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Des élus dénoncent des «interventions» pour libérer les terroristes et l'infiltration de l'appareil sécuritaire !.. Appel à s'attaquer au terreau fertile du terrorisme: la pauvreté et la marginalisation
L'Assemblée nationale constituante (ANC) a entamé lundi en fin d'après-midi l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d'argent qui va remplacer la législation de 2003 adoptée sous le régime de Ben Ali et jugée liberticide par les organisations de défense des droits de l'Homme. «Nous avons essayé d'établir une équation préservant la sécurité du pays et les droits de l'Homme», a souligné d'emblée la députée Souad Abderrahim, présidente de la Commission des droits et des libertés, en lisant le rapport relatif au projet de loi. Plusieurs députés ont, cependant, estimé que le projet de loi pourrait ouvrir la voie à des atteintes des droits de l'Homme malgré certaines améliorations, indiquant qu'il comprend des dispositions qui permettent la poursuite de la dissidence politique en tant qu'acte terroriste, confèrent aux juges de trop larges pouvoirs pour ordonner des procédures dérogatoires et réduisent la capacité des avocats à fournir une défense efficace. «Il ne faut pas que cette loi soit utilisée pour revenir aux pratiques de l'ancien régime», a martelé le député Samir Ben Amor (CPR). «Il faut respecter les droits de l'Homme que ce soit pendant la garde à vue ou bien après le jugement », a ajouté le député Lazhar Chamli (indépendant). Rappelant qu'il a plaidé dans de nombreuses affaires de terrorisme sous l'ancien régime, Abderraouf Ayadi (Mouvement Wafa) a estimé que le pays n'a pas besoin d'une loi antiterroriste. «Tout crime terroriste peut être puni en vertu du code pénal », a-t-il suggéré. Et d'ajouter : « La loi n'est pas suffisante. Il faut procéder à une réforme de la justice et des forces de sécurité». En réponse à ces interventions, le député Taher Hamila (ex CPR et fondateur du Parti Al-Iklaâ ) a déclaré qu'un terroriste ne doit pas bénéficier des droits et des valeurs qu'il combat et considère comme étant une hérésie. Complicité et complaisance D'autre part, plusieurs députés ont dénoncé la complicité dont bénéficient entre autres des terroristes présumés et des partis politiques qu'il n'a pas nommés. Le député indépendant Mohamed Ali Nasri (ex CPR, actuellement indépendant) les interventions que mèneraient certaines personnes pour libérer des terroristes , et ce, au niveau des ministères « Il y a des gens qui interviennent pour libérer des terroristes au niveau même des ministères », a-t-il révélé. Dans ce même ordre d'idées, le député Naceur Brahmi (indépendant) a estimé que le «terrorisme a des gens qui le soutiennent», pointant notamment du doigt ceux qui ont accueilli les prédicateurs, en allusion à certains dirigeants du mouvement islamiste Ennahdha. Prenant la défense de son parti, la députée Fattoum Lassoued (Ennahdha) a invité les députés collègues à cesser d'adresser des accusations gratuites à leurs collègues. «Il faut qu'on s'arrête de s'accuser mutuellement », a-t-elle affirmé D'autre part, le député Fethi Letaief (Front Populaire) a évoqué la question de l'infiltration de l'appareil sécuritaire. «M. le ministre on veut des réponses claires concernant la complicité des forces de l'ordre avec les impliqués dans les crimes », a-t-il lancé au ministre de l'Intérieur, Lotfi Ben Jeddou. M. Letaief a aussi indiqué que la stratégie de lutte contre le terrorisme ne doit pas se limiter aux aspects sécuritaires, soulignant l'importance de lutter contre la pauvreté et la marginalisation qui constituent un terreau fertile du terrorisme. Dans ce même chapitre, le député Mourad Amdouni (Front Populaire) a précisé que la lutte contre le terrorisme nécessite une approche globale comprenant des volets axés sur le développement économique et la justice sociale. « La solution sécuritaire n'est pas suffisante, car le problème est plus profond. Nous avons tous vu ce citoyen de Kasserine qui disait qu'il était prêt à aider toute personne qui lui donne à manger », a-t-il déclaré. Sur un autre plan, le député Abdelmajid Najjar (Ennahdha) a mis l'accent sur les dangers des fatwas émises par des cheikhs extrémistes sur les chaînes satellitaires étrangères. «Le peuple tunisien tient à sa religion mais l'ignore réellement parce qu'il s'est retrouvé à suivre des Fatwas à la télé », a-t-il déploré. La discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d'argent s'est poursuivie hier après-midi, avec la réponse du ministre de la justice et le vote sur la clôture du débat pour passer à l'examen article par article. Crimes terroristes A noter que le projet de loi classe actes terroristes en plusieurs catégories. Ces crimes sont notamment le fait d'assassiner ou de faire des dégâts corporels graves à une ou plusieurs personnes , de causer des dégâts aux sièges des missions diplomatiques ou consulaires ou des organisations internationales, de porter un préjudice à l'environnement qui met en danger la vie ou la santé des habitants ou à des propriétés publiques et privées à l'instar des infrastructures, des systèmes de télécommunications et des moyens de transport. Tout fait considéré comme un acte terroriste doit, cependant, avoir été commis en exécution à un plan individuel ou collectif dans l'intention de semer la panique dans les rangs de la population. Les peines prévues pour ces actes terroristes vont de la perpétuité pour l'assassinat ou les dégâts corporels causés à une ou des personnes à une amende d'un montant compris entre 50.000 et 100. 000 dinars pour les dégâts causés aux propriétés publiques et privées. Le projet de loi remplace la peine capitale par la perpétuité. Et pour cause: la peine de mort protège souvent les coupables en fuite à l'étranger, puisque plusieurs pays développés refusent de les extrader vers des pays où la peine capitale est en vigueur. Les dégâts causés aux sièges des missions diplomatiques et consulaires ou des organisations internationales ainsi que les préjudices portés à l'environnement qui mettent en danger la vie ou la santé des habitants sont punis de 20 ans de prison ferme. Le projet de loi n'incrimine pas les simples intentions. L'article 5 stipule en effet qu'il est considéré comme ayant commis des actes terroristes toute personne qui a l'intention de commettre ces actes à condition qu'il ait procédé à des travaux préparatoires pour les exécuter. Dans ce cas, cette personne est passible des mêmes sanctions prévues pour un terroriste ayant mis à exécution l'un des crimes mentionnés dans le projet de loi.