Intervenu dernièrement à l'antenne d'une radio de la place, Houcine El Jaziri, secrétaire d'Etat à l'immigration et membre du parti Ennahdha a déclaré que le Cheikh Rached Ghannouchi, chef dudit parti est le Nelson Mandela de la Tunisie. Acceptons en l'augure. Cependant cette réflexion a suscité diverses réactions, de la part des composantes de la société civile, et notamment ceux qui ont été marqué par la personnalité de Nelson Mandela, que hommes de sa trempe ne courent pas les rues, expression chère à Bourguiba, et qu'il utilisa en parlant de sa personne. Cependant la question préalable consiste à se demander pourquoi ne s'est-on toujours pas libéré du culte de la personne ? Le problème n'est pas propre à notre pays. En chine, comme aux Etats-Unis, En Russie comme en France, on a longtemps glorifié, voire mystifié certains parmi ceux qui ont pris le pouvoir, qu'il s'agisse de dictateurs ou de démocrates, issus de la gauche comme de la droite. D'ailleurs cette distinction ne veut plus rien dire de nos jours, l'expérience ayant donné que ceux qui se proclament d'une orientation déterminée finissent par perdre le nord, une fois au pouvoir. En tout état de cause, tous ceux qui ont été mystifiés ont fini par décevoir. C'est la politique, me diriez-vous. Je vous l'accorde, mais en spécifiant qu'il est indispensable d'en tirer la leçon, comme il se doit, surtout après la Révolution du Jasmin, qui n'est pas l'œuvre de personnalités déterminées, mais de tout le peuple, toutes tendances et toutes franges sociales confondues. Il est donc inutile de revenir au culte de la personnalité par lequel, le peuple a été longtemps trompé et berné. Certes il y a des noms à retenir parmi les militants qui ont payé de leur sang et de leur vie, aussi bien durant la période coloniale qu'à la Révolution, laquelle est de plus en plus violée par ceux qui ne s'intéressent qu'à leurs intérêts propre. Le culte de la personne a toujours tourné à l'hypocrisie et nui eu peule et à ses droits. Le culte de la personne a permis à Bourguiba, qui est sans conteste un homme politique de grande envergure, et une grande personnalité digne de tout éloge, d'exercer une dictature, qui a été le prétexte à tous les abus et les atteintes aux droits de l'Homme, durant plus d'un quart de siècle. Il est pourtant au fond de lui-même un humaniste, qui vouait un amour au pays et au peuple. C'était plus l'entourage de Bourguiba et les membres de l'Etat qui avaient nourri ce culte afin de se permettre toutes sortes de corruption et d'abus. Ennahdha, hier, aujourd'hui et demain A cette époque, Rached Gahnouchi avait été témoin , avant la création du mouvement islamiste, de la période où les partis d'opposition étaient interdits. La démocratie dans le parti unique a été, pendant longtemps le slogan qui revenait comme un leitmotiv dans les discours de Bourguiba et de ses ministres. Les membres du parti Ennahdha avaient plusieurs discours, mais il n'y avait pas d'incitation à la violence, ni à la haine au nom de la religion. Les actes qui ont été commis dans les années 1980 par certains sympathisants du parti avaient prêté à réfléchir sur la tendance de ce parti et de ses membres, parmi lesquelles certains, craignant la recrudescence de la violence, ont préféré se retirer, et ce notamment avec l'avènement de Ben Ali. Ghannouchi, a été arrêté avec d'autres compagnons, pour être jugé et condamné à une peine d'emprisonnement. Ben Ali dans une première phase, les avait graciés, en vue d'une réconciliation nationale. Mais ils avaient fini pour la plupart de s'expatrier, au moment où Ben Ali a commencé à durcir le ton, et serrer la vis. Ghanouchi s'était expatrié à Londres, pour s'y installer en tant qu réfugié politique. Nelson Mandela exemple de patriotisme et d'abnégation; Nelson Mandela à l'époque se morfondait en prison, où il y resta durant une vingtaine d'années. Devant la haute cour de l'Afrique du sud, il déclara pour sa défense, en 1963: «Toute ma vie je me suis consacré à la lutte pour le peuple africain. J'ai combattu contre la domination blanche et j'ai combattu contre la domination noire. J'ai chéri l'idéal d'une société libre et démocratique dans laquelle toutes les personnes vivraient ensemble en harmonie et avec les mêmes opportunités. » Grâce à sa détermination et son endurance, Madiba (nom de clan durant le lutte) a mis fin à l'apartheid en Afrique du sud. Libéré en 1990, par de Klerk. Elu président de la République, en 1994, il laisse la main à son successeur Tabo Mbeki en 1997. Le pouvoir ne l'intéresse pas autant que l'intérêt du peuple. C'est ce qu'il avait d'ailleurs affirmé dès son investiture. Double je, double jeu A entendre Rached Ghannouchi, on a tendance à croire qu'il est contre la position des membres du parti Ennahdha, dont Houcine Jaziri, qui ne cesse de ruminer la légitimité au nom de laquelle il s'oppose à la démission du gouvernement. Mais il n'y a rien de concret augurant d'une volonté de changement de la part du chef du parti Ennahdha. On flaire le double langage, qui est un double jeu de nature à faire retarder l'échéance au maximum. Même aujourd'hui, on est encore dans l'expectative, alors que Ghannouchi a déclaré accepter la feuille de route à laquelle il semble avoir adhéré sans condition. Houcine Jaziri parle d'un moment historique jamais vu dans l'histoire de la Tunisie, toutes les tendances ayant été réunies autour d'une même table pour décider du sort du pays. C'est ce qui lui permet d'affirmer que Ghannouchi est le Mandela de la Tunisie. On veut le croire, mais pourquoi tient-il tant à son poste de ministre, et s'oppose-t-il à la désignation d'un nouveau gouvernement sans appartenance politique ? « Le pouvoir est appétissant, c'est comme une nuit de noces…on a envie toujours de la renouveler ». C'est la propre conception du pouvoir selon Houcine Jaziri. Est-ce la raison pour laquelle, il tient, tout comme ses camarades au pouvoir, afin de savourer sans cesse les plaisirs d'être au poste de commande ? Cet idéal de Mandela de voir toutes les personnes vivre en harmonie avec les mêmes opportunités, dans une société libre et démocratique existe-t-il chez Ghannouchi, Jaziri et tous les membres du parti Ennahadha ?