Dans le large éventail de son cycle d'activité, visant à renforcer son rôle associatif actif et effectif, et en collaboration avec la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FSEG) de Tunis - Unité de recherche Economie Monétaire et Financière, l'Association Tunisienne d'Aide à la Recherche Scientifique sur le Net "Atars'Net", a organisé récemment un colloque international ayant pour thème «la coopération monétaire et financière euro-méditerranéenne : Enjeux et Perspectives».
Cette rencontre vise outre l'évaluation de la coopération monétaire et financière de la zone euro-méditerranéenne, la recherche des outils et moyens efficaces pour développer et renforcer cette coopération.
Le coup d'envoi du colloque a été donné par Mr Mongi Mokadem, professeur et Coordinateur de l'Unité de Recherche en Economie Monétaire et Financière à l'Université de Tunis-El Manar, qui a passé en revue dans sa présentation les différents projets de coopération entre notre pays et l'Union Européenne, qui est notre premier marché extérieur. Dans ce sens, il a indiqué que le bilan de cette coopération reste mitigé, notamment, dans le domaine de la finance et des systèmes monétaires. A ce propos, Mr Mokadem a affirmé que dans la crise économique actuelle, la coopération financière entre les deux rives devient impérative pour construire une économie étanche afin de surmonter les effets et les répercussions de la crise financière. De son coté, Mr Moncef Hergli, secrétaire d'Etat à la privatisation a mis l'accent dans son allocution sur les répercussions négatives d'une coopération stérile en matière de finance entre les pays et qui a eu pour conséquence de faire plonger le pays le puissant d'entre-eux dans une crise économique mondiale sans précédent rappelant celle de 1929. Dans ce cadre, il a indiqué que les conséquences agiront sur le renforcement des disparités entre les divers pays concernés, d'un côté, et de l'aggravation des difficultés socio-économiques dans certains d'entre-eux de nature à faire augmenter les risques d'instabilité dans cet espace, que la convention de Barcelone n'a pas manqué de qualifier d'espace de paix et de croissance partagée, de l'autre côté. Par ailleurs, Mr Hergli, a indiqué que la faible intégration des économies des pays du tiers monde (PTM) dans le marché monétaire mondial et la faible intensité des retombées monétaires des pays de la rive sud du Méditerranée, auront des retombées socio-économiques graves difficiles à supporter.
«D'ailleurs, n'annonce-t-on pas, de jour en jour, que les économies européennes ne cessent d'entrer bon gré mal gré dans une phase de ralentissement de leur croissance, voire de décroissance, plus ou moins longue ? La crainte de voir baisser le rythme de croissance dans les PTM est donc réelle. Elle se justifie, notamment, par la fragilité de la croissance dans ces économies, et par le risque de montée des difficultés socioéconomiques liées principalement à la crainte de la montée du chômage, et à la recrudescence de la pauvreté sous toutes ses formes» a-t-il ajouté. Ensuite, le secrétaire d‘Etat a passé en revue les différentes causes affectant la coopération entre les pays des deux rives et a cité à titre d'exemple la montée de l'acuité des problèmes sécuritaires du fait de l'immigration clandestine, du gonflement des circuits informels de l'argent, de l'aiguisement des conflits déclarés et de la montée des conflits latents, etc. Cette recrudescence risque d'occulter encore et davantage les questions relatives à la coopération monétaire et financière parce que jugée peu prioritaire ou n'étant pas la clé pour apaiser les tensions existantes. Dans ce sens, Mr Hergli a mis en avant l'historique des échanges euro-méditérranéens qui remonte aux années 60 et qui a permis aux pays des deux rives de bénéficier de cet échange essentiellement commercial. Toutefois, ces accords qui ont permis de faire évoluer relativement les échanges entre les deux espaces, n'ont pas permis d'avoir les appuis nécessaires pour une évolution rapide et durable, et la coopération était sous forme d'aides financières publiques (sous forme de dons et de prêts) et privée (sous forme d'investissements directs). En dépit du développement des échanges commerciaux entre les pays des deux rives tendant vers la coopération financière, ces relations n'ont jamais conduit à la naissance d'une véritable coopération monétaire et financière au sens de la coordination des politiques monétaires et de change, coopération qui suppose, qu'au départ, soit adopté le principe de réciprocité et que soit concrétisée la volonté irréversible des PTM à s'inscrire dans une logique de coopération monétaire et financière, selon