- Manifestation spontanée devant le ministère de l'Intérieur et dans le reste de la République et surtout à Sidi Bouzid - Le défunt foudroyé de onze balles - Le mode opératoire de l'assassinant est quasiment identique à celui du meurtre de Chokri Belaïd - Rached Ghannouchi conspué et tenu pour responsable des assassinats Mohamed Brahmi, membre de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et coordinateur général du parti « Le courant populaire » (Attayar Echaâbi), a été tué par balles, hier, alors qu'il quittait son domicile situé à la Cité El Ghazalah, dans le gouvernorat de l'Ariana. Son assassinat est survenu le jour anniversaire de la proclamation de la République. Rapportée par les médias quelques minutes seulement après l'assassinant, l'information a été par la suite confirmée par le ministère de l'Intérieur. D'après des témoins oculaires, M. Brahmi a été tué devant chez lui vers le coup de midi alors qu'il était tout près de sa voiture. Selon des membres de son parti, le défunt avait reçu onze balles, tirées à bout portant. «Son corps a été criblé de balles devant son épouse et ses enfants», a affirmé, en pleurs, Mohsen Nabti, membre du bureau politique du parti créé par Mohamed Brahmi. Selon l'une de ses filles, Mohamed a été tué par deux hommes en moto qui portaient des casquettes. Certains témoins oculaires avancent, cependant, que cette figure de la gauche a été assassinée par un piéton. Des centaines de personnes se sont spontanément rassemblées devant le ministère de l'Intérieur, à l'avenue Habib-Bourguiba, après l'annonce du décès de Mohamed Brahmi. Parmi eux, la veuve de Chokri Belaïd, autre opposant de gauche tué par balles le 6 février dernier. Cette manifestation a été dispersée au gaz lacrymogène par les policiers qui ont bloqué l'accès au ministère de l'Intérieur. Jour de deuil à l'ANC Quelque 300 personnes se sont également réunies à l'hôpital Abderrahmane Mami à l'Ariana, où a été transportée la dépouille de Mohamed Brahmi. De nombreuses personnalités politiques, comme Hamma Hammami (porte-parole du Front Populaire), Mohamed Jmour, du parti (Al-Watad,) Mehdhi Ben Gharbia (Alliance démocratique), étaient sur les lieux. Les manifestants ont notamment pointé la « responsabilité politique » du gouvernement dans l'assassinant et lancé des appels pour un rassemblement devant l'ANC . A Sidi Bouzid, ville d'origine, du défunt, des protestations ont également éclaté. Dans l'hémicycle du Bardo, une ambiance électrique a prévalu après la diffusion de la nouvelle de l'assassinat de Mohamed Brahmi. Plusieurs élus sont entrés dans un état d'hystérie lançant des accusations à l'emporte pièce tantôt contre la Troïka au pouvoir qui serait, selon eux, «responsable» de ce crime. Le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaafar, a décrété le vendredi 26 juillet 2013, jour de deuil au sein de l'Assemblée. Agé de 58 ans, Mohamed Brahmi était père de cinq enfants. Militant de gauche depuis ses études, Mohamed Brahmi avait été arrêté deux fois en 1981 et 1986. Sous la dictature de Ben Ali, il a milité dans le mouvement des étudiants arabes progressistes et unionistes. En 2005, il a crée, dans la clandestinité, le mouvement unioniste nassériste. C'est après la chute du président Ben Ali qu'il a crée Le Mouvement du peuple, dont il a été écarté le 7 juillet en raison de son adhésion au Front populaire. Le député avait récemment créé «Le Courant populaire » (Attayar Echaab), dont il était le coordinateur général. Ressemblances frappantes L'assassinat de Mohamed Brahmi est le deuxième du genre en Tunisie en l'espace de six mois après celui de Chokri Belaïd qui avait également été tué par balles devant son domicile. Le mode opératoire de ces deux assassinats politiques est quasi identique : des tueurs en moto ciblent la victime devant son domicile avant de prendre la poudre d'escampette. Mercredi, le ministre conseiller du chef du gouvernement, Noureddine B'hiri, avait déclaré que les commanditaires et les auteurs de l'assassinat de Chokri Belaïd ont été identifiés. Fin février, Ali Larayedh, alors ministre de l'Intérieur et actuellement Premier ministre, avait pointé du doigt un « groupuscule islamiste radical impliqué dans la mort de Chokri Belaïd ». Mi-avril, les autorités tunisiennes avaient publié les photos de cinq suspects. Un communiqué du ministère de l'Intérieur avait donné leur identité : Kamel El Gathgathi, 39 ans, Ahmed Rouissi, 46 ans, Salmane Marakchi, 30 ans, Marouane Ben Haj Salah, 33 ans et Ezzedine Abdelaoui, 38 ans. Mercredi, le ministre conseiller du chef du gouvernement n'a pas précisé si ces personnes étaient celles qui ont été identifiées comme coupables par les autorités tunisiennes. Il a ajouté que les détails seraient révélés bientôt par le ministre de l'Intérieur, Lotfi Ben Jeddou.