Le président El-Assad met ainsi fin à 50 ans de contentieux entre l'Etat et sa minorité kurde. Mais il repousse encore la levée de l'état d'urgence. Une main tendue à l'opposition? Damas a annoncé ce jeudi la naturalisation de quelque 300 000 de Kurdes tandis que le texte de l'abolition de la loi d'urgence est prêt à être examiné. “Le président Bachar El-Assad a promulgué un décret octroyant à des personnes enregistrées comme étrangères dans le gouvernorat de Hassaké la citoyenneté arabe syrienne”, affirme un communiqué officiel. C'est la fin d'un demi-siècle de discorde. En 1962, 20% des Kurdes de Syrie avaient été privés de leur citoyenneté à la suite d'un recensement controversé et la question empoisonnait depuis la vie des personnes concernées et les rapports entre les autorités syriennes et la communauté kurde. “Il s'agit d'une mesure positive”, a réagi Radif Moustapha, Président du Comité kurde pour les droits de l'Homme. “Mais les Kurdes continueront à revendiquer leurs droits civiques, politiques culturels et sociaux”, a-t-il affirmé. Vers une levée de l'état d'urgence… en mai Dans le même temps, “les juristes ont achevé de rédiger une nouvelle loi sur la sécurité remplaçant la loi d'urgence et ont transmis jeudi leur texte au commandement régional du Baas”, le parti au pouvoir depuis 1963, a affirmé un responsable proche du régime qui ne veut pas être identifié. “Selon moi, le chef de l'Etat en prendra connaissance ce week-end et lancera ensuite une consultation auprès de différents représentants de la société civile”, a-t-il ajouté. La nouvelle loi devrait être adoptée début mai par le Parlement. L'abolition de cette loi adoptée en 1962 et qui réduit sensiblement les libertés publiques, est une des principales revendications des manifestants qui continuent d'appeler au rassemblement. Sur Facebook s'organise un “vendredi de la résistance pour manifester en dépit de nos blessures” et à “des sit-in pacifiques jusqu'à la liberté”. Des médias d'ores et déjà plus libres Signe du changement depuis le début des contestations mi-mars, les médias officiels ont changé de ton. Le quotidien al-Baas a ainsi publié une tribune sur la loi d'urgence de Haytham Maleh, farouche défenseur des droits de l'Homme et opposant de longue date, libéré de prison il y a juste un mois. Autre nouveauté, la télévision syrienne donne depuis plusieurs jours la parole à des citoyens de différentes régions qui expriment leurs revendications, en majorité à caractère social. Les mesures répressives n'ont pas cessé pour autant. Deux opposants, Rarghida Hassan et Ammar Cheikh Haïdar, ont été condamnés à deux ans de prison par un tribunal militaire de Homs, et trois autres jugés par contumace ont écopé de trois ans, pour avoir “propagé des informations mensongères susceptibles de nuire au moral de la nation”, a affirmé Me Khalil Mattouk, président du Centre syrien de défense des prisonniers d'opinion.