Les élections approchent à grands pas et les accusations se multiplient de part et d'autre. Personne n'est épargné et chacun tire à boulets rouges sur ses adversaires politiques, tout en se disculpant et en se déchargeant des incriminations menées l'un contre l'autre. Le climat s'annonce difficile et le pire est à craindre. Dans cette lutte à couteaux tirés, les instances de régulation, à savoir l'ISIE et la HAICA, ainsi que le Tribunal administratif, l'arbitre en matière de contentieux, sont appelés à agir pour empêcher que la situation n'empire et que le processus électoral ne soit entaché d'irrégularités, d'autant plus que ces élections ont une importance capitale pour l'avenir du pays, étant donné que l'Assemblée qui va en émaner va générer un gouvernement et légiférer pour mettre en application les principes et valeurs énoncés dans la Constitution. «Des pots-de-vin distribués à droite et à gauche » «D'aucuns ont misé sur l'éclatement du Front Populaire (FP) à l'occasion de la répartition des têtes de listes entre les partis y afférents, mais nous avons réussi un pari, celui d'en préserver l'unité, et nous avons dépassé ce cap en dépit des difficultés prévisibles, puisqu'il s'agit d'une première expérience », clame Mohamed Jmour, le leader du Front Populaire. Aujourd'hui, ce Front veut conforter les différents sondages d'opinions qui se sont succédé, pendant pratiquement deux ans, et qui le plaçaient en tant que troisième force du pays, nous révèle-t-il. « Cette position constitue un souci, une préoccupation pour certaines forces politiques réactionnaires, et c'est pour cette raison qu'elles ne ménagent aucun effort pour ternir l'image de marque du FP et l'affaiblir auprès de l'opinion publique nationale ». C'est ce qui explique l'existence d'une campagne de désinformation à travers les réseaux sociaux où on propage, par exemple, que le FP a éclaté en France, et qu'il y a des tensions entre ses composantes, notamment, entre Al Watad et le Parti des Travailleurs, toujours selon les affirmations de Mohamed Jmour. « Ce sont des mensonges colportés par ces forces réactionnaires qui essayent de semer la zizanie au sein du FP et de faire croire aux électeurs tunisiens que celui-ci n'est pas aussi cohérent qu'on le pense, seulement ces espoirs quant à l'implosion du FP ont échoué », ajoute-t-il. Le pire, d'après lui, c'est qu'on ne s'est pas contenté du dénigrement, mais qu'on est passé à la falsification, en voulant affaiblir le candidat à la présidentielle, Hamma Hammami, puisque certains des militants du FP se sont aperçus qu'ils ont parrainé des candidats à leur insu. Ces derniers vont porter plainte auprès des autorités compétentes, c'est-à-dire le ministère public, souligne-t-il. Pour toutes ces considérations, le juriste considère que le climat électoral n'est pas sain et qu'on n'a pas pris des mesures pour l'assainir. « On a vu comment des partis politiques, qui briguent la première place, ont recouru à l'argent, comme d'habitude, pour acheter les voix des électeurs. C'est ainsi que l'un d'entre eux s'est permis de distribuer, pendant la fête de l'Aïd El Khébir, des paquets de viande avec un emballage portant son nom à des familles nécessiteuses, et qu'un autre leur a donné des sommes d'argent aussi bien à Tunis que dans les régions pauvres de l'intérieur du pays, surtout dans le nord/ouest, agissant par le biais d'associations à connotation religieuse», explique Jmour. D'après notre confrère « Assabah Al Osbouî » qu'il cite pour appuyer ses accusations, un imam d'une mosquée sise à la cité Ettahrir a fait du prêche de l'Aïd un prêche purement politique, ce qui a poussé les croyants à quitter ce lieu de culte pour protester contre ce discours tendancieux qui les exhortait à voter dans un sens déterminé. « Donc, les mosquées n'ont pas été, malheureusement, neutralisées, et je crois que l'ISIE a beaucoup de travail à faire à ce niveau », commente-t-il. Mohamed Jmour déplore, enfin, ce qu'on appelle le « vote utile » qui vise à favoriser la bipolarisation et à exclure le FP.