieuses, sa famille qui le harcèle pour des cadeaux et ses copains de fortune qui se paient sa tête. Pour gagner de l'argent vite et sans trop se fatiguer, la solution est d'accepter de jouer le rôle du Père Noël. Cependant, même derrière la barbe blanche, le costume rouge et l'innocence des enfants qui prennent des photos avec ce personnage mythique, le Baba Noël n'échappe pas au contrôle de la police et au renvoi illico presto au pays d'origine. La potion magique C'est croustillant, sans prétention esthétique mais avec un brin de dérision et de moquerie, le film aborde avec une grande simplicité des thèmes d'actualité comme l'immigration clandestine ou plutôt les conditions des sans-papiers souvent obligés de se cacher, la religion et le chômage. Le film est dans la même veine que « Visa » de Brahim Letaief où l'humour devient la potion magique aux maux de la société contemporaine. « Sabbat El Aïd » (Les Souliers de l'Aïd) d'Anis Lassoued est un film tendre et touchant à l'image de son héros, un petit garçon d'une famille de condition modeste du rif tunisien obligé de concilier entre ses études et le travail qui consiste à vendre de la « malsouka » (pâte servant à réaliser les bricks très prisés au moins de ramadan) que sa mère confectionne à la maison. L'enfant passe sa journée à courir d'une maison à l'autre durant tout le mois Saint pour distribuer les feuilles de briks et réunir la somme d'argent qui lui permettra d'acheter les souliers de l'Aïd. Sa déception est grande lorsqu'il réalise que son père ne peut pas lui offrir la paire de chaussures dont il rêve tant. Mais le gamin ne perd pas espoir et finit par avoir raison en accomplissant son désir. Ce court métrage de 20 minutes est du genre réaliste certes avec toutefois une note de fantaisie qui le distingue et le détourne d'un réalisme social primaire. Anis Lassoued prouve encore une fois sa maitrise du langage cinématographique et notamment la direction des acteurs en l'occurrence les enfants. Il est grand temps pour lui de se mettre au long métrage car tout porte à croire qu'il réussira à nous convaincre.