Entre l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) et l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA), c'est toujours le dialogue de sourds en ce qui concerne les majorations salariales dans le secteur privé. Le secrétaire général de la centrale syndicale, Houcine Abbassi, a en effet révélé lundi sur les plateaux de la chaîne France 24 que l'organisation patronale a rejeté tout récemment une proposition médiane faite par le Chef du gouvernement, Habib Essid, qui a tenté de rapprocher les points de vue entre les deux parties. «Face au blocage des négociations, le chef du gouvernement a procédé à un arbitrage et tenté de couper la poire en deux, en proposant un taux de majoration de salaire censée satisfaire les deux partenaires. Nous avons accepté cette proposition médiane, mais l'UTICA l'a rejetée», a-t-il déclaré, sans révéler le taux proposé par M. Essid. L'UGTT avait réclamé initialement une majoration de 15% des salaires des employés du secteur privé, avant de revoir ses exigences à la baisse pour demander un taux de 12%. L'UTICA a, quant à elle, affirmé qu'elle ne peut pas aller au-delà d'une majoration salariale de 4,8%, soit un taux proche de celui de l'inflation. Selon des sources syndicales, le chef du gouvernement a proposé un taux de 7%, Mais le patronat a jugé ce taux excessif. «Le chef du gouvernement s'est en réalité aligné sur la position de l'UGTT», a indiqué la présidente de l'UTICA, Wided Bouchemmaoui, qui s'exprimait aussi sur les plateaux de France 24, indiquant que «le secteur privé n'est pas l'unique responsable de la détérioration du pouvoir d'achat». Signe très révélateur sur le désaccord entre les deux parties, les représentants de l'organisation patronale ne se sont pas envolés hier vers Oslo, où ils devront recevoir le 10 décembre le prix Nobel de la Paix pour son rôle dans l'instauration du dialogue national ayant mis fin à la crise politique qui avait secoué la Tunisie en 2013, à bord du même avion pris par les représentants des autres organisations membres du Quartet, en l'occurrence, l'UGTT, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme et l'Ordre des avocats. Les quatre organisations avaient parrainé en 2013 un long et difficile processus de dialogue national entre le mouvement islamiste Ennahdha et ses opposants, les obligeant à s'entendre pour sortir d'une paralysie institutionnelle. Il est à rappeler dans ce cadre que l'UGTT avait décidé d'organiser des grèves régionales tournantes pour protester contre le blocage des négociations sociales dans le secteur privé. Une première grève régionale a déjà eu lieu le 19 novembre à Sfax. Ce débrayage qui a concerné 164 entreprises a enregistré un taux de suivi proche de 100%, selon l'UGTT. Les autres grèves régionales programmées avaient été cependant suspendues suite à l'attaque terroriste ayant visé des éléments de la garde présidentielle le 24 novembre dernier. Mais la centrale syndicale a menacé de reprendre ces actions de protestation au cas où le patronat continue à refuser l'octroi de majorations salariales respectables aux quelque 1,5 million d'employés des entreprises privées.