L'ANC a fait ses valises et nous l'avons pleuré à chaudes larmes pour nous soulager des angoisses que nous avons vécues sous son ère de régime d'Assemblée, durant les trois dernières années. Partie pour un an avec vocation de rédiger une Constitution, l'auguste Assemblée a fait du « Bardo » le siège des pouvoirs, aussi bien législatif qu'exécutif, puisque c'est d'elle qu'ont a émané les gouvernements successifs de la troisième transition depuis la Révolution et le choixdu Président de la République, comme quoi en termes de « Taghaoul » qu'on peut traduire gentiment par « excès de pouvoir » ou de « surpouvoir » pour les puristes de la science politique, nous avons été servi jusqu'à l'indigestion ! Maintenant, que restera-t-il de positif des animateurs et acteurs de l'Hémicycle constitutionnel du Bardo et que retiendra-t-on pour l'Histoire, qui, elle, aura la latitude et suffisamment de relativité et de retrait pour rendre à César ce qui est à César et peut-être rendre justice et ne pas trop accabler une institution post-révolutionnaire, qu'on pratique une fois dans le siècle puisque la dernière remonte à décembre 1955 du siècle dernier. D'abord, l'ANC, a été une bonne école d'apprentissage politique et juridique d'un nouveau personnel politique venu d'horizons divers et de « maisons » religieuses et idéologiques à peine compatibles. Il a fallu du temps pour faire comprendre à bien du monde, les « limites » du seuil minimal de courtoisie et du bon vivre ensemble. La majorité arrogante de départ et qui a mal interprété le message « sanction » du scrutin du 23 octobre 2011, pour se croire investie d'une mission messianique « révolutionnaire » de réislamiser ce pays, pourtant musulman et bien dans sa peau identitaire, depuis Carthage et Kairouan, a compris, mais un peu tardivement, qu'elle doit cohabiter avec la société civile et démocratique, qui a une lecture absolument différente de la Révolution de décembre-janvier 2010-2011. En effet, pour plus de la moitié des Tunisiennes et des Tunisiens et, d'ailleurs, les élections législatives de 2014 l'ont prouvé, la Révolution n'est pas d'essence ou d'ordre « islamique », mais démocratique, pluraliste (y compris les islamistes) et surtout économique, social et d'équilibre régional, essentiellement. Deuxième aspect positif, c'est l'image donnée, malgré les prismes dignes d'une œuvre « cubiste » à la Picasso, que la Tunisie n'est pas un pays de violence ou d'extrémisme primaire et à la limite de « terreur révolutionnaire », telle que vécues par les révolutions classiques occidentales (anglaise ou française) ou plus à l'Est comme le bolchévisme russe. Grâce à Dieu, notre Révolution n'a pas eu ses Marat ou Robespierre, malgré quelques relents de revanche sur l'ancien régime et les tentations législatives avortées sur l'exclusion politique. Cette canalisation réussie des « dérives » possibles à l'ANC, nous la devons à une certaine sagesse de quelques leaders politiques, mais surtout au « peuple » du Bardo qui a été de tous les combats, de jour et de nuit, pour ramener toujours, l'ANC, sur terre « tunisienne » celle du compromis, de la solidarité minimale et de cette forme de générosité de tolérance et de l'acceptation des différences. Enfin, l'ANC a, quand même, pu dans la douleur, certes, et le souvenir des martyrs de Chokri Belaïd et Haj Mohamed El Brahmi, rédiger la Constitution et faire aboutir à son terme le travail pour lequel elle a été intronisée. Donc, mission accomplie alors que d'autres pays du « Printemps arabe » en sont encore à la descente aux enfers et aux souffrances. Avec l'ANC, la Tunisie a vécu l'accouchement et l'expérimentation, agitée certes, de la naissance d'une Démocratie consensuelle, mais avec le coup de main génial du Quartet du Dialogue national, à qui on doit une fière chandelle ! Au final, l'expérience valait la peine d'être vécue et c'est bien dans la douleur et l'espoir que se forgent les nations. Une interrogation, quand même, pour la petite histoire ! Toutes Révolutions ont connu, les écarts de langage, les petites phrases célèbres etc... Citons le fameux Mirabeau : « Nous sommes ici par la volonté du peuple et nous n'en sortirons que par la force des baïonnettes ». C'était en 1789, en France. Contentons-nous des répliques exaltées et amusantes d'un « Gassas » sympathique à ses heurs, mais délirant d'irrationalité ou de la « poésie » de Mme Ben Toumia et en toute sportivité. Disons à tous les députés de l'ANC, sans exception : Merci, quand même ! K.G