L'année avait commencé en transe, juste après l'assassinat de Chokri Belaïd le 6 février 2013. La Tunisie entra alors dans l'ère des assassinats politiques, et les journalistes seront parmi les cibles des terroristes, évidement. La situation des médias et du paysage médiatique perdurait dans le flou et l'attentisme. Cette année encore, il n'y a pas eu des cartes professionnelles, le gouvernement avait commencé l'année par d'autres soucis, la chute du gouvernement Jebali et la nomination de celui d'Ali Laarayedh ont relégué le problème de la carte professionnelle aux calendes grecques! Pourtant, les syndicats ne cessent de réclamer l'application des décrets-lois 115 et 116 concernant les médias et l'audiovisuel. La création de la HAICA (Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle) comme le stipule la loi traîne entre le palais de Carthage, le gouvernement et l'ANC, et ne voit finalement le jour qu'en juin 2013 avec évidement beaucoup de critiques Cependant, sa constitution est saluée par les syndicats, par RSF (Reporters Sans Frontières) et par les journalistes comme un acquis à défendre et à consolider. Mais jusqu'au mois de décembre la HAICA, n'arrivera pas à se faire entendre par le gouvernement Laarayedh et essaie tant bien que mal à se frayer un chemin entre les mille-et-un obstacles sur son parcours Sur ces faits, éclate en juillet l'affaire d'Ettounsia TV dont le directeur, Sami Fehri, était toujours en taule. L'achat par le magnat Slim Riahi de la fréquence sur laquelle émet Ettounsia TV rappelle à la HAICA et à tout le monde l'état de non-droit qui sévit sur le plan audiovisuel et la HAICA s'attelle officiellement à préparer les cahiers des charges des futures entreprises de presse audiovisuelle et demande, en attendant, à tous les médias existant de préparer des dossiers afin de se conformer à la loi. L'atmosphère se rechauffe au mois de septembre avec la multiplication des procès contre les journalistes et une grève générale est décrétée pour le 17 septembre, la 2ème du genre depuis la Révolution. Décidée par le SNJT et par le Syndicat de la culture et de l'information -dépendant de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT)-, cette grève a été décrétée pour dénoncer le harcèlement judiciaire à l'encontre des journalistes et les interférences du gouvernement dans le fonctionnement des médias publics. Elle vient en protestation contre le procès du journaliste et ancien syndicaliste Zied Heni qui a été poursuivi par un magistrat! La scène de la place écrite, tout en faisant moins de bruit continue également son ébullition. Les titres de l'après-révolution qui se sont multipliés ont très peu résisté à la dure réalité des ventes concentrées sur un ou deux titres quotidiens de l'époque de Ben Ali (SARIH, CHOUROUQ) et quelques autres titres rares qui se sont fait une petite place (MAHGREB, AKHER KHABER ). Cependant, les syndicats et les journalistes continuent à dénoncer une situation très difficile, des salaires de misère, des fraudes à la CNSS dans la plupart des entreprises de presse du pays. Des médias nouveaux, créés en l'absence de tout cadre légal, forment désormais ce qu'on peut appeler les médias islamiques car, de près ou de loin, ils sont tous proches d'Ennahdha. C'est le cas, notamment, des chaînes de télévision Al Mutawassat, Zitouna TV, Al Qalam, Al Insan, et des journaux électroniques Al Chahed, Al Sada (et d'autres comme Assaa, Anba News..) en plus des plus classiques journaux comme El Fajr et Al Dhamir! L'année 2013 se termine d'abord par une opération d'exode massif des journalistes et chroniqueurs de Nessma TV qui quittent la chaîne dénonçant des collusions avec l'ancien régime représenté par Borhane Bessaies devenu subitement très influent dans la sphère de Nabil Karoui, propriétaire de Nessma TV. Ces départs ne profiteront pas à la nouvelle chaïne créée fin 2013, Telvza TV qui commence sa diffusion après le 17 décembre 2013. En effet, la plupart des départs de Nessma vont plutôt vers Tunesna TV! La fin de l'année est marquée de noir ! C'est-à-dire du fameux «Livre noir» concocté par les services de la présidence de la République soi-disant pour hâter la loi sur la justice transitionnelle mais qui a éclaboussé beaucoup de monde et qui a suscité des réactions outrées partout!