Il n'est plus possible en Tunisie de distinguer entre les idiots, les gens bêtes, les magouilleurs et les personnes malintentionnées, surtout quand il s'agit de problèmes économiques et sociaux. Ainsi, à chaque fois qu'il y a un mouvement populaire pour revendiquer le développement et l'emploi, on ne peut s'empêcher de penser à ceux qui exploitent les manifestations et le désordre pour ajouter leur grain de sel en finançant des perturbateurs et des professionnels de la gabegie. Actuellement, les choses deviennent chaque jour de plus en plus graves, comme c'est le cas pour les exportations de l'huile d'olive tunisienne. Et en cette période de vaches maigres, chaque jour nous apporte son lot de mauvaises nouvelles et pour les dernières, une rumeur de parties italiennes alléguant que la Tunisie a vendu à l'Allemagne de l'huile d'olive de mauvaise qualité et mélangée à d'autres huiles végétales et non conformes aux normes, comme si les Allemands nous achètent ces produits sans effectuer les analyses nécessaires. Cette rumeur est allée même jusqu'à affirmer que le ministère des Affaires étrangères de ce pays a accusé, sur son site officiel, la Tunisie d'avoir vendu à son pays, en 2015, de l'huile qui a été mélangée et je ne sais quoi encore, d'après le journal en ligne Tounes News. Le journal en ligne ajoute que des tractations avaient eu lieu sans aboutir à un accord et que le ministre tunisien du Commerce aurait expliqué que cette huile était destinée à des citoyens tunisiens et qu'elle avait été expédiée en Allemagne par erreur, tout en promettant que les quantités concernées seront remplacées pour l'Allemagne. Cette explication est pire que le méfait lui-même, parce que cela veut dire qu'on destine au consommateur tunisien n'importe quel produit sans respect des normes et là on ne peut blâmer les commerçants qui vendent de la viande d'âne au prix de la viande bovine au citoyen, ni ceux qui présentent des produits périmés aux consommateurs. Ceux qui tentent de véhiculer cette rumeur sont plus néfastes que les terroristes qui utilisent les armes pour détruire le pays et son économie. Ces personnes malintentionnées tentent, d'une part, de torpiller les exportations d'huile d'olive qui ont sauvé, cette année, la balance commerciale de la Tunisie, et, d'autre part, de provoquer la colère des consommateurs tunisiens, pour semer le désordre dans le pays. C'est dire que ces magouilles ne sont pas l'œuvre de personnes qui veulent du bien pour la Tunisie mais plutôt de certains fauteurs de trouble qui cherchent, simplement, leurs intérêts personnels, comme c'est le cas d'hommes d'affaires véreux, des contrebandiers et de politicards qui utilisent tous les moyens pour que la Tunisie devienne un non-Etat où ils peuvent accomplir leurs forfaits en toute impunité. Entretemps, le pouvoir en place s'enlise dans ses dissensions internes et n'accorde à ce genre de méfaits qu'une attention mitigée en publiant des communiqués pour démentir ces rumeurs, sans chercher à détecter ceux qui sont à l'origine ou à sanctionner et sévir radicalement contre ces ennemis de la Tunisie. Une période des plus sombres Le « règne » de la Troïka, Ennahdha et du Congrès pour la République (CPR) de Moncef Marzouki et d'Ettakattol pour le travail et les libertés de Mustapha Ben Jaafar, avait donné le ton, depuis la Révolution, avec un blocage total de la production du phosphate et des pertes sèches de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) du Groupe chimique tunisien (GCT) au niveau des exportations et de la commercialisation de leurs produits, quatre ans durant. Certes, on peut alléguer que c'était dû aux mouvements de protestation populaires, mais dans une véritable démocratie, la situation aurait été autrement, parce que si on respecte le droit de protester, il ne faut pas oublier celui de la liberté de travailler. Comment expliquer que la Troïka ait laissé la situation se dégrader de cette manière, s'il n'y avait pas anguille sous roche, surtout que les protestataires ne se comptaient même pas par centaines et que ce mouvement, et cela avait été prouvé, était manipulé par des personnages ayant d'autres intérêts que celui de développer l'économie du pays. Il avait fallu attendre l'arrivée de Mehdi Jomaa à la tête du gouvernement tunisien pour que les choses commencent à rentrer dans l'ordre, avec l'intervention de l'armée et des forces de sécurité, pour débarrasser le terrain des quelques sit-inneurs qui avaient érigé des barrages sur la voie ferrée et les routes conduisant aux carrières de phosphates et, permettre, entre autres, la reprise de la construction d'une usine de phosphate dont le coût est de 500 millions de dinars. Jusqu'à maintenant, personne n'a donné des explications claires à ces méfaits qui avaient donné l'estocade à une économie déjà moribonde et qui s'essoufflait de plus en plus. Le secteur ne se