Mr Hergli. Mr Hergli a souligné dans la même optique les nouveaux plans du sommet d'Essen qui auront constitué le point de départ d'une nouvelle ère de coopération et de partenariat, que consacra le plan des principes globaux de la fameuse déclaration de Barcelone, adoptée en novembre 1995. Dans ce cadre il a rappelé les déclarations de Barcelone, qui œuvrent essentiellement à la consécration de l'interdépendance entre le social, l'humain, l'économique, le culturel, le politique, le financier, le commercial, etc. La coopération, comme le partenariat sont à tous les niveaux, ce qui laisse présager d'un activisme relationnel sans précédent des deux côtés. C'est dans ce contexte, tournée vers l'avenir, vers la recherche de la prospérité partagée que la Tunisie, sous l'égide éclairée de Monsieur le Président de la République, a procédé, en priorité à la signature, le 17 juillet 1995, d'un accord d'association avec l'UE. Accord qui est entré en vigueur, le 1er Mai 1998. Comme suggestions pratiques ayant pour objet de raffermir les relations monétaires entre les PTM et l'UE, Mr Hergli a exposé quelques unes, que nous allons passer en revue successivement. En effet, pour Mr Hergli, il faudrait instaurer un régime de change flexible ancré de façon plus ou moins souple entre les deux rives. De même, il faudrait que les échanges financiers entre les PTM eux-mêmes d'une part et l'UE d'autre part ne doivent pas se cantonner au seul objectif de la coopération strito sensu. Mr Hergli a réitéré que la difficulté d'une action commune de la part des PTM, est due aux diversités de situations de ces pays. Mais, il est temps de bousculer les carcans, de redistribuer les responsabilités et d'imaginer de nouveaux mécanismes pour la relance de la coopération euro-méditerranéenne. Ainsi et en inscrivant cette coopération dans une logique de réciprocité, des effets d'entraînement et de dépassement des diversités pourront amener une redéfinition des rôles attribués à chaque partie. Quant à l'intervention de Mr Jean-Paul Pollin professeur à l'université d'Orléans en France et qui s'est focalisée sur le thème «Environnement juridique et système de gouvernance: quelles conséquences pour l'intégration financière européenne?», était un bref aperçu sur le système financier de la Banque Central Européenne (BCE). Dans sa présentation Mr Pollin a passé en revue les objectifs et les défis de l'intégration financière européenne et dont la BCE constitue l'exemple phare. En effet, selon Mr Pollin, les objectifs de la BCE se focalisent essentiellement sur la réalisation de l'efficacité et la stabilité de la politique monétaire et d'éviter les risques de déficience du système financier. Et c'est à cet effet que cette stabilité se définit par la capacité donnée à tous les agents économiques d'accéder dans les mêmes conditions aux produits et services financiers. Quant aux indicateurs de la stabilité, ils sont fondés sur les prix ou les quantités du marché de l'obligation sans oublier les bons résultats que réalise le marché. Concernant la question de la relation entre système financier et système de gouvernance, Mr Pollin a indiqué que ce n'est pas parce qu'on a des marchés financiers intégrés que nous allons trouver des marchés homogènes. Dans ce cadre, on remarque une différence entre les comportements financiers d'un pays à l'autre. Entre autres, si l'on trouve un système financier développé, on a alors un niveau de vie très développé et plus les détenteurs de capitaux sont protégés, plus le système financier est sein. Pour Mr Pollin, et en se basant sur les donnés de la BCE, le système financier européen se porte bien mais le risque de déficience existe toujours. La relation qui existe entre les dimensions et les modèles économiques et sociaux, est essentiellement complémentaire et institutionnelle et ce par la protection du marché financier. Dans ce cadre, Mr Pollin a affirmé que dans le modèle anglo-saxon, on accorde une haute sollicitude au marché financier et on néglige le marché de travail. Paradoxalement, le marché financier européen, accorde plus de protection au marché du travail même s'il réalise une corrélation négative avec le marché des capitaux. En guise de conclusion, on ne peut que saluer les efforts de l'Association Tunisienne d'Aide à la Recherche Scientifique sur le Net "Atars'Net", et ceux de la Faculté des Sciences Economique et de Gestion (FSEG) de Tunis - Unité de recherche Economie Monétaire et Financière, pour avoir pris l'initiative d'organiser ce genre de colloque qui constitue un espace d'échange et de réflexion et de rencontre d'experts de toutes disciplines et on espère que cette tradition louable perdurera.