Un geste politique inédit sous la Ve République. Le Premier ministre français Sébastien Lecornu a annoncé vendredi matin, depuis Matignon, qu'il renonçait à l'utilisation de l'article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le projet de loi de finances 2026. Un choix présenté comme « le moment le plus parlementaire de la Ve République », selon ses mots. Cette décision place le gouvernement dans une posture fragile, alors que l'ensemble des formations de gauche, à l'exception peut-être du Parti socialiste encore hésitant, ont déjà promis de déposer une motion de censure. Le sort du Premier ministre pourrait désormais dépendre du Rassemblement national (RN), premier groupe de l'Assemblée nationale. Une journée décisive à Matignon Dès 9 heures, Sébastien Lecornu a entamé une série de rencontres avec les représentants des principales forces politiques. La cheffe de file du RN, Marine Le Pen, a été la première à être reçue. À 10h30, ce sont les socialistes qui devaient entrer à Matignon, avec des revendications précises : une taxe sur les grandes fortunes, inspirée de l'économiste Gabriel Zucman, et la suspension de la réforme des retraites. Deux exigences déjà écartées par le chef du gouvernement, qui préfère mettre en avant des mesures ciblées sur le pouvoir d'achat, comme le rétablissement de la "prime Macron" et une baisse d'impôt pour les couples aux revenus modestes. Les Ecologistes et les Communistes sont attendus en fin de matinée. Lecornu se dit prêt à « des compromis » et appelle chaque parti à « faire un geste, sans renier ses convictions ». Les Républicains posent leurs conditions La droite parlementaire, dont la position pourrait s'avérer décisive, a haussé le ton. Lors d'une visioconférence tenue jeudi soir, les élus Les Républicains ont exigé « un tiers du gouvernement » et des réponses claires sur la question de l'immigration. « La participation de LR n'est pas acquise du tout », a averti leur chef Bruno Retailleau dans une interview au Figaro. Dans les faits, l'équilibre politique à l'Assemblée s'est déjà déplacé. Les macronistes et Les Républicains ont raflé toutes les présidences des commissions permanentes, avec l'appui du RN, à l'exception de la commission des Finances, toujours dirigée par l'insoumis Eric Coquerel. Entre fragilité et ouverture « Depuis trois semaines, j'ai volontairement peu parlé pour laisser la place aux discussions », a souligné Sébastien Lecornu. Son pari consiste à transformer le budget en un exercice de compromis parlementaire, plutôt qu'en un passage en force. Une stratégie risquée, car si les socialistes rejoignent leurs alliés de gauche dans une motion de censure, le Premier ministre sera contraint de compter sur le RN ou sur une abstention massive pour sauver son poste. La France vit donc un moment politique charnière. Dans un contexte marqué par une forte polarisation, la capacité du Premier ministre à maintenir une majorité relative et à négocier « au cas par cas » sera scrutée dans les prochains jours, alors que l'adoption du budget 2026 s'annonce comme l'une des épreuves les plus délicates du quinquennat. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!