Au cours d'un colloque tenu hier à Tunis sur l'échec scolaire, le ministre de l'Education, Naji Jalloul, a annoncé un train de mesures pour lutter contre l'interruption précoce des études dont le lancement d'un programme intitulé « l'école récupère ses enfants », la suppression du régime des équipes qui consiste pour l'instituteur à enseigner deux années à la fois dans la même classe et en même temps, comme la première année et la deuxième année primaire. Le ministre a indiqué que ce régime est l'une des causes principales de l'interruption précoce des études notamment dans les zones rurales et les zones reculées, outre le signalement des éléments menacés de l'interruption précoce des études afin de les entourer d'une attention particulière et la suppression de la semaine bloquée, à partir de cette année scolaire, laquelle mesure, a-t-il dit, a trouvé, au début des résistances puis elle a été acceptée devant la réalisation de son importance pour la réhabilitation de l'école en tant qu'espace éducatif et non pas comme un espace d'apprentissage et d'organisation des examens et la réussite dans les examens par tous les moyens sans distinction au détriment de l'enseignement ciblé. Il a annoncé, aussi, le retour de la formation professionnelle à l'école, en tant que filière essentielle, de sorte qu'à l'issue de l'enseignement de base et des études dans les écoles préparatoires, 50% des élèves seront orientés vers l'enseignement général et 50% vers les différentes sections de la formation professionnelle. Dès cette année, un baccalauréat technologique a été créé. Il s'agit également de faire en sorte que l'enseignement tienne compte des différences au niveau des intelligences des élèves, en fournissant un enseignement personnalisé, à la mesure de chaque élève et de ses facultés de manière à ce que l'élève se trouve dans l'enseignement qui lui est dispensé, parallèlement au renforcement des activités culturelles et sportives et l'amélioration de la vie scolaire grâce à la création d'un office des œuvres scolaires qui s'occupe du transport, des restaurants et des internats scolaires. « On ne peut pas imposer à l'élève un enseignement dans lequel il ne peut pas se trouver, a dit le ministre. S'agissant du programme « l'école récupère ses enfants », il vise à réintégrer les élèves ayant interrompu leurs études aux bancs des études et à leur offrir des chances réelles pour réussir dans leurs études en appliquant à leur profit un plan de mise à niveau adapté. Le colloque a été organisé sous le titre « la lutte contre l'échec scolaire et l'interruption précoce des études, les choix et les solutions », en collaboration avec la fondation « Amana » relevant du groupe industriel Al Oukil, et ce en application d'une convention signée entre cette fondation et le ministère de l'Education. Le ministre s'est félicité de ce partenariat avec le secteur privé dans le cadre de l'ouverture de l'école à son environnement, avec toutes ses composantes, de manière à encourager les entreprises économiques à apporter leur contribution à l'élévation du niveau de l'école à tous les points de vue. D'autant, a-t-il dit, que 97% du budget du ministère est consacré aux salaires et émoluments, contre 3% aux nouvelles créations et à a gestion des écoles. Rôle du secteur privé A cet égard, Bassam Al Oukil, président de la Fondation « Amana », a qualifié l'école publique tunisienne de soupape de sécurité contre toutes les formes d'extrémisme et de conservatisme, ajoutant qu'elle a le mérite d'avoir formé des générations successives de Tunisiens et qu'il est du devoir de tous et des entreprises économiques en particulier, en signe de reconnaissance à son rôle, de contribuer à sa promotion et de l'aider à surmonter ses points faibles. Il s'est félicité du programme « l'entreprise amie » lancé, à cet effet, par le ministère, en vue de renforcer les relations entre les entreprises économiques et les établissements éducatifs et faire participer le secteur privé à l'action tendant à promouvoir la qualité de l'enseignement en tant que solution au problème de l'interruption précoce des études qui touche 10% des élèves du primaire et du secondaire. Il a insisté sur la nécessité d'assurer l'adéquation entre la formation et les exigences du marché de l'emploi, notant qu'il est possible de créer 250 mille et 300 mille emplois si on trouve les profils demandés. Les rapports présentés par les cadres du ministère de l'Education, au cours du colloque, ont montré la gravité du phénomène de l'interruption précoce des études et son ampleur. Le directeur des études et de la planification au ministère de l'Education, Bouzid Nassiri, a indiqué que le nombre des Tunisiens ayant interrompu leurs études depuis 1981 atteint 4 millions 300 mille, alors que le coût annuel de l'interruption atteint 1159 millions dinars, soit près de 28% du budget du ministère de l'éducation. Il a ajouté qu'en moyenne, le Tunisien passe seulement 10 ans à l'école, alors que le taux de l'analphabétisme dépasse 15% et que le nombre des illettrés avoisine un million 700 mille. Il a ajouté que parmi les chômeurs en Tunisie, dont le nombre atteint, au total, près de 600 mille, il existe une bonne proportion d'illettrés et d'autres qui ont un niveau scolaire faible. Il existe aussi parmi les travailleurs, une bonne partie qui sont des illettrés et des personnes ayant un niveau scolaire faible. A cet égard, le directeur au ministère de l'Education, Adel Haddad, a mentionné les risques qui guettent l'élève ayant interrompu ses études, comme la consommation de drogue, l'alcool, la délinquance, ou encore la polarisation de la part des organisations criminelles et terroristes, notant que le coût d'un élève ayant interrompu ses études à l'extérieur de l'école est plus important que son coût en tant qu'élève normal au sein de l'école.