Ils sont partout, sur les ondes des radios nationales, sur les colonnes des journaux et un peu partout éparpillés ici et là dans la nature. Les extrémistes religieux ceux qui croient détenir la vérité prennent en otage la Tunisie et promettent de mettre le pays à sang et à feu. Nos démagogues nationaux qui vivent de clichés et de surenchères politiciennes n'ont pas trouvé mieux que nos médias. Audimat oblige, nos journalistes, les meilleurs, sont à la traque de ces visages qui nous sont peu familiers, pour drainer un public de téléspectateurs, d'auditeurs ou de lecteurs qui ne savent plus à quel ‘'média'' se vouer. Intox ou information, au diable la déontologie du métier ! Pourvu que le support médiatique soit à la tête des médias dans cette course effrénée de la notoriété. Plus grave encore est la question de savoir si nos médias, l'opium du peuple, font de ce fait l'apologie de l'extrémisme. On a posé la question à Néji DJelloul, Professeur d'histoire et d'archéologie islamique à l'université de la Manouba. Pour notre interlocuteur « Faire l'apologie de l'extrémisme, de la violence ou de la haine est interdit par la loi. D'autant plus que la religion le réfute et les hadiths authentiques sont légion qui exhortent les musulmans à ne pas créer la fitna ‘'la discorde''. » Toujours selon notre interlocuteur notre rapport de Tunisiens à la religion était différent des autres musulmans notamment en Orient. « Contrairement à l'Islam oriental, celui de l'Ifriqiya s'est développé dans les Ribats adoptant très tôt un aspect quiétiste et maraboutique, d'où cette grande tolérance envers les autres religions. » Il n'est donc pas admissible de voir autant de haine accompagner le message islamique dans la terre de l'ancienne Ifriqiya. S'agissant de l'Islam dans sa version tunisienne notre historien considère que « Les jurisconsultes (fuqaha) ifriquiyens, souvent d'origine autochtone, à l'instar de Issa Ibn Miskin (XIè siècle) et Ibn Arafa (XVè siècle), ont en outre, très tôt adopté le figh théorique aux traditions locales, d'où l'importance du orf et de Adat ahl Ifriqiya dans l'arsenal juridique tunisien. Le substrat antique est visible dans la législation relative aux traditions matrimoniales (le fameux sadaq kairouanais), aux fêtes et aux rites funéraires. » Et notre interlocuteur d'ajouter « Durant tout le Moyen-âge, les Ifriqiyens célébraient, sous l'œil complaisant des religieux les fêtes antiques de l'Awassu (les Neptulia du Dieu Neptune), la fête du printemps la « Yanayiriya. Depuis le XIIIè siècle, les réfugiés andalous apportèrent au pays une tradition plus tolérante envers les femmes, notamment en matière d'instruction et de code vestimentaire. » Déferlante intégriste dans nos médias Comment alors peut-on contrer cette déferlante intégriste ? Elle est selon Neji Djelloul dans le fait de renouer avec un islam « composite et syncrétiste de nos ancêtres. Un Islam fait de placages successifs et de greffes réussies. » Et dans ce sens, les médias ont un rôle primordial pour faire parler l'Islam de nos ancêtres, un Islam comme on l'aime zeitounien et bien ancré dans nos habitudes de Tunisiens. Mais au lieu d'être au service d'un Islam « made in Tunisia » remarquons que ce sont plutôt les extrémistes religieux qui ont eu leur droit de cité dans nos médias. Il faut dire que les avis sont partagés quand il est question de donner la parole aux extrémistes, au nom de la démocratie ou encore au nom de ‘'la dictature des minorités''. « Il ne faut pas étouffer la voix des Ansar Charia si l'on cite cet exemple, à titre indicatif. Bien au contraire, il faut leur donner la parole pour que le Tunisien comprenne leur état d'esprit et appréhende leurs manières de penser. », commente Neji Djelloul qui croit que la violence n'est pas uniquement véhiculée par les médias « La violence est partout. Elle est même visible dans les cercles politiques les plus élitistes : à l'Assemblée nationale constituante, dans les meetings politiques, etc. Mais il faut que la loi sanctionne ceux qui appellent au meurtre et à la violence, où qu'ils soient. » dit-il. Il faut dire, par ailleurs, que tous les Tunisiens n'entendent pas cette question de la même oreille et que l'actualité ne sonne pas de la même manière dans l'oreille des uns et des autres. Hachemi Hamedi vient tout juste de lancer un nouveau parti politique. Maintenant c'est ‘'Tayar Mahabba'', (le mouvement de l'Amour) qui remplacera l'ancien Aridha Chaabia. Le parti promet quiétude et Amour du prochain. Et ça promet ! Alors enfants de la patrie, désormais les temps ne sont plus à la violence : on vivra d'Amour et d'eau fraîche ! Pas mal, hein ?