Le prix de l'électricité en Tunisie s'élève actuellement à environ 472 millimes le kilowattheure (kWh), selon des responsables du ministère de l'Industrie, des Mines et de l'Energie. Ce tarif, présenté lundi lors d'une audition devant la commission des Finances et du Budget, repose essentiellement sur une énergie produite à partir de gaz naturel, dont 70 % est importé ou perçu sous forme de redevances, principalement depuis l'Algérie. Cette audition, tenue en présence de représentants du ministère de l'Economie, de la Société tunisienne de l'électricité et du gaz (STEG) et de l'Institution internationale islamique de financement du commerce (ITFC), visait à examiner les modalités d'un nouvel accord de murabaha destiné à financer les importations de gaz naturel. Une électricité encore lourdement subventionnée Selon les données présentées, les subventions publiques couvrent environ 40 % du coût réel de l'électricité fournie aux consommateurs tunisiens. Par ailleurs, 85 % des clients de la STEG consomment moins de 200 kWh par mois, un seuil en dessous duquel toute hausse tarifaire serait socialement et politiquement sensible. Face à la pression sur les finances publiques et les contraintes d'approvisionnement, le ministère plaide pour un recours plus ambitieux aux énergies renouvelables afin de stabiliser les prix à moyen terme et réduire la dépendance énergétique. Les responsables ont également insisté sur la nécessité d'élaborer une stratégie tarifaire transparente à l'horizon des prochaines années, intégrant les besoins d'investissement, les capacités de paiement des ménages et les objectifs de transition énergétique. Un recours controversé au financement islamique Le prêt conclu via l'accord de murabaha permettra d'assurer la trésorerie de la STEG dans le cadre de l'achat de gaz naturel, mais suscite des interrogations. Des députés ont exprimé des réserves sur la présence implicite de taux d'intérêt dans ce type de montage financier, censé être conforme à la finance islamique. D'autres ont jugé que la baisse actuelle des cours du pétrole affaiblit la pertinence d'un tel endettement. Des critiques ont également visé la portée limitée du prêt face aux problèmes structurels de la STEG, notamment sa dette d'exploitation croissante, son recouvrement insuffisant, et une gouvernance jugée opaque. Des appels à une réforme profonde Plusieurs parlementaires ont plaidé pour : * L'amélioration urgente des mécanismes de recouvrement, * Une meilleure maîtrise des coûts de production, * La révision du modèle de subvention énergétique, * Un plan national clair pour les énergies renouvelables. Certains ont réclamé l'audition de la ministre de l'Industrie, afin d'obtenir des précisions sur la stratégie énergétique de l'Etat, l'évolution de la production autonome, et le rôle futur de la STEG dans un contexte d'ouverture progressive du marché. Analyse : trois axes clés à articuler pour sortir de l'impasse 1. Stabiliser les coûts tout en préservant les plus vulnérables La Tunisie est confrontée à un dilemme : réduire la charge budgétaire des subventions sans aggraver la précarité énergétique. Cela suppose une tarification ciblée, différenciant clairement les usages domestiques essentiels des consommations intensives. 2. Réformer en profondeur le modèle économique de la STEG Le recours régulier à des emprunts pour boucler la trésorerie est insoutenable à long terme. Il faut renforcer la gouvernance de la société publique, lutter contre les pertes techniques et commerciales, et diversifier les sources de revenus, notamment par des projets d'autoproduction et des partenariats dans le solaire. 3. Accélérer la transition énergétique au-delà des déclarations La Tunisie dispose d'un potentiel solaire et éolien considérable, mais les projets restent lents à se concrétiser. Il devient impératif de lever les obstacles administratifs, sécuriser le cadre réglementaire, et attirer des investisseurs privés, tout en veillant à l'inclusion sociale et territoriale. En somme, le débat sur le prix du kWh en Tunisie dépasse la simple question tarifaire. Il reflète un enjeu national de souveraineté énergétique, d'équité sociale et de viabilité économique. La transition ne pourra se faire sans vision, sans rigueur... et sans feuille de route annoncée par la Direction Générale de la STEG. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!