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«Les archives sont une source inépuisable pour la mise en valeur de notre patrimoine du commerce international»
INTERVIEW : M. MONCEF FAKHFAKH - DIRECTEUR GENERAL DES ARCHIVES NATIONALES
Publié dans WMC actualités le 08 - 08 - 2005

Le thème des archives en association avec notre patrimoine du commerce international est d'une grande actualité car il permet de situer la valeur incommensurable des trésors d'archives que nous détenons, notamment en matière de commerce international et d'appréhender en conséquence les meilleurs moyens de les conserver.
Les autorités tunisiennes ont d'ailleurs pris conscience du lien indissociable entre conservation de la mémoire et développement économique. Elles ont ainsi voulu pérenniser ce lien à l'occasion de la célébration de la première journée nationale des archives le 26 février 2004, en l'organisant sous le thème « Un siècle de participation tunisienne aux foires et expositions internationales ».
Pour obtenir des informations plus approfondies à ce sujet la Tunisie Economique a rencontré M. Moncef Fakhfakh, Directeur Général de l'institution publique des archives placée sous tutelle du Premier Ministère.
M. Fakhfakh est expert international. Il avait occupé auparavant nombre de postes dont celui de Président de la Branche Régionale Arabe du Conseil International des Archives, de Vice Président du Conseil International Sur les Archives, comme il a été à la tête de la Société Internationale des Archives Francophones. Il a publié diverses études et recherches dans le domaine des archives.

■ La Tunisie est, depuis l'époque phénicienne, réputée être une plaque tournante du commerce international. Nos archives nationales dans leur état actuel, permettraient-elles de participer à mieux faire connaître cette composante essentielle de notre patrimoine historique ?
— La conservation touche des documents pertinents concernant tous les domaines dont le commerce international vu que les documents les plus anciens remontent à trois siècles et demi. Les fonds d'archives contiennent de documents sur le rôle joué par la Tunisie dans le commerce international surtout pendant les 18ème et 19ème siècles et ce en dehors des activités de course ! Il s'est avéré que la Tunisie a
occupé un rôle important entre le continent africain et européen, et nous avons recensé des dizaines de dossiers relatifs à la participation de la Tunisie aux foires et expositions internationales depuis 1851. Ce n'est donc pas un hasard que la première exposition documentaire organisée à l'occasion de la célébration de la première journée nationale des archives le 26 février 2004, l'a été autour du thème: « Un siècle de participations tunisiennes aux foires et expositions internationales» .

■ Peut-on trouver des traces écrites de l'histoire des échanges commerciaux de la Tunisie dans les périodes anciennes ?
— Il en existe quelques traces dans les chroniques, il existe aussi quelques manuscrits dans les bibliothèques, mais comme les archives gardent principalement celles laissées par l'administration et le secteur public d'une manière plus générale, on peut dire que c'est depuis deux ou trois siècles que l'on relève les informations les plus significatives par rapport à ce secteur spécifique.

■ Durant la période précoloniale, différentes communautés ont coexisté et ont exercé différentes professions, notamment les Maltais, les Siciliens, les Grecs, les Juifs... Il est en particulier notoire que les Juifs ont créé un commerce florissant avec leurs cousins de Livourne avec lesquels ils ont conservé des liens. En trouve-t-on suffisamment de références dans nos archives sur cette période ?
— Bien entendu, les archives concernent certains documents relatifs à la diversité des communautés connues par la Tunisie et précisément les documents ayant trait à la relation entre les commerçants et les pouvoirs publics (documents consulaires). Au moyen de la naturalisation et du «tiers colonial» la France a pu absorber une grande partie des communautés européennes et ceci a permis de rééquilibrer la composition française au sein de la population tunisienne qui était auparavant minoritaire, notamment en raison de la présence d'une très forte communauté italienne et ceci bien sûr a permis de donner à la population française un rôle plus prépondérant que cela soit par rapport au commerce local ou par rapport au commerce international. Les juifs jouaient par ailleurs un rôle non négligeable dans le commerce international à côté des autres communautés autochtones non musulmanes comme les Grecs, les Maltais et les Siciliens qui étaient répartis entré le secteur primaire et le secteur tertiaire. On savait en particulier que les juifs occupaient une place dominante dans le secteur financier et parfois s'adonnaient à l'usure. Certains d'entre eux avaient aussi rempli la fonction de «Khaznadar» en assurant la comptabilité de l'Etat. Ils géraient en l'occurrence les biens de la famille Beylicale. On sait dans ce contexte selon certains documents des archives que le premier salaire du Bey avait été fixé en 1860 dans le cadre de l'établissement de la liste civile et de l'élaboration du premier budget de l'Etat tunisien. Les juifs participaient aussi à l'exportation des biens vers les pays européens.

■ En particulier la réglementation du commerce extérieur durant la période précoloniale et coloniale gagnerait à être mieux connue. Existe-il des recherches effectuées en ce sens ?
— Beaucoup de travaux de recherche sont actuellement accomplis par les universitaires. On évalue quotidiennement la présence aux archives d'une quarantaine de chercheurs. Les recherches sont aussi accomplies sur le commerce colonial à l'étranger, en France et en Italie notamment On retient en particulier celles effectuées par Sadok Boubaker dans le cadre d'une thèse sur le commerce entre la Tunisie et Marseille au 16ème et au 17ème siècle. A cette fin les archives de la Chambre de Commerce de Marseille ont été utilisées. En ce qui concerne la réglementation précoloniale, il faut savoir la qu'elle est assez réduite. On note par exemple pour le commerce intérieur l'existence d'une réglementation beylicale relative aux taxes municipales (Kanoun El M'ahsoulet) à partir de la fin du 19ème siècle. C'est une réglementation précise relative à ces taxes pour toutes les régions (détermination de la tarification fixée selon certains critères).

