Déchirements, angoisses, transes. Le sort se rit de tout. Chaos une pièce de théâtre où les sentiments convergent en réciprocité. Violemment... en une âpre beauté. Celle de renouer avec son être après un long tâtonnement. D'un texte de Hatem Tlili et sur une mise en scène de Meher Mohdhi, « chaos » sera présenté aujourd'hui au Rio. Meher Mohdhi nous en parle. Chaos, ou encore « Trekin Illil ». Pourquoi avez-vous choisi ces titres à votre pièce de théâtre ? En fait, j'ai essayé de mettre la lumière sur les ténèbres qui nous habitent, ces lieux qui échappent à notre regard mais qui pourtant sont-là. Et c'est ce qui fait d'ailleurs le chaos dans lequel nous plongeons et qui nous hante par moments. Le texte parle d'un marginal ? Qui est-il ? Le personnage protagoniste est X. En arabe on lui a donné comme nom la cinquième lettre de l'alphabet, « jim » une abréviation du mot réponse. Il s'agit d'un marginal qui a quitté le pays depuis 18 ans. Il y revient après avoir appris le décès de son ami pendant la révolution tunisienne. Il se retrouve en plein dedans dans une lutte contre les apôtres de l'ancien système et les nouveaux opportunistes. De cruelles déceptions l'attendent notamment quand il apprend qu'il est le père d'un handicapé. Il se renferme sur lui-même et se laisse emporté par une hantise destructrice qui l'amène jusqu'à la folie, qui n'est point une maladie mentale mais un état d'esprit qui fait qu'on préfère être en marge de la société plutôt que de vivre des désastres irréparables. « Jim » anticipe donc sur des questions profondes sur notre être qu'on ne s'est pas encore posées. Les marginaux sont donc des personnes qui un jour ou l'autre ont découvert la Vérité ? Personnellement, je ne cherche pas à savoir qui détient la Vérité. Je cherche plutôt à découvrir ces personnes loyales qui perçoivent la vie différemment, celles qui portent un regard fidèle, sincère et avéré sur le monde qui nous entoure. Je crois aussi que ce marginal peut dire les choses telles qu' elles sont. Il ne peut être instrumentalisé par le système social dominant. La pièce est au final une forme de lutte contre l'oppression sociale ? La pièce de théâtre est un travail artistique qui tente de brusquer le spectateur et dérange ceux qui se complaisent dans le confort de leurs certitudes. Le texte renoue avec cette nécessité de couper avec des souvenirs qui nous sapent le moral pour pouvoir aller de l'avant. Parlez-nous de la conception sonore qui porte la griffe de Oussema Khrissi La musique de scène qui accompagne la pièce s'habille parfaitement avec la scénographie et le texte pour venir entériner le tout par une touche artistique unique. La conception sonore est signée par l'ingénieur son Oussema Khrissi qui a fait preuve d'un grand professionnalisme pour mener à son terme le travail qui lui a été confié. Il a utilisé les techniques du cinéma pour compléter l'action scénique. En quoi consiste votre rôle d'artiste ? Dénoncer les vices sociaux. Il faut aussi se mettre à l'esprit qu'il ne faut pas adhérer aux idées conventionnelles et défendre des thèses parce qu'elles sont porteuses ou qu'elles vont dans le sens du vent dominant. Un artiste doit avoir sa propre lecture et vision de la société. Il doit également espérer et croire en un monde meilleur et porter ce rêve sur scène.