La campagne électorale bat son plein autour d'un seul thème de fond, à savoir le risque d'hégémonie et résurrection de la pensée unique. La majorité massive des candidats, notamment ceux dont les partis ont essuyé un assourdissant revers aux législatives et ont été ainsi sanctionnés par les électeurs tunisiens, répètent à l'unisson le même leitmotiv. Tout leur programme se réduit à ce slogan. Dans une croisade digne d'un déni de démocratie, les fines gâchettes nourrissent le même projet, à savoir se liguer contre BCE pour lui barrer la route vers Carthage. Il est bien connu qu'en politique tous les coups sont permis, même les plus odieux, mais une question se pose : Ces chantres de la démocratie auraient du batailler, bien avant, pour inscrire à la Constitution une clause interdisant au parti vainqueur aux législatives de se présenter aux présidentielles. Une telle démarche, même insane et irrecevable, aurait au moins le mérite d'être claire et d'anticiper sur une menace qui pèserait ultérieurement (si menace il y aurait) sur le pouvoir politique à mettre en place. Non, les fins limiers ont préféré inverser le schéma et mener la fronde contre ce qui est absolument constitutionnel, ce qui constitue en soi une conspiration à la fois contre la Constitution et contre la démocratie. En effet, la Constitution Tunisienne, adoptée en Janvier 2014, et à juste titre, n'annonce rien à ce sujet (le contraire aurait été risible sinon antidémocratique). Alors pourquoi aujourd'hui certains candidats, multipliant les consultations et rivalisant de braillement, éprouvent un malin et non moins malsain plaisir à dégainer leur revolver électoral et à flinguer la Constitution. Pour les partisans, de tout bord, de l'idée de » candidat consensuel », l'heure est grave. Rien n'arrête leur agenda et leur ego, quitte à confisquer aux tunisiens leur droit de choisir, en leur âme et conscience, leur président aux suffrages universels, et au mépris des dispositions pertinentes de la Constitution. Compte tenu de leur cinglant fiasco législatif, les ténors en question auraient du démissionner de leur poste et quitter la scène politique nationale, dignement, la tête haute et par la grande porte, au lieu de se donner en piteux spectacle et d'ôter leur dernière feuille de vigne. Au contraire, ils continuent de pérorer sur le risque d'omnipotence comme si la Constitution ne prévoit pas de garde-fous et de champs de compétence bien établis. Il n'est pas interdit de dire qu'ils n'ont pas de conviction dans le dispositif constitutionnel dont ils ont eux-mêmes contribué à la rédaction. N'est pas démocrate qui veut ou qui prétend, la démocratie est avant tout une culture et un état d'esprit et non un fond de commerce ou un service sur commande.