L' exposition « Pollen », une véritable galerie d'art à ciel ouvert qui prend racine dans les jardins privés de la Résidence de France, Dar El Kamila à la Marsa, a ouvert ses portes au public depuis le 04 juin 2016 , avec la participation de neuf artistes, ( Sadika Keskes, Houda Ghorbel, Wadi Mhiri, Najet Ghrissi, Bchira Triki, Noutayel Belkadhi , Richard Conte, Mariam Bouderbala, Mouna Jemal), et quatre écrivains tunisiens et français , (Colette Fellous, Nacer Khemir, Hédi Kaddour, Pierre Assouline), qui nous proposent dans ces lieux magiques, leur regard sur le monde. Colette Fellous présente « Le souffle du jardin », un texte parallèle au souffle de la vie et des souvenirs d'enfance dans « cette Tunisie belle et mystérieuse ». Hédi kaddour veut renouer avec son pays après une absence de 25 ans et nous plonge avec son texte « Togatus » dans la culture romaine à travers la toge et en référence à une sculpture du parc. Pierre Assouline lui, dévoile le caractère intime de Dar El Kamila, « un jardin dont l'harmonie se situe entre l'écrin et le bijou ». Nacer Khémir en grand conteur, nous conduit dans les dédales de son imaginaire fictif avec « Jardin de mon enfance ». Hommage à la nature Le thème retenu cette année, est celui de la Nature, inspiratrice de toute création ; une manière de lui rendre hommage en intégrant dans les somptueux jardins de Dar El Kamila, des œuvres de grande dimension et de différentes techniques, de la céramique à l'installation, en passant par la sculpture cinétique en métal. En hommage aussi aux lieux et ses jardins, les œuvres exposées comme autant d'échos des préoccupations du monde, ont été savamment orchestrées par deux commissaires d'exposition, Sadika keskes et Wadi M'hiri, répondant ainsi à l'invitation de Mme Halima Gouyette, épouse de l'ambassadeur de France à Tunis. Une belle aventure, selon Mme Gouyette, née autour d'une table chez Sadika, afin de découvrir les travaux et engagements des artistes en leur donnant les moyens de production et d'expression, et pour rendre accessible au public, un espace privé mais toujours accueillant. Regards d'artistes sur le monde « Artiste verrière : telle aime à se définir Sadika Keskes. Ariste guerrière : telle pourrait-on aussi bien la nommer, tant elle milite pour la cause des femmes de son pays, s'investit dans la rénovation des métiers d'art en Tunisie, œuvre pour que ces derniers ne relèvent plus des arts appliqués mais de l'Art à part entière... », écrit Jean Lancri à propos de cette artiste de renommée internationale qui participe avec une installation de onze tombeaux composés de cubes de verre transparents, en hommage aux martyrs de la Révolution tunisienne ; expérience qu'elle a déjà montée en 2013 dans la place principale de la ville de Kasserine à cette période tumultueuse qu'a connu le pays. Avec « Allongez- vous », Wadi Mhiri, artiste visuel dont l'œuvre traite de la question d'identité en rapport avec l'actualité du pays, réalise un autel de sacrifice moderne qu'il pose dans le kiosque à musique de Dar Al Kamila, en confrontant une culture jadis poétique à une culture qui conduit des femmes au « jihad ennikah », (le jihad du sexe). Houda Ghorbal, artiste multidisciplinaire, nous étonne encore et toujours. Avec « Terre, pardonne-nous », elle enfonce des géants en terre pour ne laisser apparaître que leurs pieds ; un cri d'alerte pour un environnement perturbé, voire saccagé, une façon d'implorer la terre pour lui demander pardon. Meriem Bouderbala qui n'est plus à présenter, nous offre à voir et à méditer, avec son installation dans le jardin, en haut d'un palmier mort, d'un personnage ayant le profil d'un jeune réfugié ; son interprétation contemporaine de Siméon le stylite, solitaire chrétien d'Orient ayant vécu vers l'an 350 en Syrie pendant 44 ans sur une colonne, contemplatif et au dessus des hommes. Mouna Jemal nous renvoie quant à elle, l'image de la nature à travers ses cubes en verre qui couvrent les sculptures dénudées du parc, citant à ce propos, Jean Cocteau : « les miroirs feraient bien de réfléchir un peu avant de renvoyer les images ». Najet Ghrissi enchante le visiteur avec ses sculptures musicales, sensibilité légère et aérienne sous un fond de femme de fer. Et Noutayel Belkadhi présente un arbre mobile dont les branches se rétractent à la tombée de la nuit pour nous rappeler le cycle de la vie et de la mort. Enfin, une superbe autre installation, « le jardin des lettres » de Bchira Triki, une sorte d'espace ouvert aux hommes et aux cultes, « où les lettres surélevées, se dressent dans un contexte qui nécessite cette posture afin de libérer le sens de l'unicité et de le rendre au vent, libre et multiple. A ne pas oublier, l'édition d'un catalogue avec de beaux textes signés, Neila Mhiri et le soutien de la Galerie Musk and Ambar, un espace de dialogue invitant la scène artistique locale et internationale. Performance de Richard Conte au Palais El Abdellia L'exposition « Pollen » est un rendez-vous à ne pas manquer, entre arts visuels et grande littérature, reflet de la création contemporaine tunisienne. Le public pourra la découvrir jusqu'au 12 juin, à la Résidence de France à La Marsa, entre 11H00 et 16H00. Quant à la clôture, elle aura lieu ce dimanche 12 juin, de 17H00 jusqu'à 19H00, au jardin du Palais El Abdellia, avec la performance de Richard Conte, et la participation de la Fédération Tunisienne de Boules et Pétanque, FTBP. Le but de cette œuvre consisterait à créer avec le plus grand nombre possible de participants, un tableau de boules au sol, sur un espace dégagé ; un tableau évolutif et vivant dont le résultat visuel sera photographié du ciel une quarantaine de fois par un ballon captif, pendant toute la durée de sa formalisation, pour garder une trace précise de cette œuvre collective. Outre dix catalogues d'expositions personnelles et une centaine d'articles publiés, l'artiste plasticien Richard Conte est l'auteur de « En attendant que ça sèche », Editions des Musées du Berry / Galerie P. Weider, Paris, 1994, de « L'usine dans l'espace francilien » (avec Yann Toma et Martine Tabeaud), de » Pommes libertines », Ed Bernard Pascuito, 2008, (avec Emmanuel Pierrat) et de « Inimages », Klincksieck, 2008, (avec René Passeron et Jean Lancri). Ses activités associent l'organisation d'expositions autour de problématiques actuelles (le clonage reproductif humain, le sport et la performance, l'animal vivant dans la création, l'art et le droit, l'art domestique, le dessin hors papier, Les catastrophes et l'Esthétique du pire, le cerveau plasticien...), à des colloques et forums croisant création et recherche; ces manifestations donnent lieu à la publication d'ouvrages mêlant artistes, scientifiques et théoriciens. En tant que chercheur, il porte son intérêt sur la Poïétique (inspirée de Valéry, Pareyson et Passeron, comme anthropologie de la création. A sa positon d'universitaire, il conjugue son travail d'artiste dont l'implication personnelle nourrit ses autres activités. Ses œuvres font partie de collections en France mais aussi au Danemark, aux USA, en Russie, en Corée du Sud, en Chine, au Canada et en Tunisie.