«La production de l'ignorance à l'ère de la science », tel a été le thème de la conférence donnée hier, par le Professeur Abdelmajid Charfi, à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis à l'occasion du démarrage de l'année universitaire. Quel rôle est en train de jouer l'Ecole aujourd'hui ? Est-elle en train d'inculquer à nos jeunes les connaissances sur des bases solides pour développer chez eux l'esprit critique ou est-elle en train de produire le dogmatisme ? C'est à ces questions que le spécialiste de la pensée islamique a essayé de répondre en s'étayant sur des analyses et des exemples concrets. Malheureusement, l'Ecole tunisienne a changé au fil des années. Elle ne produit plus une élite intellectuelle éclairée capable d'analyser les faits et de critiquer la réalité tout en présentant des alternatives, et ce à cause des programmes enseignés. En fait « l'Ecole ne forme plus l'élève, elle ne lui donne pas la possibilité d'acquérir le savoir. Elle donne plutôt des idées qui produisent le dogmatisme », explique le Professeur Charfi, tout en définissant l'ignorance. Le spécialiste précise à cet égard que « l'ignorance n'est autre qu'être incapable de penser de manière libre et de critiquer les informations acquises ». Il ajoute à cet effet que si l'esprit critique ne se présente pas chez nos jeunes, il sera par la suite difficile d'acquérir cette qualité et ce pour cette raison d'ailleurs, qu'une bonne partie des jeunes tunisiens sont soumis à des idées imposées par une autorité quelconque, celle du père, du Mufti, ou du prédicateur… “Cela produit par conséquent « des jeunes sans identité indépendante », explique le spécialiste tout en critiquant le niveau des jeunes diplômés de l'université. Ces derniers n'ont pas un niveau de connaissance digne de l'université. Ils sont restés au niveau des connaissances qu'ils ont acquises à l'école et au lycée. Preuve à l'appui. Des études ont été faites pour démontrer que les Tunisiens ne lisent plus en dehors des enceintes de l'école et que leurs lectures se limitent aux pages du sport dans les journaux. Et les programmes ? Pour aller plus loin dans son analyse et critique, le Professeur Charfi met l'accent sur la pensée islamique. Les programmes enseignés à l'école consacrent l'ignorance au lieu de l'éradiquer. Ce que dispense l'école est partiel, elle prolonge les pensées arriérées, des ères dévolues. Dans ce cadre, le professeur cite des exemples tels que le port du foulard, la barbe, l'héritage…Il considère que l'école n'aide pas les jeunes à comprendre objectivement ces questions ou ces phénomènes. On traite malheureusement ces questions qui font l'objet d'un débat sur la base du «licite» et « d'illicite », toujours d'après le spécialiste qui considère que nos jeunes vivent une forme de schizophrénie, d'où l'importance de revoir le rôle de l'école. Elle est appelée plus que jamais à faire passer l'information aux jeunes avec sincérité. Elle doit dévoiler la vérité pour ne pas tomber dans le dogmatisme. Il faut par ailleurs qu'elle s'inscrive dans une démarche d'enseignement développée basée sur l'écriture, l'impression et les technologies pour faire débarrasser les jeunes de l'ignorance, de ses répercussions », conclut le Professeur Charfi.