Le climat des affaires d'un pays est une composante importante de l'environnement institutionnel dans lequel opèrent les entreprises. Il comprend divers volets dont notamment la qualité des infrastructures, le cadre politique et légal, le cadre réglementaire et administratif, le système judiciaire, les marchés financiers et du travail, etc. (confère figure1). Figure 1 : Schéma du climat des affaires Les politiques et le comportement des pouvoirs publics ont une influence très importante sur la qualité de l'environnement des affaires en raison de l'incidence qu'ils ont sur les coûts, les risques et les obstacles à la concurrence. De fait, l'environnement des affaires est un concept qui est étroitement lié à ce que certains économistes et analystes appellent communément les «infrastructures sociales», c'est-à-dire les institutions et les politiques gouvernementales qui déterminent et conditionnent l'environnement économique dans lequel évoluent les individus et les entreprises. Partant du constat que les politiques et comportements des gouvernements ont une influence sur les opportunités et les incitations offertes aux individus et entreprises, les différences dans l'environnement d'affaire d'un pays à l'autre ont des incidences significatives sur le niveau et la productivité des facteurs et des investissements et ultimement sur la croissance. Développer un climat d'investissement caractérisé par un système judiciaire indépendant, un système financier développé, des infrastructures denses et de qualité et une main-d'uvre qualifiée s'impose ainsi comme une stratégie de long terme décisive et nécessaire pour améliorer la compétitivité de l'économie et stimuler la croissance économique. Cependant, les améliorations dans ces domaines nécessitent de lourds investissements de long terme et ne sont pas toujours sous l'influence directe des gouvernements. Ce qui est en revanche sous le contrôle direct des gouvernements touche plutôt le cadre réglementaire des affaires et dans lequel des progrès significatifs peuvent être réalisés rapidement et au moindre coût possible. Le dernier rapport de la Banque mondiale «Doing Business in 2012» affiche un bon classement pour le site tunisien en comparaison avec les autres pays de la région, en ce qui concerne son environnement d'affaires (confère graphique 2). Mais, ce score global cache en réalité plusieurs dysfonctionnements qui caractérisent le cadre réglementaire et administratif du pays. Figure 2 : Classement comparé de la Tunisie pour la conduite des affaires De fait, plusieurs barrières administratives continuent à se manifester à plusieurs niveaux et avec une amplitude assez inquiétante. Il s'agit notamment des obstacles liés au démarrage des entreprises, à l'enregistrement de propriété, à l'accès aux crédits, aux permis de constructions et au respect des termes des contrats. Figure 3 : Classement mondial de la Tunisie pour la conduite des affaires par Composante Ces faiblesses sont davantage mises en avant par le Forum Economique Mondial dans son rapport sur la compétitivité globale 2010-2011. Dans ce rapport, de nombreuses insuffisances sont identifiées et se manifestent essentiellement au niveau de la qualité des institutions, de l'environnement macroéconomique, du développement du marché financier, de la sophistication du commerce et de l'efficience des marchés des biens et du travail. Table 1 : indice de compétitivité globale de la Tunisie par Composante Le Forum Economique Mondial de Davos souligne par ailleurs, sur la base d'une enquête menée auprès d'investisseurs nationaux leur demandant de signaler les barrières les plus importantes dans leurs activités de commerce, que 17,7% des investisseurs interviewés trouvent que le manque d'accès au financement constitue la plus importante barrière à l'investissement, alors qu'en moyenne 11% d'entre eux mettent de devant les effets négatifs des régulations restrictives du travail et de la bureaucratie inefficace. Figure 4 : Obstacles majeurs pour la conduite des affaires en Tunisie De fait, malgré l'ampleur des projets de réformes annoncés durant les dernières années, les entreprises continuent à considérer que les formalités administratives induites par une réglementation excessive sont souvent complexes, longues et coûteuses. Elles se traduisent par une multiplicité d'étapes, de longs formulaires à remplir et un nombre élevé de pièces justificatives. Bien évidemment, la complexité des formalités et les délais d'attente impliquent des coûts élevés pour les entrepreneurs, découragent l'investissement et favorisent la corruption. Ces coûts peuvent être directs. Ils comprennent le temps et l'argent dépensé sur les formalités et documents, et ils sont liés aux besoins de conformité administrative. Ils peuvent aussi être indirects et surviennent lorsque les règlements administratifs tendent à réduire la productivité des entreprises et leur capacité à innover. La simplification des formalités administratives est donc essentielle à l'allégement du poids de la réglementation et à l'amélioration de sa qualité. Il s'agit en particulier d'éliminer les paperasseries inutiles, de réduire les délais et de rationaliser les procédures de demande et d'agrément. S'impliquer dans un programme de simplification des formalités contribue à diminuer les coûts de respect de la réglementation à l'échelle de l'administration, ce qui permet ainsi d'éliminer les obstacles à l'innovation et aux gains de productivité tout en stimulant l'activité des entreprises. Table 2 : Comparaison des sous-indicateurs de la conduite des affaires en Tunisie par rapport aux pays de référence Une priorité particulière devrait être aussi à accordée à la nécessité de mettre en place un dispositif qui permette d'estimer et d'évaluer les coûts liés à ces charges administratives. Ces estimations devraient comprendre tous les coûts économiques qu'impose aux entreprises le respect de la réglementation, y compris les coûts liés aussi bien directement à celle-ci qu'aux formalités administratives. Plusieurs tentatives ont été initiées dans les pays développés. L'exemple des Pays-Bas qui ont réussi à réduire de 25% les charges administratives supportées par leurs entreprises en appliquant le modèle de coût standard peut constituer un point de départ ou de référence sur lequel peuvent s'appuyer les décideurs publics tunisiens s'ils s'impliquent dans une stratégie de simplification administrative. Ce modèle mesure les coûts administratifs imposés par l'administration aux entreprises. Il décompose la législation en obligations d'information auxquelles sont soumises les entreprises, ce qui permet d'entrer dans un plus grand détail et facilite l'évaluation de l'impact des efforts concrets de réforme sur les charges administratives. L'étude menée par le Foreign Investment Advisory Service (FIAS) en 2002 montre tout l'intérêt pour les décideurs publics d'accélérer la mise en oeuvre d'une réforme du système administratif. Selon cette étude menée sur un échantillon de 32 pays, toute réduction de 10% du coût moyen des charges administratives pourrait en effet entraîner une augmentation de 5% des flux d'investissement direct étranger envers ces pays. Dans une publication récente de la Banque mondiale «Entreprendre dans un monde plus transparent» (2012), il est signalé que des analyses comparatives de plusieurs économies ont montré qu'en diminuant les délais de création d'entreprise de dix jours, le taux d'investissement et le taux de croissance du PIB d'économies appliquant des règles de bonne gouvernance augmentaient de 0,3% et de 0,36%, respectivement. --------------------------- A suivre : PLAIDOYER EN FAVEUR D'UNE REFORME DE LA REGLEMENTATION -------------------- *Etudes IACE