Coup de théâtre dans l'affaire de l'attaque terroriste contre le musée du Bardo perpétrée le 18 mars dernier et attribuée par le gouvernement à la phalange Okba-Ibn Nafaâ mais revendiquée par la nébuleuse terroriste l'Etat islamique. Dix suspects dans cette affaire ont été relâchés par la justice, dans la nuit de mercredi à jeudi 6 août, après plus de quatre mois d'enquête, a-t-on appris hier de source judiciaire digne de foi. La libération des dix suspects, neuf homme et une femme âgés de 20 à 35 ans, nous a été confirmée par Me Anouar Ouled Ali, l'avocat de certains de ces suspects. Fait encore plus déroutant : Mohamed Amine Kabli, le présumé «cerveau de l'attaque du musée », selon les dires du ministre de l'Intérieur Najem Gharsalli, figure parmi les suspects libérés ! Le ministre de l'Intérieur avait en effet annoncé lors d'une conférence de presse tenue le 26 mars dernier que Mohamed Amine Kabli (25 ans) est «le premier responsable ayant supervisé l'attaque», révélant que ce suspect avait «agi sur ordre de l'Algérien Lokman Abou Sakhr», le chef de la phalange Okba Ibn Nafaâ, qui a été abattu fin mars dans la région de Sidi Yaïche (gouvernorat de Gafsa) lors d'une opération sécuritaire d'envergure. Les dix personnes relâchés habitent, selon nos sources, tous dans le quartier populaire d'Al-Omrane supérieur, à quelques kilomètres du musée du Bardo. Selon Me Ouled Ali, «le juge d'instruction est arrivée au fil des audiences et des investigations à la certitude que les suspects n'avaient aucun lien avec l'attaque du Bardo». Toujours selon cet avocat, «les aveux des suspects ont été extorqués suite à de mauvais traitements». Me Ouled Ali a aussi révélé que le juge d'instruction en charge de l'affaire a déjà exploré une nouvelle piste et procédé déjà à de nouvelles arrestations dans le cadre de l'affaire de l'attaque du musée du Bardo qui a fait 22 morts (21 touristes étrangers et un agent de la brigade antiterroriste). L'avocat, qui assure que certains suspects relâchés s'apprêtent à déposer des plaintes pour torture et mauvais traitements contre des agents de la brigade anti-criminelle de Gorjani, estime que le ministre de l'Intérieur «a commis l'erreur d'avoir annoncé de façon précipitée lors de sa conférence de presse les noms des suspects au lieu de se contenter de parler de prévenus». La libération des dix suspects dans l'affaire de l'attaque du Bardo est intervenue quelques heures seulement l'annonce par la brigade antiterroriste britannique, de l'existence d'un «lien» entre l'attaque djihadiste contre le musée du Bardo à Tunis le 18 mars et celle contre un hôtel près de Sousse, le 26 juin. «L'attaque contre le musée du Bardo qui avait fait 22 morts, dont une Britannique, est liée à celle à Sousse», qui a causé la mort de 38 touristes, dont 30 Britanniques, a déclaré Richard Walton, chef de la cellule anti-terroriste de Scotland Yard, le mercredi 5 août. «Je ne peux pas donner de détails supplémentaires sur des enquêtes qui sont en cours mais je peux en revanche confirmer que nous collaborons étroitement avec les autorités tunisiennes sur les deux enquêtes et que nous avons informé le parquet du lien qui existe entre les deux», a-t-il ajouté dans un communiqué. Les deux attaques, qui ont porté un coup très sévère au secteur touristique, ont été revendiquées par l'organisation de l'Etat islamique. Selon Scotland Yard, environ 150 personnes ont été arrêtées en Tunisie et 15 ont été déjà inculpées pour acte de terrorisme, depuis l'attaque du 26 juin. Les policiers britanniques ont recueilli 459 témoignages et ont en leur possession plus de 370 fichiers photo et vidéo provenant de téléphones et de tablettes portables.