Il est certain qu'on ne nous dit pas tout, en politique. Toutefois, par moment, une courte phrase lancée par un responsable national, dévoile des secrets et des changements en préparation. Ainsi, le chef du gouvernement a-t-il dit, en substance, que « la lutte contre Daëch exige des alliances qui verront le jour». En même temps, le sommet des chefs d'Etat à New York, nous gratifie de déclarations d'Angela Merkel, assurant que l'Allemagne aidera la Tunisie dans la surveillance de ses frontières. Le président des Etats-Unis va plus loin en parlant de cette fameuse alliance contre le terrorisme, évoquée sans crier gare par Habib Essid. En bref, trois déclarations et une conclusion : la Tunisie combattra Daëch dans le cadre d'une alliance internationale. Le puzzle est entièrement mis en ordre. Daëch, danger continu, menace le Sud du pays, là où les Américains rêvaient depuis longtemps d'une présence militaire. Et l'alibi est là. Ce n'est pas une intervention étrangère, mais une simple présence. Ils agiront en coopérants, pas forcément selon la formule désuète, d'une base militaire, mais selon une structure beaucoup plus légère genre « formateurs militaires » ou autres. D'ailleurs, l'ouverture dernièrement d'un bureau du FBI à Tunis, n'est ni fortuite, et encore moins, anodine. Comme les Allemands promettent une aide substantielle pour le contrôle numérisé des frontières tuniso-libyennes, la boucle sera bien bouclée par un partage rationnel des rôles et des intérêts « équitables » pour tous. La Tunisie fournit le terrain, les Allemands la clôture, et les Américains le côté opérationnel de l'opération. Les Tunisiens seront moins obsédés par la peur des coups de Daëch, venant du voisin libyen, abstraction faite des cellules dormantes éparpillées dans les villes... et beaucoup plus menaçantes qu'on le croirait. Si les Allemands n'ont pas d'intérêts spécifiques directs, ils travaillent en sous-traitance pour l'Oncle Sam. Sans le feu vert d'Obama, leur « aide » si désintéressée n'aurait jamais vu le jour. Quant aux promoteurs du projet, les Américains, ils imposeront leur rythme dans la lutte contre leur création Daëch et, finiraient par avoir le beurre et l'argent du beurre. Jusqu'à la discrète déclaration de Habib Essid, appelant à une alliance pour la lutte contre Daëch, on ne parlait jamais d'intervention étrangère dans cette guerre menée par la Tunisie contre le terrorisme. C'est la doctrine ! On misait sur une solution plutôt maghrébine... et qui n'ira pas aussi loin... Washington « sollicitée » répondra à l'appel... Pourquoi ? L'Algérie les intéresse... Tout le drame est là. On va vers le pommier alors qu'on cherche le dattier. En matière de diversion, les Yankees sont très forts... Comme on n'est qu'au stade des déclarations pour la mobilisation des fidèles, il est certain, qu'entre-temps, la Syrie finira par se libérer de ses « Daëch ». Les Américains, perdant du terrain devant les Russes en Syrie, le Sud tunisien les intéresserait ! Sans faire de spéculations, Barak Obama et Habib Essid ne parlent pas le même langage par hasard... Le plus grave encore, est l'appel indirect à Daëch... pour qu'il occupe le terrain au Sud du pays. Où est la classe politique ? Où sont nos intellectuels ? Que faire ? Attendre sans oublier que le Sud a toujours été l'objet de toutes les convoitises. Espérons que la déclaration de Habib Essid est spontanée et que les Tunisiens continueront leur guerre contre le terrorisme avec le soutien étranger, mais sans la moindre présence étrangère. Sinon, bonjour les dégâts... Et à la fin, comme au Soudan et ailleurs, là où l'Islam politique et les Américains sont passés, les pays concernés ont été divisés par les séparations et coupés comme une poire en deux. Un si petit pays ne supportera pas pareille division et séparation qui deviendra disparition. La Tunisie, arrivée à un stade avancé dans sa transition démocratique, verra tout le processus bloqué. Et comme l'anti-américanisme est très développé chez nous, les groupuscules d'extrême droite, trouveront dans l'éventuelle « présence » américaine au Sud, du pain béni pour leur propagande anti-Occident, le diable qui ne voudrait que du mal à l'Islam et aux Musulmans. Et qui pourrait arrêter ce genre de développement ? Le rejet des extrémistes passerait au second plan. Et les héros de la « réislamisation » des Tunisiens trouveront le bol d'oxygène qui leur manque actuellement.