En Tunisie, une très ancienne civilisation de la laine semble avoir succédé à celle du cuir, plutôt saharienne, dont parle Hérodote. Au Moyen-âge, une aire de la soie a existé dans le Sud-Est tunisien introduite d'abord à l'époque aghlabide. Elle a été réactivée ensuite par les Andalous. La soie était produite et travaillée à Gabès ainsi qu'au Jérid. Elle semble avoir été plutôt « citadine » alors que la laine était « bédouine ». Les principaux vêtements traditionnels se répartissent en deux catégories : premièrement, le costume « drapé » sur le corps, utilisé surtout dans l'Ouest et le Sud où les « vieilles » populations sédentaires ont été « assimilées » par les nomades, deuxièmement, le costume « coupé-cousu » qui peut être « coupé-cousu » droit ou « coupé-cousu » façonné près des lignes du corps. Ce type de costume se rencontre tout le long du littoral de Bizerte à Kerkennah. Dans le Sahel, les deux types cohabitent sans doute parce que les sédentaires ont fini par « absorber » les populations « bédouines ».
LE HOULI SWAKI Il faut se dépêcher de visiter le village berbère de Tamezret, proche de Matmata. Il n'est pratiquement plus habité et risque de tomber en ruine prochainement : quel dommage ! Naguère, les femmes portaient une tenue de mariée appelée « Houli Swaki » à cause de sa couleur qui provient de l'écorce de noyer : le « swak ». Ce grand drapé de laine brun rouge mesure 5,25 mètres sur 1,40 mètre. Il porte un décor géométrique de coton noir et blanc, devenu violine après la teinture, sur tout son pourtour. Deux des motifs décoratifs sont beaucoup plus importants. Ils sont appelés « sadra » : poitrine car ils marquent l'axe du corps. Un troisième grand motif décore le côté du pan ramené sur la tête et retombant sur l'épaule droite.
LA « MELHAFA » La « Melhafa » est un grand rectangle de cotonnade noire de plus de trois mètres sur plus d'un mètre de large dans lequel s'enveloppent les « bourgeoises » de Kébili. Un galon vert vif est cousu au milieu de la pièce dans le sens de la longueur. De chaque côté du galon des points de soie rose, verte, jaune vif, rouge, mauve, bleu dessinent des motifs décoratifs. On reconnaît la lune, le croissant, les « mouches », le « peigne », etc. Aux deux extrémités du « voile », une broderie semblable est réalisée dans le sens de la largeur.
COSTUME DE NOCE La mariée de Médenine s'habille presque comme celle de Gabès. Son drapé-robe : Houli est en soie rouge. Sur ses cheveux était noué un foulard couvert d'un châle de soie rouge appelé « Ajar ». Le haut du châle est brodé par les femmes de Gabès de motifs de soie de couleur vive et garni d'une ligne de pompons de soie. Ses petits côtés sont « finis » par une longue frange. Un petit couvre-épaule en laine « Hetfiya » est retenu au Houli par une fibule. La Hetfiya, teinte en vert, porte des tâches rouges cernées de jaune obtenues par la teinture à la réserve. Elle est ornée de motifs géométriques.
COSTUME DE LA NUIT DE NOCE Ce costume de la nuit de noce des femmes de Hadège, bourg proche de Matmata, a des allures « bibliques » dans sa simplicité. La mariée, ce soir-là, ne se pare d'aucun bijou alors que les autres soirs elle en était couverte. Sur sa chemise blanche, elle a drapé un grand rectangle de cotonnade blanche : « Melhafa bidha » dont l'extrémité libre lui passe sur la tête. Le « houli trabelsi », de couleur symbolique rouge, est drapé par-dessus la « melhafa ». Il est en soie. Des bandes noires et blanches ornent ses deux extrémités dont une est ramenée sur la tête de la mariée.
TENUE DE SORTIE DE LA MARIEE Les femmes des villages de Midoun et de Mahboubine de Jerba, revêtent pour aller à un mariage ou une fête, un grand voile appelé « melhafa » ou « fouta domyati ». Ce vêtement est composé de deux bandes de coton de plus de 3,50 mètres sur 0,70 de large. Elles sont assemblées par une couture brodée de soie rouge et jaune dont les couleurs sont assorties aux rayures de coton qui ornent les bandes terminées, sur leur largeur, par une frange de soie. La « fouta » n'est retenue que par une seule fibule : « gosmar », au niveau du sein gauche. La mariée se drape dans la « melhafa domyati » pour se rendre à la maison de son mari.
CONCLUSION Il est absolument regrettable que tous les « savoir-faire » de ces tisseuses, de ces brodeuses, de ces tisserands, qui font partie du Patrimoine, se perdent définitivement. Dans un premier temps et dans le cadre d'un tourisme culturel, dont on parle tant, des touristes pourraient être conduits chez ces artisanes où ils seraient sans doute séduits par la beauté et l'originalité de leurs productions. Dans un deuxième temps, les broderies et les teintures pourraient orner des tissages de formes différentes que des stylistes tunisiens sont tout à fait capables de dessiner.