Dans le cadre du projet « Kolna Hirfa » (Tous artisans), les membres de l'Association « Kolna Tounes », accompagnés de quelques journalistes, se sont rendus le week-end dernier à Aïn Draham, le temps d'y organiser l'événement « A night in Aïn Draham ». Au programme de ce rendez-vous essentiellement culturel, une table ronde sur le thème « Tourisme et culture à Aïn Draham, quelles perspectives ? », en présence du gouverneur de Jendouba. L'après-midi, des échassiers vêtus de costumes en noir et blanc ont sillonné la ville, sous le regard d'abord dubitatif puis admiratif des riverains, ravis qu'une telle manifestation culturelle se déroule dans leur ville. Puis direction la vieille chapelle d'Aïn Draham, qui a revêtu pour l'occasion un moderne habit de lumières chatoyantes, pour un marathon musical auquel ont participé le collectif Jazz Blue Note Project, le violoniste Hassene Mcheikhi, la chanteuse Raeda à la voix envoûtante et le joueur de gasba Amine Cherni. Dimanche matin, les membres de l'Association « Kolna Tounes » sont partis en randonnée à « Fajj Errih » (Col du vent), une région réputée pour sa beauté sauvage et ses paysages naturels époustouflants. Terminus «A night in Aïn Draham » est la neuvième et dernière escale, du moins pour cette saison, d'une longue série d'événements visant à valoriser les régions du Nord-Ouest tunisien et à y promouvoir les secteurs du tourisme, de l'artisanat et de la culture. financé par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l'Union européenne (UE), ce projet aura concerné en tout neuf délégations dans trois gouvernorats, à savoir Jendouba (Aïn Draham, Fernana, Oued Mliz), le Kef (Kalaa Khasba, Nebeur, Sakiet Sidi Youssef) et Siliana (Kesra, Laaroussa, Rouhia). En décembre dernier, « Kolna Tounes », fondée par Dr Emna Mnif en 2011, a rendu visite aux habitants de Kesra, village berbère situé sur la bordure nord de la dorsale tunisienne. Peu avant la fin de l'année, l'Association avait également organisé « Itinérance », un événement itinérant comprenant des visites à quatre délégations : Rouhia (Siliana), Neber (Kef) et enfin Oued Mliz et Fernana, tous deux situés à Jendouba. Il y a moins de deux semaines, les membres de Kolna Tounes se rendaient à Sakiet Sidi Youssef et y organisaient, entre autres, un magnifique spectacle de rue. A chaque étape, l'objectif de l'Association était clair: revaloriser les petits métiers aujourd'hui en voie d'extinction, promouvoir le patrimoine local artistique et culturel de ces régions, encourager le savoir-faire artisanal et traditionnel des femmes rurales et ce, à travers le lancement d'entreprises solidaires et citoyennes, la création d'emplois pour les artisanes et l'organisation de cycles de formation pour les appuyer et les accompagner durant toute cette aventure professionnelle qui leur offrira un travail décent et une vie digne. L'Association « Kolna Tounes » vise aussi à impliquer le plus grand nombre de diplômés chômeurs de ces régions défavorisées en les associant au processus de vente des produits artisanaux réalisés localement. Femmes rurales: un potentiel en or Le projet solidaire « Kolna Hirfa » n'est pas sans rappeler deux autres initiatives visant aussi à lutter contre le chômage dans les régions précaires à travers le soutien de femmes artisanes et la revalorisation du patrimoine artisanal local. Le projet collectif « Laâroussa », initié par les artistes Selma et Sofiane Ouissi et consistant à encourager les potières de Sejnane est le premier exemple. Lancé en 2010, il profitera à plus de soixante artisanes et connaîa un franc succès aussi bien en Tunisie qu'à l'étranger puisque certaines oeuvres se vendront même à Tokyo au prix fort. Deuxième initiative solidaire lancée par une femme pour les femmes, celle de Sadika Keskes, artiste souffleuse de verre, intitulée « Femmes, montrez vos muscles ». Consciente du potentiel énorme dont disposent les artisanes de Foussana (Kasserine) aussi bien dans la broderie, le tissage, le cardage ou le filage, la créatrice tunisienne leur a offert une chance inouïe : celle de les ravitailler en matière première et acheter leurs réalisations. Sadika Keskess n'en était pas à son premier projet avec les femmes artisanes puisqu'elle avait tenté une première expérience de ce genre avec les dentelières de Ghar El Melh et les brodeuses aux fils d'or et d'argent de Mahdia.