Les enseignements de la crise financière et économique mondiale n'ont pas été tirés seulement de ses causes, mais également des réponses qui lui ont été apportées. Sous la pression de la conjoncture, il paraît que certains experts ont eu vraiment de l'imagination en concevant des réponses originales, notamment dans les pays les plus touchés, en l'occurrence les pays industrialisés. De telles solutions représentent une véritable source d'inspiration et certaines d'entre elles semblent être transposables même en dehors du contexte de la crise. Parmi les exemples que l'on pourrait évoquer à ce propos, il y a celui du statut des « auto-entrepreneurs » récemment prévu en France par la loi de modernisation de l'économie. En effet, ce statut a une grande incidence sur les forfaitaires et sur le secteur informel, des problèmes qui sont bien ressentis en Tunisie, d'où l'intérêt d'étudier le nouveau régime. Ce dernier se caractérise, en fait, par une double simplification. En premier lieu, les personnes qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur ou égal à 80.000 euros pour les activités de commerce et de 32.000 euros pour les activités de services ne sont plus tenues de s'immatriculer au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. Il leur suffit de déclarer leur activité commerciale, artisanale ou libérale, auprès d'un organisme dénommé « Centre des formalités des entreprises » ou sur un site internet dédié à cet effet. Le formulaire de déclaration de début d'activité à remplir est extrêmement simplifié : dix questions au total. Un numéro « Siren » est alors attribué, leur permettant de facturer leur activité en toute légalité. En second lieu, la loi instaure un mécanisme original de paiement des cotisations sociales et des impôts, sous forme de versement forfaitaire libératoire calculé sur les recettes. L'idée-force de ce nouveau statut tourne donc autour d'un principe : pas de recettes, pas de cotisations. L'entrepreneur n'a rien à verser avant le démarrage effectif de son activité. Il ne paiera des charges sociales que s'il a réalisé des recettes selon un taux variable en fonction de la nature de l'activité. Pour les activités commerciales, le taux global du prélèvement sera de 13% (un taux de versement social de 12% + un taux de versement fiscal de 1%), de 23% pour les activités de service (un taux de versement social de 21.3% + un taux de versement fiscal de 1.7%) et de 23.5% pour les titulaires de bénéfices non commerciaux (un taux de versement social de 21.3% + un taux de versement fiscal de 2.2%). Chaque trimestre ou chaque mois, au choix, il suffit donc de déclarer le montant des recettes sur la base duquel seront calculées les charges sociales, qui peuvent être liquidées par télépaiement (ce dernier mécanisme existe d'ailleurs en Tunisie). De plus, les contribuables soumis à ce régime pourront désormais, sur option, s'acquitter auprès d'un seul interlocuteur (l'Urssaf en l'occurrence) de l'impôt sur le revenu et de l'ensemble des cotisations et contributions de sécurité sociale. Un premier bilan qui a été dressé en France révèle que le nouveau statut a été un succès incontestable. En effet, depuis son lancement, au 1er janvier 2009, pas moins de 138.000 auto-entrepreneurs se sont déclarés. Un chiffre qui dépasse largement les objectifs initialement escomptés et qui place la barre très haut puisque le gouvernement français table désormais sur 300.000 déclarations, d'ici la fin d'année. Les avantages de ce nouveau statut semblent être évidents. De nombreux professionnels à statut mal défini y trouveront une façon transparente d'exercer. Adopter un statut similaire en Tunisie serait alors une bonne idée, faisant ainsi d'une pierre deux coups : faire sortir plusieurs personnes qui exercent dans le secteur informel de la « clandestinité » et encourager davantage l'entrepreneuriat.