Tabboubi par ci, Tabboubi par là... On n'entend plus parler que de lui. Noureddine Tabboubi, le tout-puissant secrétaire général de la toute-puissante centrale syndicale. C'est du moins, ce que les leaders de l'UGTT veulent que soient perçues les choses, en ces temps de crise. Après avoir, pour le moins qu'on puisse dire, aidé à enfoncer le pays dans la situation inextricable dans laquelle il se débat, et après avoir approfondi la crise en brandissant le spectre des grèves à tous vents et dressé ses « sacrées lignes rouges » à ne pas dépasser, l'UGTT a jugé, depuis quelques semaines, déjà, que c'en était fini avec le jeune Youssef Chahed, et avec son équipe, et qu'il était temps de le lâcher. Car il faut reconnaître que le syndicat a constitué, un certain moment, le seul rempart derrière lequel Chahed pouvait se dérober des tirs de ses trop nombreux détracteurs. Donc, Tabboubi a annoncé que le gouvernement devait partir. Cela a été, en quelque sorte, une des raisons qui ont poussé vers la dernière réunion des signataires du document de Carthage. Réunion qui devait signer l'arrêt de mort du gouvernement. Mais, il paraîtrait, que les jeux ne s'annonçaient pas aussi faciles que pouvait le croire, ou l'espérer, Noureddine Tabboubi. Il semble, en effet, avoir oublié les autres constantes de l'équation dont la plus importante, et non la seule, le mouvement Ennahdha qui a montré une nette intention de défendre le gouvernement, juste parce qu'il leur promettait de leur livrer le pays, par petits paquets, à l'occasion des prochaines élections locales. Et, du coup, Chahed revigoré, semblait décidé à affronter l'épreuve du vote de l'ARP, quasiment assuré de pouvoir s'en sortir grâce à ses « amis de circonstance » les islamistes. La partie semblant devenue assez serrée, et devant être, en partie, réglée, en ce début de semaine, avec la deuxième réunion de la commission mise en place par la présidence pour définir les grands axes de priorité des mois à venir, et de là, déterminer la personne à même de diriger le gouvernement pour cette période, l'UGTT, et, surtout, Noureddine Tabboubi et son cercle rapproché, ont décidé de mettre la pression et de lancer une vaste campagne de « chantage » à l'encontre du chef du gouvernement. Ainsi, de façon quotidienne et de meeting en meeting, Tabboubi chauffe ses troupes et lance ses slogans de plus en plus agressifs, de façon à ce qu'on ne puisse plus se douter de l'avenir du chef du gouvernement et de son équipe, tellement les hostilités ont été poussées. Mais, comme les temps ne sont plus ce qu'ils étaient et que les parties ne sont plus celles qu'on connaissait, on n'est devenus jamais sûrs de rien. Il n'est désormais plus acquis que le gouvernement chute après cette méga-offensive. Donc, on s'était dit, à l'UGTT, que cette campagne serve, au moins, à quelque chose. Et si elle n'aboutit pas à faire sauter le gouvernement, qu'elle serve, au moins, à faire monter les enchères avec ses représentants, voire même, avec ses protecteurs, histoire de grignoter encore, plus d'ascendant et d'obtenir plus de contrôle sur le terrain. Histoire, aussi, de positionner la force ouvrière comme force incontournable, sans laquelle rien ne réussit et rien ne se décide. Donc, on ne pouvait pas s'étonner de voir Tabboubi qui demandait à Chahed de déguerpir, hier samedi, depuis Sousse, modérer sa position, ce dimanche, à Bizerte, et annoncer qu'il était, toujours possible de le laisser diriger le prochain gouvernement, moyennant quoi ? Çà Tabboubi ne l'a pas dit. Pas en public, du moins !