La séance plénière d'hier à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), a connu des rebondissements assez graves: ouvrant la séance, le vice-président de l'ARP, Abdelfattah Mourou, ne s'est pas empêché d'exprimer son étonnement et sa déception quant à l'arrivée en retard des députés. Voulant ironiser la situation, Mourou a dit : « ma mère, ma maman et moi-même déclarons cette séance ouverte ». Ceci n'est pas la première fois où le Parlement entame une séance plénière avec un nombre honteux de députés présents. L'organisation Al Bawsala, spécialisée dans le suivi des travaux de l'ARP, a dénoncé, plus d'une fois, l'absentéisme et le retard des élus du peuple. Le dernier rapport publié par Al Bawsala a révélé des chiffres alarmants: au cours du mois de mars dernier, un seul député, sur deux cents dix-sept, a participé à tous les votes. La moyenne de présence générale était de 56% jusqu'au mois d'avril 2016. Du côté des commissions, internes à l'ARP, les constats sont pires encore. En effet, il existe quelques commissions qui ne se sont jamais réunies (en dehors de la réunion de leur création). La publication de tels faits ont coûté de nombreuses campagnes de dénigrement à l'encontre des élus qui se sont mis, à quelques petites exceptions, à défendre leur comportement. Une fois l'affaire relativement apaisée, est survenue celle des députés ‘touristes'. Cela a commencé avec les trois députés qui ont rejoint le bloc de Nidaa Tounes après avoir quitté celui de l'Union patriotique libre. Cet incident a amené le président de l'UPL, Slim Riahi, à porter de graves accusations à l'encontre des députés dissidents en affirmant que ces derniers avaient reçu des sommes d'argent de la part de l'homme d'affaires controversé Chafik Jarraya qui œuvrerait à récupérer le bloc du mouvement anciennement majoritaire. Quelques semaines après ce scandale – qui, comme beaucoup d'autres scandales antérieurs, n'a été suivi ni par les partis politiques ni par le ministère public – l'affaire a repris au sein du Parlement: le président du bloc de l'UPL, Tarek Ftiti, a retiré la présidence d'une commission à Noureddine Ben Achour après que ce dernier ait démissionné de l'UPL au profit de Nidaa Tounes. N'appréciant pas cette décision, Ben Achour ne s'est pas tu et a commencé à répondre à son ancien collègue. Mais, malheureusement, les choses ne sont pas restées au niveau de l'oral après que Noureddine Ben Achour ait cogné Tarek Ftiti sur la tête... Une scène surréaliste qui s'est pourtant produite là où siège le pouvoir législatif de l'Etat tunisien postrévolutionnaire. Adieu donc la restauration du prestige de l'Etat et de la bonne image des députés que l'on souhaitait propager afin que les citoyens ne se sentent pas trop découragés pour se rendre aux urnes lors des prochaines élections municipales. Il est triste de constater qu'à l'ère de la démocratie et du supposé Etat de droit, on arrive à assister à une telle bassesse de la part de ceux qui ont été élus afin de répondre aux attentes de tout un peuple.