«L'écosystème de l'entrepreneuriat dans la région MENA (Middle East North Africa) pose plus de défis qu'ailleurs». En faisant ce constat, mercredi 28 août 2013, lors d'une conférence de presse organisée au siège de l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE), pour présenter le programme Forsa, destiné à venir en aide aux entrepreneurs des pays du Printemps arabe (Tunisie, Maroc, Libye, Egypte, Yémen et Jordanie), David Brown, responsable à l'Adam Smith International, qui en est un des copilotes (avec l'IACE), en a implicitement expliqué la justification. Parrainé par la présidence britannique du G8 et lancé par le Département britannique pour le développement international et le bureau britannique des Affaires du Commonwealth, dans le cadre du Partenariat de Deauville (initié en 2011 en vue d'aider les gouvernements des pays arabes en transition économique et politique à répondre aux besoins et attentes de leurs populations), Forsa doit mettre près de 300 entrepreneurs de la région MENA en relation pendant un an avec des mentors locaux ou étrangers- pour qu'ils les aident à améliorer leurs méthodes et, partant, performances. Déployé d'abord en Jordanie, ce programme est en train d'être étendu aux cinq autres pays de la région. En Tunisie, le programme bénéficiera à 45 entrepreneurs de petites et moyennes entreprises, qui seront pris en charge par autant de mentors. Le processus de présentation des candidatures ayant déjà été lancé (www.forsa-mena.org), les 45 «couples» devront avoir été constitués courant septembre. Les critères de sélection, aussi bien des entrepreneurs que des mentors, sont assez sévères. En effet, pour pouvoir faire partie des «happy few», un entrepreneur devra satisfaire une longue liste de critères et d'exigences: avoir une «capacité démontrable à mettre en uvre une stratégie, une «compréhension claire des besoins de l'entreprise», une «volonté de participer à un suivi régulier et de transmettre la philosophie et les avantages du mentorat à d'autres personnes», «des attentes réalistes en ce qui concerne le mentorat et son impact pour son entreprise», et «connaître ses concurrents sur le marché». Ceci sur le plan professionnel. Sur le plan personnel, l'entrepreneur devra avoir de «grandes compétences interpersonnelles», d'«excellentes aptitudes à l'écoute», un «fort sentiment d'humilité» des «qualités personnelles de leadership», la «compréhension du rôle bénévole du mentor» et, last but not least, «être disposé à recevoir des conseils». Outre une expérience de 5 ans minimum dans la gestion d'une entreprise d'au moins 5 salariés et 500 k $-, d'une division, d'une ONG, ou d'un département (au sein d'un organisme public ou parapublic) et la connaissance des différents marchés de la région MENA, le mentor doit être d'une «grande empathie», avoir, comme l'entrepreneur, des «compétences interpersonnelles», d'«excellentes aptitudes à la communication et la diplomatie», une aptitude à «comprendre les difficultés des PME dans la région», et, lui aussi, un «fort sentiment d'humilité». Importants dans l'absolu, les échanges entre mentor et entrepreneur le sont davantage à certains moments cruciaux du parcours de ce dernier. Tony Bury, fondateur de The Mowgli Foundation (une institution des Emirats Arabes Unis associée à ce programme, avec l'IACE), distingue trois phases dans lesquelles l'intervention du mentor est incontournable, pour ne pas dire vitale: le démarrage durant lequel l'entrepreneur est «seul, stressé et frustré », notamment en raison du manque d'argent-, la phase de croissance pendant laquelle l'entrepreneur a besoin de culture et d'un plan d'affaires- et une fois qu'il a réussi. Car, avec la réussite arrive la richesse et un ego surdimensionné qui peut pousser les entrepreneurs à «croire que les règles de la vie ne s'appliquent plus à eux». Ce qui les fragilise et peut mettre leur entreprise en péril.