Le premier Centre culturel privé de montagne de Tunisie et du monde arabe ouvrira ses portes samedi 21 juin dans la campagne Faydh El Mathnen, au pied du Djebel Semmama à Sbeïtla. Au programme de cet espace pilote, des activités ludiques pour les jeunes de la région, axées sur la culture, l'art et l'environnement telles que la création d'un mini-conservatoire pour les élèves de l'école ou encore d'un théâtre de poche, en plus de projections cinématographiques, d'ateliers artistiques et d'un club d'archéologie. Des artistes, convaincus de l'importance de tels projets culturels de proximité, assisteront à l'inauguration du Centre à l'instar de Sadika Keskes, Zeyneb Farhat, Ahmed Snoussi et Ali Bennour. Une inauguration placée sous le signe de l'espoir et inspirée de la célèbre citation du poète palestinien Mahmoud Darwich :" Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie".Pensé depuis plus de deux ans et créé par l'association culturelle Les Collines, en partenariat avec l'Association du Tourisme de Montagne, le Centre culturel de montagne de Semmama est une initiative citoyenne indépendante. Les initiateurs du projet sont des jeunes originaires de la région, partis faire des études à Tunis ou ailleurs mais qui sont restés profondément fidèles à leurs racines. Ils ont étudié la littérature, l'art, la musicologie, la préservation du patrimoine et ont voulu en faire profiter les jeunes du Djebel et des plaines avoisinantes. Tout a commencé par l'organisation d'événements culturels, sociaux ou environnementaux très réussis tels que la Journée de la Montagne, la Fête des Bergers et le Festival du romarin. Face à l'intérêt suscité par ces différentes manifestations, l'équipe s'est mobilisée et s'est décidée à créer le Centre culturel de montagne. N'ayant obtenu aucune subvention de la part du Ministère de la Culture, malgré de nombreuses sollicitations et correspondances, ce projet culturel innovant a quand même réussi à avoir l'appui d'El Teatro ainsi que celui de l'espace Sadika et de Minerva Théâtre. Des artistes ont également apporté tout leur soutien à ce projet culturel innovant dont l'écrivain Mohamed Rached Hamzaoui, l'acteur Ali Bennour , le philosophe Slim Dawla, les cinéastes Mohamed Zran et Marwen Medded, le musicien Sofiène Safta. Des ateliers permanents d'arts plastiques, de théâtre, de musique, de chansons françaises (Les Troubadours) et de danse moderne et hip hop seront organisés au Centre culturel de la montagne, en plus d'activités périodiques visant entre autres à promouvoir le site archéologique exceptionnel de Sbeïtla ou encore à encourager le tourisme solidaire et de proximité. Un énorme vide à combler A l'origine de ce projet, une passion, une ambition et un engagement citoyen. Une passion dévorante pour l'art et la culture mais aussi et surtout une fierté d'appartenir à cette terre millénaire. Les initiateurs du Centre culturel de montagne ont voulu participer activement et intelligemment à l'essor de leur région, souvent oubliée et marginalisée. L'espace Dar Gaddour a été gracieusement mis à la disposition du Centre culturel de la montagne par l'universitaire Abdelkader Missaoui originaire du Djebel Semmama, convaincu que la culture peut être un puissant rempart contre l'obscurantisme qui ronge actuellement la région. En proie depuis quelque temps au fanatisme et menant une guerre impitoyable contre le terrorisme, Kasserine peine à évoluer et à s'inscrire dans une perspective de développement régional durable. Dans ce gouvernorat, près de 60% des habitants vivent en milieu rural ou en montagne. Ils sont très souvent isolés et dispersés dans des zones peu habitées et très éloignées. Les adultes ont, pour la plupart, déserté ces régions car les opportunités d'emploi y sont quasi-inexistantes. Seuls les enfants et les personnes âgées y vivent encore. Le tissu social se disloque et les campagnes se vident progressivement. L'âme de ces régions se meurt lentement, engloutissant à jamais la mémoire des habitants, leur savoir-faire ancestral et leur artisanat traditionnel. Les jeunes qui y vivent, sont livrés à eux-mêmes, plongés dans l'oisiveté la plus totale. Eloignés de tout et de tous, le désespoir et le découragement sont leurs lots quotidiens. C'est pourquoi ils deviennent des proies faciles pour les réseaux terroristes. Embrigadés et soumis à un lavage de cerveau intense, ces jeunes tombent facilement dans le piège du djihad et de l'extrémisme. En absence de moyens et de lieux de divertissement, il est essentiel d'occuper ces jeunes à des activités culturelles qui les aideront à se construire, à élargir leurs horizons et leur permettront de s'ouvrir au monde. Le Centre culturel de montagne se donne justement pour mission d'encadrer ces jeunes vulnérables, de leur offrir un espace d'échange, de liberté et de création.