relève pas de la crise Après une lueur d'espoir, la situation s'est dégradée davantage, depuis le début de cette année, surtout qu'entre le 1er janvier et le 6 février 2016, la production de la CPG n'a pas franchi la barre des 361 000 tonnes. Cette performance est inférieure de 41% aux prévisions de la CPG sur cette période, selon Hafedh Ben Yahya, responsable de la direction de contrôle de la production. Dans une déclaration accordée à la TAP, Ben Yahya a indiqué que ce résultat est dû aux revendications sociales des habitants des gouvernorats où se font l'extraction et la transformation du phosphate et de ses produits dérivés. Depuis le début de l'année, ces contestations pour l'emploi ont enregistré une recrudescence. Le rythme croissant de la production réalisé durant le deuxième semestre 2015 n'a pas pu se maintenir en raison des rassemblements de protestation observés par les sans-emploi dans les lieux de production de phosphate, notamment à Oum Larayes et Redeyef, a fait savoir Ali Houchati, responsable de la communication au sein de la compagnie. Depuis deux semaines, a-t-il ajouté, la production à la CPG fonctionne à 30% de sa capacité du fait que les mines d'extraction de phosphate brut, les unités de production de phosphate commercial à Oum Larayes et Redeyef ainsi que la mine de Kef Chefaier sont complètement bloquées. La laverie de la mine de Kef Eddour, qui constitue l'une des principales composantes de la compagnie, a également été bloquée ces derniers jours. La compagnie risque donc de ne pas atteindre l'objectif de production de 6,5 millions de tonnes qu'elle s'est fixée pour 2016. Elle a même de fortes chances de renouer avec le scénario noir de 2014 où elle n'avait fonctionnée qu'à 55% de ses capacités. Une campagne chèrement payée Après les dernières élections qui ont porté le parti de Nidaa Tounès au pouvoir, plusieurs actions suspectes ont été menées pour entraver le développement régional et provoquer la colère du peuple tunisien contre ses dirigeants. La campagne très vicieuse « Winou el pétrole » avait donné le ton à un mouvement de protestation populaire qui avait enflammé tout le sud du pays. Cette campagne initiée sur Facebook avait enflammé les réseaux sociaux et provoqué des manifestations, réveillant les vieux démons de la Tunisie. C'est l'annonce (une rumeur) de la découverte d'un nouveau puits dans le sud de la Tunisie, par une société d'exploration néerlandaise, début mai 2015, qui a mis le feu aux poudres. Quelques jours plus tard, a fleuri sur Internet le slogan «Winou el petrol ?» (Où est le pétrole?). Peu après, des manifestations avaient éclaté à El Faouar et Douz, dans le gouvernorat de Kébili (sud), à proximité de l'emplacement du fameux puits de pétrole. L'affaire met, certes, en relief la fracture qui sépare les régions côtières du sud et du centre du pays, les tensions entre les partis politiques, le poids des vieilles pratiques politiques et économiques ainsi que la difficulté du pays à échapper au penchant pour la rumeur. Outre les petites manifestations organisées à Tunis, l'agitation avait touché les régions les plus démunies du pays. Dans la région de Douz, la contestation avait pris un tour violent : un poste de la garde nationale avait été incendié. Les meneurs avaient été accusés d'être instrumentalisés par les partis du gouvernement sortant, notamment le CPR, tandis que de part et d'autre on s'accuse de complot ou de prêter le flanc à Daech. Selon ses détracteurs, le CPR profiterait de cette campagne pour se remettre en selle après ses revers électoraux. Pour autant, «surfer sur le sentiment d'injustice des plus démunis en laissant se propager l'idée que la Tunisie serait assise sur de vastes réserves pétrolières, cachées à la population, est malsain», estime un consultant en intelligence économique et fin connaisseur de la question des ressources naturelles tunisiennes. «La campagne Winou el pétrole s'appuie sur une mentalité rentière sous-jacente», avance Michael Béchir Ayari, analyste à l'International Crisis Group : «On a fait la révolution, Il faut bien qu'on en voit les bénéfices. Et comme l'inégale répartition des richesses n'a pas été réglée, la solution pourrait venir du mirage pétrolier. Nos voisins Algériens et Libyens sont inondés de pétrole. Pourquoi pas nous ?». Cette campagne n'est pas passée sans laisser des séquelles, surtout avec les menaces de départ de plusieurs compagnies pétrolières et des réticences d'autres pour venir prospecter dans le pays. Où vont-ils conduire la Tunisie ? Cet état de fait nous édifie sur les méfaits de la classe politique actuelle et nous permet de nous interroger sur le destin de ce pays, à travers les agissements de ses politiciens embourbés dans leurs querelles et leurs dissensions. Sinon, comment expliquer qu'après avoir été élus au nom de Nidaa Tounès, de nombreux députés de l'Assemblée des