Tout le monde en Tunisie ne parle plus que de çà ! Dans les cafés, autour des étals, dans les couloirs, dans les bus... On ne parle plus que de çà. On appréhende çà. On a une peur bleue de çà. On n'arrive même plus à se projeter dans l'avenir à cause de çà... Çà, c'est le terrorisme. Un fléau importé par quelques énergumènes mal intentionnés, comme on importerait dans des contrées saines, des spécimens de races d'animaux pour, croit-on, combattre quelques espèces autochtones. Et en fin de compte, on se rend compte que ces races d'exterminateurs importés deviennent endémiques et finissent par échapper à tout contrôle, tel un Frankenstein qui se retourne contre son créateur. Le problème avec le terrorisme en Tunisie, c'est que c'est un phénomène nouveau, auquel le tunisien, de nature pacifique, se trouve confronté, et face auquel il se retrouve démuni et désarmé. C'est pour ces raisons que ce phénomène suscite autant d'appréhension chez le tunisien qui n'arrive pas à imaginer où ces énergumènes peuvent mener le pays. D'autant plus que certains de ces malfrats qui l'ont importé, continuent de prétendre qu'il s'agit d'un épouvantail, sans plus, et qu'en réalité, il n'y a pas péril en la demeure. Ce qui fait que le tunisien ne sait plus à quel saint se vouer, et finit, vaincu par son sentiment d'impuissance, par baisser les bras, et placer son destin entre les mains des « connaisseurs », les services spécialisés de la sécurité et de l'armée, qui, il l'espère, sauront faire face au monstre. Sauf qu'apparemment, le gouvernement actuel n'appréhende pas le problème de la même façon que le commun des tunisiens. En effet, alors que ceux-ci ont peur pour leur avenir, et pour les générations futures de ce fléau, ces honorables messieurs du gouvernement n'ont d'appréhensions que pour les prochaines élections. Du coup, le gouvernement donne l'impression de concentrer toute son attention sur le fait d'empêcher les terroristes d'interférer dans l'opération électorale. Cela se devine des discours à répétition de ces honorables messieurs, en rapport avec la volonté des groupes terroristes de saborder le processus de la transition démocratique, et de répéter que le but (seul et unique) de ces groupes serait d'empêcher le bon déroulement des élections. Donc, et par voie de conséquence, il serait légitime de redouter que contre ce but (unique) des terroristes, l'Etat ne dresse sa stratégie de lutte contre ces groupes uniquement dans cette optique et qu'il se fixe comme défi (unique) de protéger les élections. Et, effectivement, il parait évident que le gouvernement concentre beaucoup de moyens pour ce faire. Il est vrai que, parfois, on nous déclare, comme il y a deux jours, que les hauts cadres de l'armée sont en train de tisser une stratégie globale pour combattre ce fléau sur tous les fronts. N'empêche qu'on a nettement l'impression que le défi essentiel de ce gouvernement est de pouvoir transmettre le pouvoir à la prochaine équipe en ayant essuyé le minimum possible de dégâts, avec l'air de dire « Après moi, le déluge ». Or, après eux, il se pourrait que çà soit trop tard. Il se peut que les groupes terroristes aient eu le temps à loisir, pour s'organiser, se pré-positionner, aussi bien à l'intérieur du pays avec ses villes et ses maquis, qu'à l'étranger, en regard de nos frontières, par exemple, avec la Libye, où tous les rapports semblent concorder pour dire que les groupes terroristes sont en train de se concentrer et de se rallier à DAECH, et envisagent d'investir la Tunisie, avec comme objectif ultime, le parachèvement de leur foutu printemps arabe, en s'attaquant à l'Algérie. Car il ne faudrait pas perdre de vue que, pour ces criminels, les élections en Tunisie, c'est le dernier de leurs soucis. Ce qu'ils veulent, in fine, c'est instaurer leur Califat en terre d'Ifrikiya. Néanmoins, le tunisien garde, tout de même, entière sa confiance, en ses services de renseignements et ses forces armées, et espère qu'ils sauront gérer ce fléau aussi bien à court terme en prévision des élections, qu'à long terme en anticipant sur tous les projets morbides de ces groupes, de façon à ce que le prochain gouvernement ne se retrouve pas, dès son investiture, en train d'évoluer dans un champ de mines.