Le marché africain : une population qui dépassera celle de la Chine en 2035, des investissements démultipliés par cinq en l'espace des dix dernières années et une croissance annuelle moyenne de l'ordre de 6%. La Tunisie partiellement inactive sur ce marché mais elle est en train de rattraper le retard La coopération tuniso-africaine ne cesse de se consolider. L'importance que représentent les relations de la Tunisie avec l'Afrique du Sud n'est pas nouvelle. Pour booster plus ce partenariat Sud –Sud, Media Press a organisé du 23 au 25 septembre à Hammamet, en partenariat avec l'UTICA le Forum sur le développement de la coopération tuniso-africaine: « Bâtissons l'avenir ». Ce forum comme l'a souligné son organisateur Belhassen Ben Saallem a porté sur le développement de la coopération tuniso-africaine dans différents domaines tels que la santé, la formation, le tourisme et la finance. Le développement des relations économiques et commerciales avec l'Afrique, est plus qu'un défi, c'est un impératif. La Tunisie est partenaire avec plusieurs projets de développement économique La présence d'entreprises publiques et de groupements privés dans plusieurs pays témoigne d'un engagement réel dans les tissus économiques nationaux mais procède d'une conviction, celle que les économies africaines recèlent des potentialités de croissance. Plusieurs éléments conjoncturels ont conféré au continent africain une attractivité nouvelle en matière économique. La tendance aujourd'hui, est qu'il ne faut plus tout attendre du Nord, c'est-à-dire des pays d'Europe, d'Amérique, mais savoir mettre à profit les potentialités dont dispose le continent africain. La Tunisie est tenue à s'investir plus sur ce continent malgré les problèmes d'aérien et de visas .Le continent apparaît désormais comme un relais naturel de croissance. C'est aussi une zone où l'intégration économique est très prometteuse, ce qui exige une coopération régionale renforcée. Autant de raisons qui place cette coopération tuniso-africaine au cœur des enjeux d'une intégration régionale africaine ». Taoufik Mlayeh, président du Comité des relations avec l'Afrique au sein de l'UTICA a précisé que l'image de l'Afrique a souvent véhiculée est celle d'un continent ravagé par les guerres, miné par les putschs militaires et rongé par les guerres et la famine. « Depuis quelque temps, cette époque est bel et bien révolue et cette sombre image n'est plus qu'un lointain souvenir aux yeux des peuples d'Afrique d'abord, de leurs voisins ensuite et de leurs partenaires de plus en plus nombreux. Jamais, en effet, par le passé l'Afrique n'a suscité autant d'intérêt, d'attraction et de convoitises de la part de puissantes économies étrangères autant que ces vingt dernières années. Elle est désormais la cible privilégiée des américains, chinois, russes et français. C'est dire l'immense potentiel dont regorge ce continent grand comme quatre fois l'Europe, avec une population qui dépassera celle de la Chine en 2035, des investissements démultipliés par cinq en l'espace des dix dernières années et une croissance annuelle moyenne de l'ordre de 6%. La Tunisie voue un grand intérêt pour ce continent comme en témoignent l'évolution de ses échanges commerciaux, des investissements mixtes et croisés et même des mouvements de personnes. Les initiatives de rapprochement économiques engagées par le passé ont permis aux hommes d'affaires africains de construire des partenariats avec les entreprises tunisiennes. Mais cet élan n'a pas été suivi alors qu'il aurait fallu qu'il serve de repère pour un balisage plus large au positionnement des entreprises tunisiennes. Force est de constater aujourd'hui, que malgré ses atouts, la Tunisie est loin d'être un pays actif en Afrique. Cela dit la cloche n'est pas tout à fait ratée. Notre pays a encore des chances de se rattraper à condition d'y croire, d'y mettre de la volonté politique et de sortir des sentiers battus pour adopter une démarche globale impliquant l'ensemble des acteurs sans distinction aucune ». Un grand marché à exploiter L.'essoufflement des exportations tunisiennes orientées dans leurs trois quart vers marchés européens et le ralentissement des IDE en provenance de l'Europe nous interpellent non pas pour changer de fusil d'épaule souligne Taoufik Mlayeh mais pour aller chercher ailleurs des gisements de croissance pour nos entreprises et notre économie « Il faut dire dit-il que nos choix sont plutôt limités eu égard à nos spécificités économiques ,culturelles, sociales et économiques mais aussi au degré d'attrait des principales zones économiques de la planète. Cet immense marché ne peut être abordé ni individuellement, ni ponctuellement, encore moins à distance. Des chefs d'Etat, et pas des moindres, ont conduit des missions d'envergure, plus d'une fois pour marquer l'intérêt, c'est certain mais aussi pour tisser les liens, aplanir les difficultés, se familiariser avec l'environnement et se positionner à travers les gros contrats. C'est la volonté politique qui devrait se décliner en une diplomatie économique active et agressive. Notre présence diplomatique se limite à huit ambassades couvrant un espace de 45 pays avec des moyens plutôt modestes. La Turquie en a ouvert une quinzaine en trois ans. Le Maroc est diplomatiquement présent dans 22 pays africains. En nous adossant à une diplomatie aguerrie aux enjeux économiques, il faudra repenser notre action sur le continent par l'adoption d'un « plan Afrique » qui définisse des priorités, arrête des objectifs réalistes et associe l'ensemble des intervenants. Les banques, les compagnies d'assurances, les sociétés de transport et les organismes d'appui (le CEPEX en particulier) sont à ce titre les premières à être sollicitées non seulement pour accompagner les entreprises, mais pour assurer une présence sur place et des prestations adaptées aux usages bien particuliers de nos partenaires potentiels. 