représentants du peuple se permettent le luxe de quitter ce parti qui les a mis au premier plan, alors qu'ils n'ont aucune notoriété et qu'ils étaient de simples obscurs, avant de faire partie de ce mouvement devenu le bastion des magouilleurs et des trouble-fête, surtout que notre Président de la République a cautionné l'intronisation de son fils qui n'a aucun diplôme de l'enseignement supérieur et aucune expérience politique. Entretemps, tous les locaux des représentations régionales et locales de Nidaa Tounès sont aux abonnés absents et leurs portes restent closes, avec une rupture totale avec les bases qui ont fait le bonheur de ce parti et qui ont cru qu'il sera le sauveur de la Tunisie des griffes d'Ennahdha. Quant au gouvernement actuel, soi-disant celui des technocrates, il n'a rien fait pour sortir le pays de sa situation catastrophique, depuis son installation, et même après son remaniement. N'était-il pas de son rôle d'anticiper les mouvements sociaux, de prévoir l'explosion et les méfaits des malintentionnés et de présenter au peuple, au moins, les esquisses de solutions pour l'avenir. Le gouvernement de Habib Essid a attendu que la situation s'envenime pour présenter un programme de recrutement, dans l'administration, pour 23 mille citoyens (ce qui n'est pas encore certain). En outre, sa dernière décision (peut-être la dernière en tant que chef du gouvernement, selon les rumeurs qui circulent) est celle d'accorder, aux jeunes entrepreneurs, les financements de leurs projets, sans qu'on leur demande un autofinancement, chose qui parait impossible si on se réfère au passé, même sous le régime de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali. Et comme un malheur ne vient jamais seul, le terrorisme est venu ajouter son grain de sel, avec les attaques contre le musée du Bardo. Le terrorisme et le coup de grâce au tourisme Selon le bilan du ministère de la Santé, 21 personnes sont mortes, en plus des deux assaillants. Parmi elles, 20 touristes dont des Italiens, Colombiens, Japonais, Australiens, Espagnols, Britanniques et un Tunisien membre des forces de l'ordre. Trente-sept personnes avaient été hospitalisées. Parmi elles, un couple d'Espagnols sortis seulement le lendemain de l'attaque, de leur cachette dans le Musée du Bardo. Certains touristes voyageaient avec le croisiériste Costa, dont un bateau faisait escale dans le port de La Goulette, dans la banlieue de Tunis. Costa Croisières avait fait savoir que 14 passagers n'étaient pas remontés à bord. Par ailleurs, trente-sept personnes, dont des touristes étrangers, ont été tuées à la suite d'une attaque terroriste, à Port Kantaoui, lorsqu'un individu armé avait ouvert le feu dans l'hôtel Marhaba de la station balnéaire de Sousse, au sud de Tunis. Trente-neuf personnes avaient également été blessées. L'auteur de l'attentat sanglant était un étudiant tunisien inconnu de la police, originaire de la région de Kairouan. D'après le ministère, l'assaillant était sorti de la mer avec sa Kalachnikov et tiré des rafales sur les personnes sur la plage. Le directeur d'un hôtel situé juste en face du Marhaba affirme que les terroristes ont utilisé des vedettes et des jet-ski pour accéder rapidement à la plage. Ce drame a frappé la Tunisie, une nouvelle fois, au cœur de son secteur touristique qui ne cesse d'accumuler les mauvaises nouvelles, depuis, et dont les recettes ont chuté pour plus de la moitié, avec, en plus des professionnels qui mettent la clé sous la porte. Le règne de l'impunité Ces deux coups, en plus des derniers troubles de Kasserine et qui ont failli dégénérer en révolte de toutes les régions ont fait le reste, pour que la nouvelle saison touristique soit un fiasco total, avec des prévisions qui font vraiment froid au dos. Entretemps, les politiciens et les « experts » de toutes sortes pavanent sur les plateaux des télévisions et sur les ondes des radios pour faire des révélations fracassantes, en toute impunité, et sans apporter les preuves de leurs allégations. Même le président de la République, Béji Caïd Essebsi, avait accusé des partis politiques autorisés et d'autres parties d'avoir manipulé les mouvements de protestations populaires de Kasserine, sans nous édifier sur l'identité des personnes ou sur les partis impliqués dans ces actes néfastes pour le pays et son économie. Ce n'est là qu'un petit aperçu des méfaits que certains sont en train d'accomplir, impunément, pour saper l'économie du pays, alors que nos députés sont occupés par leurs augmentations de salaires et de primes. Est-ce qu'ils se sont interrogés, un jour s'ils méritent, même, les salaires qu'ils perçoivent, surtout qu'ils allèguent qu'ils sont au service du peuple, alors qu'ils sont en train de le saigner à blanc ? Tout cela nous rappelle la sagesse des anciens qui avaient dit : « Dieu, préservez-moi de mes amis. Mes ennemis, je m'en charge !! ».