■ Pouvez vous donner des précisions sur les « Lezmas » ?
— Les «Lezmas» sont définies comme un fermage accordé pour une exploitation annuelle renouvelable trois fois. C'est en quelque sorte un monopole accordé pour le commerce de certaines denrées contre le paiement d'une redevance. Par exemple la redevance sur le commerce des peaux et cuirs (Dar El Jeld) de 200000 Rials était payable par fractions. Beaucoup de notables ont bénéficié de tels fermages comme la famille Jellouli. Des liens étroits existaient en effet entre le Bey et les «Mkhaznias».

■ Il est connu que des taxes étaient prélevées pendant la période précoloniale, en particulier les droits de douane sur les produits exportés ce qui est un non-sens aujourd'hui. Quelles raisons auraient justifié cela à l'époque et quels étaient les produits qui avaient été le plus taxés ?
— Il faut se rappeler que la Tunisie pendant la période précoloniale était un pays essentiellement agricole avec une part minime de l'économie pour l'artisanat. La politique de l'Etat consistait donc à soumettre les exportations à des taxes pour renflouer les caisses et assurer un revenu budgétaire stable. Trois impôts internes étaient prélevés à savoir l'impôt coranique, la Zakat et la Mejba (capitation) qui est l'équivalent moderne de la Contribution Personnelle d'Etat (CPE). La première redevance équivaut au 10ème de la valeur de la récolte (dattes, blé, huile d'olive). Les agents du fisc procédaient à la collecte de cet impôt dans les « Mandras». En fait les ressources de l'Etat à partir des impôts n'étaient pas nombreuses, compte tenu de l'absence d'une organisation optimale de la collecte étendue à l'ensemble du territoire. Par contre, les exportations étaient soumises à des taxes. Une industrie florissante avait notamment commencé à voir le jour à ce niveau au 18ème siècle : celle de la Chéchia, mais elle n'avait pas pu se développer. Elle était partagée entre les Italiens et les Maltais qui lui trouvaient des marchés surtout à Istambul (Turquie).
Les importations contrôlées par les Français et les Italiens concernaient notamment les bateaux à vapeur (« Babour »=vapeur). Après le congrès de Vienne en 1815 les pressions sur la Tunisie allaient s'accentuer. En effet Après cette date qui correspond à celle de l'arrêt de la course - laquelle ne l'oublions pas était également une source de revenus pour la Régence- des traités avaient été conclus ayant pour objectif de prévenir toute velléité de retour à la course et surtout de garantir l'entrée des produits des pays européens dans la Régence.

■ Et pendant la période coloniale ?
— Pendant la période coloniale l'économie était basée sur l'exploitation par la France des matières premières, tels que le Phosphate et les produits agro miniers ainsi que sur l'importation par cette dernière des produits industriels fabriqués. La politique commerciale avait par conséquent des objectifs différents et notamment de favoriser les exportations opérées par les entreprises françaises. Cet avantage accordé aux commerçants français allait de pair avec la mise en oeuvre par les autorités coloniales d'une politique protectionniste pour protéger ces derniers de l'accès dans le pays de produits qui puissent déranger leurs activités. Les produits agricoles et miniers étaient en l'occurrence exportés vers la métropole.

■ La Mejba prélevée par Mustapha Khaznadar est une taxe qui avait provoqué beaucoup de remous. Où en trouve-t-on trace dans nos archives et existe-t-il de manière plus générale des travaux sur l'histoire de la taxation en Tunisie ?
— La Mejba est un impôt Per Capita qui existe depuis assez longtemps. Il est important de souligner que les Tribus ne paient pas la Mejba. Par ailleurs, cinq grandes villes à savoir Tunis, Sfax, Kairouan, Monastir et Sousse en sont exempts. Des accords existent entre le Pouvoir Central et les Tribus en ce sens, à l'exception des Tribus Makhzen qui ne paient pas la Mejba mais donnent en échange des cavaliers. Sous le règne de Sadok Bey, Mustapha Khaznadar avait doublé la Mejba devant les difficultés financières de l'Etat, ce qui a donné suite au fameux soulèvement dirigé par Ali Ben Ghedhahoum. il existe dans les archives des registres fiscaux pour la Mejba dans toutes les localités soumises à cet impôt.
Les Caïds et accessoirement les Cheikhs procèdent à sa collecte. Ce qui explique d'ailleurs que certains de ces derniers se soient enrichis car ils ne remettent pas aux autorités centrales la totalité des valeurs réunies. il existe dans nos archives des ressources historiques et généalogiques relatives à la société tunisienne, son système fiscal et beaucoup de travaux ont été élaborés à partir de cela sur les impôts.


(Source : La Tunisie-Economique - Mai-Juin 2005 : Hatem KAROUI)

08- 08 - 2005 :: 06:00
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