Dans une ambiance festive mêlée de ferveur religieuse, la ville de la Goulette a vécu, les 5, 6 et 7 septembre au rythme de la procession ou « kharja » de Sidi Ahmed Chérif, le saint de la ville, qui constitue un des moments forts du cycle des processions religieuses estivales organisées chaque année, par les confréries religieuses du Grand Tunis, tout au long de l'été, en l'honneur des saints de la région et qui doit prendre fin, ce samedi 8 septembre, par la procession de Sidi Bou Saïd, dans la ville voisine du même nom.
Ce cycle de processions démarre, chaque année, début juin, dans la ville de Mornaguia, à l'ouest de Tunis, par la procession du saint de cette ville, Sidi Ali Hattab, puis, durant 14 semaines, les confréries religieuses se relaient, tous les jeudis, dans le mausolée du grand saint de l'Islam, Sidi Abou El Hassen Chédli, à la sortie sud de la Capitale , pour y animer des soirées de chants liturgiques, ouvertes au grand public, suivies à minuit par des services religieux plus poussés, dans la grotte du mausolée, avec la participation de fidèles plus initiés. La procession de Sidi Chérif vient couronner la fin de ces services alors que la procession de Sidi Bou Said qui la suit immédiatement marque l'achèvement du cycle.
Harmonie communautaire Mais, par un heureux concours de circonstances, comme nous l'a dit un des descendants de Sidi Chérif, Mr Abdessattar Chérif dont la famille habite, encore, la maison du saint, à l'entrée de la Goulette , en venant de Tunis, au-delà de sa dimension religieuse, la procession de Sidi Ahmed Chérif à la Goulette marquait , autrefois, la fin de la saison estivale pour les vacanciers qui venaient passer leurs congés d'été, dans cette station balnéaire. La Goulette abritait alors trois communautés religieuses, la communauté musulmane, la communauté chrétienne et la communauté juive qui vivaient dans une harmonie parfaite, faisant de la Goulette , un modèle du genre, notait notre interlocuteur. Or, ajoutait-il, pour la communauté chrétienne, la fin de la saison estivale coincidait, plutôt, avec la procession qu'elle organisait, annuellement, en l'honneur de la Madonna , le 15 août, tandis que pour les musulmans, elle coincidait avec la célébration de la procession de Sidi Chérif, début septembre et les deux évènements donnaient lieu à des réjouissances communes, dans une atmosphère des plus conviviales. Cependant, la date du début septembre cadre mieux avec la situation climatique tunisienne, car le début de septembre marque la fin de la période des grandes chaleurs d'Aoussou qui s'étale du 25 juillet au 3 septembre et qui est connue, sous le nom français de canicule d'été, car elle coincide avec l'apparition dans le ciel de l'étoile Sirus appelée aussi Canicule et auquel les anciens Egyptiens donnaient le nom de Sothis qui évoque dans leur langue l'idée de chaleur.
Soutien local Aussi, les structures locales de la ville de la Goulette oeuvrent à perpétuer cette manifestation traditionnelle, dans le cadre du renforcement de l'animation de la ville en été, car elle est l'une des principales stations balnéaires de la banlieue nord de Tunis. Cette année, la municipalité a accordé un montant de 1700 dinars, contre 1000 dinars l'année dernière, pour aider à la célébration de cette procession qui comporte, entre autres, comme dans tous les rassemblements religieux similaires, l'immolation rituelle d'un taureau. Le premier jour, en effet, entourées d'une grande foule de citoyens de tous les âges et des deux sexes, les confréries religieuses ont parcouru les rues de la ville, poussant devant eux le taureau encore vivant, et interprétant des chants liturgiques à la gloire de Dieu, de son prophète et de ses saints. A signaler que Sidi Ahmed Chérif est un homme pieux venu d'Orient, en 1574 avec l'armée turque conduite par Sinan Pacha pour combattre les Espagnols qui occupaient alors Tunis et qui avaient une forte garnison à la Goulette , d'où les liens de Sidi Chérif avec cette ville.