2014 baptisée pour l'UTICA « Année de l'Afrique » pourrait à mon avis être consacrée à l'élaboration de cette stratégie. L'année de l'Afrique ne sera pas ainsi un simple slogan, ou un vœu pieux mais bel et bien une vision de long terme autour d'un Plan Avenir Afrique » Manque de cadre juridique préférentiel Ce forum tuniso-africain va certainement aider les professionnels tunisiens à initier une réflexion sur une stratégie d'intégration durable entre la Tunisie et les pays africains. Dans ce cadre explique Moncef Hantous représentant le secrétariat d'Etat du développement et de la coopération internationale la Tunisie s'est attelée à accorder à ses relations avec le continent africain une place spéciale, consacrant ainsi sa dimension africaine et l'impératif de la coopération et la solidarité avec les pays africains « Ce continent dispose abondamment de richesse, d'expertises et de potentialités qui lui permettent de promouvoir un partenariat solide et gagnant pour tous. Un effort commun entre les pays africains est nécessaire, voire même crucial, pour faire face à ces défis et réunir toutes les conditions favorables pour bâtir un avenir propice pour le peuple africain. La Tunisie a adhéré à plusieurs conventions internationales et conclu plusieurs autres accords comme les accords bilatéraux de promotion et de protection des investissements avec des pays comme l'Afrique du Sud, le Congo, la Côte d'Ivoire, et les pays de l'Afrique du Nord. Il est cependant évident qu'un manque de cadre juridique préférentiel avec les plus importantes unions économiques africaines de la région (UEMOE, COSMESA) affecte négativement le développement économique avec le continent africain. D'où, l'utilité de commencer à œuvrer pour l'établissement d'un cadre juridique plus élaboré et plus global. La Tunisie était parmi les premiers pays à développer une coopération dans le secteur bancaire avec certains pays africains notamment avec le Sénégal et le Niger. Malheureusement, cette vision s'est estompée petit à petit. Il faudrait encourager les banques tunisiennes à se délocaliser et à mettre à la disposition des hommes d'affaires et exportateurs tunisiens des lignes de crédits. Il ne peut y avoir des solutions pour une intégration durable dans le continent africain sans pouvoir passer par une stratégie africaine harmonieuse fondée essentiellement sur la solidarité des Etats Africains et le soutien des diverses instances et institutions financières régionales et africaines » Accompagner les opérateurs tunisiens dans cette dynamique La Tunisie souligne Tarak Ben Kbaier directeur central au CEPEX déploie aujourd'hui son réseau d'influence sur tout le continent qui connait une grande croissance oscillant entre 6 et 14% par an. « Notre développement naturel est l'Afrique. Et nous devons désormais accompagner les opérateurs tunisiens dans cette dynamique. L'Afrique, qui fait figure d'eldorado mondial grâce à ses richesses en matières premières et sa main d'œuvre bon marché, ne compte en fait aujourd'hui que 2,3% des échanges commerciaux avec la Tunisie. L'analyse des relations commerciales entre la Tunisie et l'Afrique subsaharienne, en particulier les exportations, a montré qu'elles demeurent relativement faibles, balbutiantes même pour certains secteurs. En dépit des progrès réalisés au cours des dernières années, la percée tunisienne sur ce marché n'a pas permis d'améliorer sensiblement la part de marché tunisien comparativement à certains pays concurrents aussi bien étrangers qu'africains. Les raisons varient, allant de l'institutionnel à l'économique et au logistique. Il n'en demeure pas moins que des efforts restent encore à déployer pour exploiter pleinement le potentiel de coopération entre la Tunisie et l'Afrique , renforcer les liens commerciaux et faire de la coopération économique le cheval de bataille de la politique africaine de la Tunisie. Parmi ces principales actions, nous citons : Cibler les partenaires prioritaires en fonction des potentialités des différents pays africains, améliorer le cadre juridique et réglementaire des accords en vigueur, conclure des accords de commerce et d'investissement avec les communautés économiques régionales et les économies locomotives au niveau des sous-régions, assurer une offre croissante d'exportation adaptée à la demande et aux spécificités des économies de l'Afrique, consolider l'appui institutionnel sur ce marché (un seul représentant de Cepex à Abidjan) et accompagner les professionnels et les soutenir financièrement sans occulter un bon accompagnement diplomatique »