Le Quartet veut la démission du gouvernement et tout de suite. Mais le cabinet de Laârayedh ne l'entend pas de cette oreille et les dignitaires d'Ennahdha non plus. Rached Ghannouchi est lui-même tiraillé entre ses engagements « diplomatiques » vis-à-vis du Quartet et les contraintes venant de son parti et qu'il est obligé d'assumer pour éviter un « délit de parjure » et, pour tout dire, la déflagration. Chaque jour apporte son lot de démentis feutrés et de revirements auxquels nous sommes désormais habitués. Le Quartet exige, comme préalable au déclenchement du dialogue national, la démission du gouvernement Laârayedh. Rached Ghannouchi acquiesce mais est vite rattrapé par ses compagnons d'armes et surtout par les forces montantes –irréductibles – du parti. Un parti qui enregistre une certaine vague de sédition mais qui fait front commun, défendant sa « légitimité » électorale et, par voie de conséquence, la permanence du gouvernement Laârayedh aux commandes du pays. Cette semaine qu'on annonçait, tambour battant, comme celle de la délivrance commence plutôt dans le calme et on espère que ce ne sera pas le classique calme plat annonciateur de la tempête. A la rue Mohamed Ali, Houcine Abbassi n'exclut pas un revirement de la part du partenaire nahdhaoui. « Nous sommes parés à pour les éventualités » déclarait-il hier. Il faisait allusion au flot de déclarations « nahdhaouies » enregistrées tout le long du week-end dont l'une faite par le leader du Mouvement islamiste à un journal algérien et dans laquelle il parle au nom des siens refusant la démission immédiate du gouvernement Laârayedh. Il est clair qu'Ennahdha joue les prolongations. De son côté, le Quartet met en avant un préalable : la démission du gouvernement, mais un préalable d'une teneur juste organique parce qu'au point où en sont les choses – crise institutionnelle, effritement sécuritaire et explosion économique – on ne saurait trop comprendre ce qu'apporteraient de plus trois semaines de moins de gouvernement Laârayedh. C'est le leitmotiv de la Troïka au pouvoir ou ce qui en reste. Celle-ci ne cèdera le gouvernement qui si elle avalise le prochain, celui proposé par le Quartet. Et elle joue sur une fibre sensible : le Quartet n'a pas encore de noms à proposer. L'opposition elle-même n'en voit pas le profil. Quant aux noms avancés pour former un gouvernement de technocrates, eh bien ce serait tout simplement les dénaphtaliser parce que, par un cruel retour des choses, la Tunisie ne compte plus de véritables hommes d'Etat.