Sud Editions en partenariat avec la Faculté des lettres, des arts et des humanités de l'Université de la Manouba vient de publier un excellent volume regroupant les actes du colloque Salah Garmadi organisé dans le cadre des travaux de l'Unité de recherche UR11 ES40. Etabli sous la direction de Afifa et Samir Marzouki, cet ouvrage est intitulé "En arpentant les territoires de Salah Garmadi". Le livre rassemble dix communications (dont deux en langue arabe) et revient sur plusieurs aspects de l'oeuvre de l'écrivain et universitaire disparu en 1982 à l'âge de 49 ans. Préfacé par Samir Marzouki, l'ouvrage comprend notamment des textes de Taoufik Baccar, Mabrouk Manai, Jalel El Gharbi, Farah Zaiem et Heikal Ben Mostfa. Ces textes abordent les différents aspects de l'oeuvre de Garmadi, sa poésie, sa diglossie et son inspiration. Liberté, créativité et inspirations Samir Marzouki aborde deux pans complémentaires du corpus des oeuvres de Garmadi. Il se penche d'une part sur sa poésie en langue arabe et d'autre part sur la manière dont l'auteur de "Nos ancêtres les bédouins" a su déjouer les pièges de l'exotisme dans cette oeuvre maitresse. Avec sa précision coutumière, Samir Marzouki analyse la stratégie scripturale de Garmadi, relève son humour décapant et cite plusieurs extraits éloquents. Etudiant le versant arabophone de la poésie de Garmadi, Marzouki s'attache ensuite à déceler ce qui relève de "la poétique de la subversion concertée" dans l'oeuvre de l'auteur de "Allahma al Haya" (La Chair vive). Pour sa part, Afifa Marzouki signe également deux textes dans cet ouvrage collectif. Dans le premier, elle s'intéresse à l'appropriation du français au Carrefour de la diglossie poétique chère à Garmadi puis elle se penche sur l'inspiration sociopolitique de l'auteur de "Nos ancêtres les bédouins" dans ce recueil précis. Avec une approche linguistique rigoureuse, Afifa Marzouki tente de déceler ce qui chez Garmadi fonde la liberté du bilingue et irradie la créativité née de cette liberté. Jalel El Gharbi signe un texte articulé autour du verbe "être" dans la poésie de Garmadi alors que Heykel Ben Mostfa part sur la trace de Salah Garmadi dans un texte très analytique qui reprend la typologie des langues pratiquées en Tunisie selon Garmadi. Ben Mostfa s'intéresse à la situation linguistique décrite par Garmadi puis à la politique des langues en Tunisie après l'indépendance pour ensuite établir des corrélats linguistiques. Un écrivain bilingue toujours actuel La partie française de l'ouvrage est complétée par un texte de Farah Zaiem qui étudie l'art de raconter de Garmadi dans "Le Frigidaire" qu'elle met en regard avec une œuvre de Rafik Ben Salah. Les deux textes en langue arabe ont pour auteurs deux compagnons de route de Garmadi, en l'occurrence Mabrouk Manai et surtout Taoufik Baccar. Le premier s'intéresse à la poésie de Garmadi et ce qui s'en dégage comme poïétique. Pour sa part, Baccar est présent à travers la préface qu'il signait en 1970 pour l'ouvrage "Allahma al Haya" "En arpentant les territoires de Garmadi" on parvient avec cet ensemble de textes à capturer l'essence de la puissance rétroactive de l'œuvre de Garmadi et constitue une nouvelle introduction à l'œuvre d'un auteur bilingue toujours actuel.