L'économie tunisienne est de plus en plus fragile et fragilisée. Même l'adoption de la constitution et le changement du gouvernement n'ont pas apporté le plus escompté au niveau de la relance économique. La vague de grèves, annoncée et sauvage, amorcée par les syndicats, n'a pas donné de répits pour notre économie. Plusieurs menaces guettent encore notre économie. Depuis Janvier 2011, on suit avec préoccupation la montée en flèche de la spéculation immobilière, au point de craigner l'explosion de la bulle immobilière, qui sera fatale pour l'économie tunisienne et principalement pour le secteur bancaire. Hausse importante des prix : Après le soulèvement de Janvier 2011, plusieurs millions de dinars ont été retirés des banques. Plusieurs autres millions de dinars se sont envolés, sans connaitre la destination. C'est une réaction normale des investisseurs, qui cherchent un investissement sûr en périodes troubles. Mais aussi de la part d'hommes d'affaires ayant eu de l'argent de manière illégale, et qui cherchent à cacher leur butin. Ces millions n'ont pas intégré le circuit bancaire et sont restés dans la nature. Selon nos investigations, cet argent est allé à la spéculation immobilière. Il n'y a pas plus sûr que la terre et les murs pour cacher son argent. Les prix de l'immobilier ont explosé depuis Janvier 2014. Sur un autre plan les constructions anarchiques, et la construction sur des terres de l'Etat se sont multipliés. L'immobilier est le seul secteur qui n'a pas connu ni le chômage ni la baisse depuis le soulèvement de 2011. Selon des professionnels du secteur, les prix de l'immobilier ont augmenté en moyenne entre 12 et 13% par an, alors qu'une hausse de 4 à 5% est acceptable en temps normal. Les causes de cette hausse importante des prix de l'immobilier sont multiples : – La rareté des terres constructibles, – La hausse des coûts des matières premières et principalement le fer et le ciment, – La hausse du coût de la main d'œuvre, – La rareté de la main d'œuvre qualifiée, – Les nouvelles taxes sur les biens immobiliers, – Les restrictions sur les crédits à l'habitation – La spéculation : plusieurs intervenants anarchiques interviennent dans le secteur, par des opérations de ventes et achats spéculatifs avec dégagement de bénéfices et des marges importantes. Même pour les ventes immobilières, les prix du mètre carré bâti ont explosé. La hausse des prix dans certaines régions prisées du grand Tunis atteint parfois les 20% d'une année à l'autre. Le spectre de la bulle immobilière déclenchée aux Etats Unis en 2008 et qui a causé la plus grande crise économique mondiale est toujours présent dans nos esprits. Des craintes concernant une nouvelle explosion dans notre économie sont bienfondés. Certains analystes du secteur essayent de nier ces craintes, afin de calmer le marché. Mais l'économie c'est la science de la réalité. Un secteur important dans l'économie nationale : Le secteur de l'immobilier est l'un des piliers de l'économie nationale. C'est dans ce cadre que la théorie économique nous enseigne que « quand l'immobilier va, tout va ». C'est pour affirmer l'effet d'entrainement de ce secteur dans chaque économie. Le secteur représente plus de 13% du PIB, dépassant des secteurs comme l'agriculture et le commerce, et il emploi plus de 27 milles personnes (chiffres de 2010). L'investissement dans l'immobilier représente plus de 23.5% du total des investissements selon le budget économique de 2013. Il existe en Tunisie plus de 2.5 millions d'habitations, dont 426 milles sont inhabitées. Selon des statistiques officielles, plus 23% des tunisiens, vivent dans la location. Le nombre des promoteurs immobiliers en Tunisie est très important en comparaison avec la taille du marché. Ils sont plus de 3000 dont 1200 seulement sont réellement actifs. Selon les professionnels du secteur les invendus sont le véritable cauchemar des promoteurs immobiliers. Les invendus totalisent une valeur de 5000 millions de dinars. 70% sont du haut standing, et 30% sont de la catégorie standing et économique. De l'autre côté, le logement social ne connait pas un grand essor, malgré les programmes et les annonces faites par tous les gouvernements qui se sont succédé. Le secteur bancaire est le principal pourvoyeur de fonds pour le secteur immobilier, que ce soit au niveau de la construction ou pour les consommateurs. L'encours des crédits alloués au secteur immobilier jusqu'à septembre 2013 a atteint 4813 MD, contre un encours de 2292 MD en 2007 soit plus que le double. Quant à l'encours des crédits alloués aux particuliers pour le logement atteint 6840MD en Septembre 2013, contre 6119 MD en décembre 2011. Les arguments qui militent en faveur de la bulle immobilière: A la lumière des chiffres précités, il y a des vraies craintes d'une bulle immobilière en Tunisie. En effet, on constate une baisse du pouvoir d'achat des consommateurs. Selon nos statistiques, cette baisse est de l'ordre de -4% annuellement. La classe moyenne, qui est la classe capable d'acquérir des logements, est en train de s'effriter. Elle est passée de 80% en 2010 à plus de 60% en 2013. La pauvreté en Tunisie atteint 15.5%, et la pauvreté extrême plus de 4%, ce qui réduit le nombre des acheteurs potentiels de biens immobiliers. A la lumière des invendus qui existent actuellement, ainsi que l'évolution des constructions dans toutes les régions, plusieurs promoteurs immobiliers vont se trouver en difficultés financières de remboursement. Les chiffres attestent que plusieurs promoteurs ont déjà mis les clés sous la porte. Cette situation aura un impact sur le recouvrement des crédits auprès des banques. En effet, le chiffre annoncé par le gouverneur des crédits accrochés, qui atteint les 20% est très dangereux. Donc on aura, des promoteurs immobiliers endettés auprès des banques, des consommateurs n'ayant pas les moyens d'acquéreur un habitat ou un lot de terrain. Certains promoteurs ou banques ayant saisi des biens, vont se trouver devant le fait de sacrifier des biens à des prix bas pour combler les trous des finances. Et s'est ainsi que la spirale de la bulle va commencer. On n'est pas loin de ce scénario. Les jours le prouveront.