Une photo de groupe montrant les membres du Bureau exécutif du parti enlacés et tout sourire ou encore un autre cliché où apparaissent l'homme d'affaires Faouzi Elloumi et le constituant Khémaïes K'sila en train de sympathiser amicalement... C'est essentiellement par les photos faisant état de relations cordiales entre les membres de son Bureau exécutif que Nidaâ Tounes (L'appel de la Tunisie) a choisi de répondre aux rumeurs évoquant une implosion imminente de ce parti fondé en juin dernier par l'ex Premier ministre de transition Béji Caïd Essebsi en juin dernier, dans le sillage des récentes déclarations “incommodantes" du millionnaire Faouzi Elloumi sur le plateau de la chaîne de télévision privée Hannibal TV M. Elloumi, qui est membre du Bureau exécutif du parti , avait jeté un pavé dans la mare en déclarant que “les Destouriens ( par référence au parti Socialiste Destourien de Bourguiba) sont eux mêmes les membres du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) de Ben Ali". Il est ainsi allé à contre-courant de la direction de Nidaâ Tounes qui estime que les Destouriens ne se sont pas compromis avec le régime de Ben Ali. Le patron de l'un des plus grands groupes privés tunisiens qui s'exprimait le 9 mars dans le cadre de l'émission “Essaraha Raha" a également estimé que les membres de l'Assemblée nationale constituante (ANC) qui ont rejoint Nidâa Tounes “pour se faire réélire lors des prochain scrutin". Autre révélation qui dérange: M. Elloumi a reconnu que sa sœur Salma Rekik Elloumi a rendu visite à Israël dans le cadre d'une mission d'hommes et de femmes d'affaires, ce qui a été interprété par les adversaires de Nidaâ Tounes comme étant un aveu que ce parti compte parmi ses militants des personnes favorables à la normalisation avec l'Etat hébreu. Enfonçant davantage le clou, M. Elloumi a , par ailleurs, accusé le constituant Khémaïes Ksila de “ semer la zizanie et de chercher à diviser le parti". Communiqué ambigu Suite à ces déclarations, le Bureau exécutif de Nidaâ Tounes a publié, le 11 mars, un communiqué dans lequel il se démarque des avis exprimés par l'homme d'affaires, qui était un ancien député du RCD, estimant que “ces propos ne reflètent nullement la position du parti et son idéologie". Six membres de l'ANC qui ont rallié Nidaâ Tounes après avoir été élus sous les couleurs d'autres partis ont publié, le 14 mars, un communiqué dans lequel ils considèrent que les propos de Faouzi Elloumi sont “irresponsables", notant au passage que leur adhésion à Nidaâ Tounes “se situe dans le cadre de leur souci de contribuer au rassemblement des forces démocratiques contrairement à l'homme d'affaire qui se sert de ce parti pour redorer image". Outre les photos montrant un retour de cohésion au sein du parti, le Bureau exécutif de Nidaâ Tounes a publié un communiqué dans lequel il a mis l'accent sur “la nécessité de poursuivre la mise en place des structures locales, régionales et nationales du parti, de manière à en faire l'espace démocratique naturel et unique pour la diversité, le dialogue et l'unité partisane». . Le communiqué ambigu ne donne aucun détail sur ces “mesures inhérentes à l'organisation interne du parti». Contacté par l'agence Tap, le secrétaire général du parti Taieb Baccouche a préféré s'abstenir de donner des détails de ces mesures, se contentant d'affirmer que «les informations relayées autour d'un différend entre certains dirigeants du parti ont été considérablement amplifiées par les médias», précisant que les dirigeants de Nidaâ Tounes ont décidé de ne pas se prononcer sur ce sujet. Auberge espagnole Le porte-parole du parti Lazher Akremi précisé, quant à lui, que les remous causés par les propos de Faouzi Elloumi constituent des “simples divergences de points de vue tout à fait normales dans un grand parti". La page de la discorde au sein de Nidaâ est-elle pourtant définitivement tournée? Rien n'est moins sûr. D'autant plus que le fait de botter en touche, d'user de la langue de bois et de faire porter le chapeau aux médias qui n'ont fait que relayer des déclarations ne fait que retarder de nouvelles secousses qui pourraient faire imploser le parti. Selon les observateurs, la personnalité charismatique du leader du parti, Béji Caïd Essebsi, ne saurait, à elle seule, enrayer définitivement les contradictions idéologiques internes et le risque de division d'un parti qui n'a pas encore tenu son congrès constitutif. Cela est d'autant plus vrai que Nidâa Tounes ressemble à s'y méprendre à une auberge espagnole. Ce parti regroupe, en effet, une mosaïque de courants allant du centre-gauche aux libéraux en passant par les destouriens de longue date et les membres du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) Certains observateurs pensent que l'affaire Elloumi a fait éclater au grand jour les luttes d'influence entre ces tendances hétéroclites et peu homogènes. Faute d'une mise au point définitive sur l'identité du parti qualifiée tout récemment de «peu claire» par Rached Ghannouchi, le président du mouvement Ennahdha, ces luttes d'influence pourraient se manifester de nouveau à tout moment....