Saïd Aïdi aura été, le long de cette dernière année, le ministre du cabinet de Habib Essid qui aura le plus brillé. Il aura brillé par les trop nombreux conflits qu'il n'a pas su gérer avec, notamment, l'UGTT. Il aura brillé par les licenciements tout azimuts des cadres de son ministère, au point où, de l'avis de ses collaborateurs, plus personne ne veut se risquer d'accepter un poste de responsabilité, de peur de se voir éjecter sans enquête ni toute autre forme de procès. Il aura brillé par la détérioration de l'état sanitaire dans le pays, un état sanitaire qui n'a jamais été aussi médiocre, même durant les périodes les plus sombres par les quelles est passé le pays. A témoin, les maladies « médiévales » qui réapparaissent et qui connaissent des flambées galopantes qu'il ne peut pas maitriser, comme la rage, les poux, la gale, et on en passe. Il aura brillé par une gestion calamiteuse et trop décalée des problèmes de la santé à l'intérieur du pays, comme il aura brillé par une riposte à ces problèmes en effectuant des « bricolages » de dernières minutes et par des « provisoires » qui sont bien partis pour durer. Il aura, aussi, brillé par un sens des priorités dont lui seul a le secret, comme quand il a saigné à blanc les finances des programmes nationaux de santé, pour financer une transaction, qualifiée par certains de douteuse, de prise en charge des malades atteints d'hépatite qui a nécessité la mobilisations de millions de dinars qui auraient du servir à financer les vrais problèmes de la santé publique. Il aura, enfin, brillé par la délégation de tous ses pouvoirs à une garde rapprochée faite de quelques conseillers, et surtout, conseillères, qui auront vite fait de se mettre sur le dos la majorité écrasante du personnel du ministère par leurs gestions erronées, parait-il des problèmes du département, et par les nominations qu'ils ont effectuées, uniquement basées sur les connaissances et les amitiés. Et brusquement, Saïd Aïdi se serait rendu compte de cet état, car il a décidé d'y remédier dans l'immédiat. Et il a l'air plus que pressé, pour ce faire. Il faut dire qu'il y a péril en la demeure. Car, même s'il ne fait, à priori, pas partie de ces ministres qui se sont juré d'avoir la tête de Habib Essid, il n'en demeure pas moins, l'un des principaux « volontaires » pour prendre sa relève. Mais la « concurrence » est, pour le moins qu'on puisse dire, rude. Et certains collègues semblent être bien partis pour le coiffer au poteau. Lui qui a tout fait, de même que son équipe de conseillers, pour se préparer à cette échéance, il se retrouve dans une situation délicate, avec un dossier bien maigre, surtout quand il le compare à son concurrent direct pour la succession de Habib Essid, Slim Chaker, qui a eu l'intelligence de se garantir un appui de taille, celui, en l'occurrence, d'Ennahdha. En effet, nombreux sont ceux qui ont compris la désignation par Slim Chaker, de Bouthiena Ben Yaghlene, la nahdhaouie qui était secrétaire d'état, à la tête de la Caisse générale des dépôts et consignations, comme une fleur faite à Ennahdha en contrepartie de son appui pour accéder à la présidence du gouvernement. Et comme Saïd Aïdi ne peut pas prétendre à un quelconque appui d'Ennahdha, notamment pour avoir déclaré la guerre à son ex-secrétaire d'Etat nahdhaoui, il ne pourra compter que sur lui même, et sur sa fameuse équipe de communication. Et c'est alors que celle-ci lui a trouvé la formule magique. Celle de prendre l'initiative, et de battre, le premier, une campagne médiatique pour contrer celle qui avait amoché son image en révélant ses « insuffisances » dans la gestion du département de la santé. Et c'est dans cette optique, et grâce au coup de génie de ses collaborateurs, que Saïd Aïdi s'est trouvé propulsé dans une campagne médiatique à haut risque, en prenant les devants, et en osant demander à être auditionné et contrôlé par des instances qui, pour le moins qu'on puisse dire, seront dans l'incapacité d'identifier les failles de sa gestion de son ministère. Il a, par ailleurs, décider d'écumer les plateaux des médias pour se présenter, non pas en tant que fautif, mais en tant que victime d'une machination « diabolique », qui n'en a pas contre sa personne, puisqu'il n'a rien à se reprocher, mais qui lui en veut pour sa « détermination » à combattre les malversations dans le secteur. Et c'est dans cette optique qu'il espère occulter tous ses problèmes, en prétendant que son seul souci proviendrait de sa querelle avec les syndicalistes de Sfax, à cause de la nomination d'un directeur général militaire à la tête du CHU Hédi Chaker. En misant sur une certaine antipathie affichée par l'opinion publique à l'égard du syndicaliste du CHU de Sfax qui lui mène la vie dure, qui serait à même de lui garantir la sympathie générale. Donc, d'un coup de baguette magique, il espère se muer du statut d'accusé de mauvaise gestion et de malversations, en celui de héro national, une sorte de super héro, qui s'est juré de combattre ces malversations, dont il parle tout le temps, mais qu'il n'est pas arrivé, une seule fois, à identifier. En espérant pour lui que les tunisiens soient suffisamment crédules pour se faire prendre à cette « mise en scène », on ne peut s'empêcher d'avoir une pensée mélancolique à Habib Essid qui ressemble à un fauve blessé, qui se voit trahi par son propre clan et qui se voit dévoré vivant, par les plus hardis et les plus virulents d'entre ses fils !