Hier, devant la cour d'appel de Sousse s'est ouvert le procès d'Amina Femen , Alias Amina Tyler, seulement en ce qui concerne le chef d'inculpation de port d'une bombe à gaz et pour lequel elle a été condamnée en première instance à 300 dinars d'amende. Elle est censée donc comparaître en liberté, n'était-ce son maintien en détention pour les autres accusations dont elle fait l'objet, à savoir, la profanation de cimetière, l'atteinte à la pudeur et l'appartenance à une bande de malfaiteurs. Accusations pour lesquelles elle risque de lourdes condamnations pouvant aller jusqu'à 6 ans de prison. Sachant en outre que la cour d'appel pourrait commuer la peine d'amende prononcée en première instance par une peine de prison. Toutefois et selon un vieux principe de droit qui a presque fait jurisprudence, la procédure d'appel ne peut porter préjudice à l'appelant. Ce principe a été toujours appliqué par nos tribunaux, quand bien même l'appel s'avérait quelques fois dilatoire. Ce qui n'est pas le cas en jurisprudence française, suivant laquelle, l'appelant peut voir aggravée sa peine dans le cas d'une procédure dilatoire. Toutefois le principe du double degré de juridiction a toujours été dans l'intérêt de l'accusé et au-delà, dans celui de la Justice. On ne saurait rappeler assez la lettre qu'avait adressée le Calife Omar Ibn Al Khattab à Abou Moussa Al Achâari, et dans laquelle il l'incitait à revoir ses décisions, dans l'intérêt d'une meilleure Justice, par cette boutade devenue un proverbe arabe connu, mais hélas pas toujours appliqué : « Revenir sur un droit vaut mieux que de persister dans l'erreur » Y a-t-il eu détournement des faits ? Dans le cas d'espèce Amina s'est d'abord manifestée sur le réseau social, en s'exhibant seins nus sur sa page Facebook, en proclamant son adhésion au groupe Femen, avec un sobriquet : Amine Tyler. Elle s'était déjà attirée la colère et l'opprobre surtout des extrémistes religieux. Elle était convaincue de la nécessité de se manifester par ce moyen pour appuyer la cause féminine et la liberté de la femme en Tunisie. Cependant, le jour où elle concrétisa cette volonté d'exprimer son opinion, en passant du virtuel qu'est le réseau social au monde réel, en gribouillant le mot Femen, sur le mur d'un cimetière, elle s'affronta à tous ceux qui l'attendaient au tournant pour ne pas lui pardonner le moindre écart ni la moindre incartade. Couverte d'opprobre, son geste ayant été pris pour une profanation de lieux sacrés, elle a été arrêtée et inculpée de délits divers. Cependant, et selon les avocats de la défense ainsi que les composantes de la société civile dont les associations de défense des droits de l'Homme, l'acte d'Amina est un simple fait divers qui a été présenté comme une affaire d'Etat, et ce par l'ampleur qu'a pris cette affaire, dont on a fait le lien avec celle des trois Femen, pour inculper Amina entre autres d'appartenance à une bande de malfaiteurs. Des inculpations qui ne sont pas juridiquement fondées, selon Me Radhia Nasraoui, outre le fait, précise-t-elle que les faits ont été détournés, eu égard aux faux témoignages, selon lesquels Amina s'était déshabillée en public. Ce qui est contraire à la vérité, d'autant plus que les témoins en question se sont rétractés, tel que l'affirme l'une des avocats de la défense. Le comité de défense d'Amina : Nous demandons un procès équitable L'ampleur qu'a prise cette affaire est en rapport avec les accusations pour lesquelles Amina risque de sévères condamnations. C'est la raison pour laquelle un comité de défense et de soutien en faveur de l'accusé a été créé afin d'éviter que l'affaire prenne une tournure politique. corrélativement à cette idée, une autre avocate appartenant au même comité a pour sa part déploré le fait que l'accusée soit inculpée trois fois dans les mêmes faits, ce qui constitue une violation de l'article 82 du code de procédure civile. Cependant, d'autres juristes ou hommes de justice parlent d'un fait divers quelconque, qui n'aurait pas dû prendre une telle ampleur. Il est hasardeux toutefois de se hâter de qualifier le procès Amina de politique. Celui-ci suppose, selon l'historien français Yves-Marie Bercé qu'il y ait « un Etat persécuteur, des magistrats partisans outre des culpabilités incertaines » Ce qui ne doit plus avoir droit de cité chez nous après la Révolution. L'indépendance de la magistrature est certes encore sur la sellette, mais il y a lieu plutôt d'espérer, et de faire confiance à nos magistrats qui pour la plupart se sont déployés pour préserver l'image de la Justice, la vraie celle qui n'est entachée d'aucun préjugé ni d'aucun ascendant. La suprématie du Hak qui signifie en arabe la vérité et le droit, est rappelée constamment par notre jurisprudence suivant le vieux dicton ; Al hak est au dessus de tout, et rien n'est au-dessus du hak !